mercredi 16 mars 2016

La "droite melting pot" des USA

On entend beaucoup parler de la droite et de la gauche en politique. Particulièrement ces temps-ci, avec les élections pour le choix des candidats des deux grands partis américains à la présidence des États-Unis. J’ai pensé faire le point, particulièrement sur la notion de droite, pour aider mes lecteurs dans l’analyse des nombreux discours qui émanent chaque jour sur nos ondes, surtout ceux du parti républicain grâce la préséance qui lui est accordée par les médias à cause de la candidature de Donald J. Trump. Une recherche sur Wikipédia m’a permis de préciser mon texte qui je l’espère sera utile à mes lecteurs.

La notion de droite et de gauche en politique nous vient de la révolution française de 1789. Elle avait rapport à la situation des sièges des députés au parlement. Ceux qui étaient assis à droite étaient des supporteurs de la monarchie. Les opposants étaient à gauche. C’est surtout après 1815, avec la restauration de la monarchie, que les ultra-royalistes furent qualifiés de l’expression la droite. Puis, avec le temps, les politiciens de droite devinrent ceux qui appuyaient la hiérarchie, la tradition et le cléricalisme en réaction contre les autres qui étaient la gauche. À partir du XXe siècle, les pays anglophones ont utilisé ces termes pour définir les tendances idéologiques de leurs partis politiques.
Puis, avec le développement de l’économie, les classes sociales se formèrent et l’influence de la noblesse et de l’aristocratie diminua pour faire place au capitalisme. La droite devint la réunion des conservateurs, des monarchistes et des réactionnaires. La gauche, de son coté, ralliait les défenseurs des droits du peuple.
Avec le temps la droite se divisa en 5 catégories : réactionnaire, modérée, radicale, extrême et nouvelle. 
La droite réactionnaire regarde vers le passé et est aristocratique, religieuse, autoritaire.
La droite modérée est tolérante au changement s’il est graduel et accepte certains aspects du libéralisme dont la domination de la loi et du capitalisme. Elle considère l’individualisme comme malsain pour la société. Souventes fois, elle fait la promotion du nationalisme et de politiques d’assistance sociale.
La droite radicale est une attitude d'esprit intransigeant et sa doctrine est celle de ceux qui recherchent une rupture complète avec le passé institutionnel et politique.
La droite extrême a quatre traits dominants : antidémocrate, nationaliste, raciste et exige une État fort. Par exemple, les partis communistes en Russie, en Chine et ailleurs, le mouvement fasciste de Mussolini et celui des défenseurs de la suprématie de la race d’Hitler.
La droite nouvelle est composée de conservateurs à tendance libérale qui veulent de petits gouvernements, des marchés libres et le respect des initiatives individuelles.
La distinction entre un parti de centre-droit et un parti d’extrême droite est forte. Le premier appuie la démocratie libérale, le capitalisme, l’économie de marché, les droits à la propriété privée, et une assistance sociale limitée pour l’éducation et les soins de santé. Il supporte le conservatisme et le libéralisme économique mais s’oppose au socialisme et au communisme. L’extrême droite favorise un gouvernement super fort utilisant les pouvoirs de l’état pour appuyer le groupe ethnique dominant et sa religion tout en criminalisant les autres groupes ethniques et leurs religions.
La droite rejette souvent les objectifs d’égalité de la gauche. Cela vient de ses grands penseurs du passé, qui l’ont petit à petit définie. Pour ces derniers, les inégalités sociales et économiques étaient naturelles, inévitables et bénéfiques pour la société qui pour être civilisée nécessite l’ordre (le premier parti de droite français se nommait « le parti de l’ordre ») et des classes sociales. Ils affirmaient : « les hommes sont égaux devant Dieu et les lois, mais inégaux pour le reste; la hiérarchie est naturelle et le privilège est la récompense d’un service honorable » (on se penserait aux USA), ou encore « Les hommes furent créés pour être différents et un gouvernement qui ignore cette loi est injuste car il sacrifie la noblesse pour la médiocrité ». Ils « rejetaient l’égalité des hommes car elle minait le mérite personnel, l’initiative et l’entreprise ». Pour eux, il était « injuste de limiter l’initiative personnelle car cela mènerait à l’uniformité sociale et à la médiocrité ». En somme, ils favorisaient la stratification sociale.   
Aux USA, le parti républicain, c’est la droite melting pot. Contrairement à d’autres pays où plusieurs partis politiques représentent chacun un volet différent de la droite, au États-Unis toute la droite est réunie sous un seul chapiteau et deux courants l’animent : le conservateur et le modéré. Chacun a plusieurs factions.
Le courant conservateur regroupe les conservateurs fiscaux, les conservateurs sociaux, la droite religieuse, les patriotes (les nationalistes), les libertariens (partisans d’un état fédéral réduit au minimum), les state’s right oriented (partisans du transfert des compétences du fédéral aux États), les néo-conservateurs (universitaires et intellectuels qui prêchent l’unilatéralisme américain mondial), les paléo-conservateurs (isolationnistes et protectionnistes).
Le courant modéré rassemble les centristes (fiscalement conservateurs), les progressistes (idées politiques et sociales avancées), les républicains de la Nouvelle-Angleterre et ceux de Nelson Rockefeller.
Le parti républicain est surtout proche du monde des affaires et par conséquent compte peu de soutien chez les syndicats. Il considère que seul le Congrès doit légiférer et c’est pourquoi il s’oppose à une interprétation de la constitution par la Cour Suprême, comme ce fut le cas sur le droit à l’avortement. Par contre, il veut que les juges de cette cour protègent les droits des citoyens contre l’abus du pouvoir. Il les choisit suivant leur tendance politique passée afin que leurs jugements soient conformes à la pensée générale du parti.
Le parti républicain est hostile à un système de sécurité sociale universel comme au Canada. Il défend un système de santé individuel, une fiscalité modérée, une intervention minimale de l’état dans l’économie, une sécurité sociale gratuite mais limitée pour les plus âgés et les plus démunis…
Le président Reagan a bien défini ce qu’est le parti républicain dans son discours inaugural de 1981 : « dans les temps de crise, le gouvernement n’est pas la solution à vos problèmes, mais est le problème ».   
Le parti républicain veut de l’ordre, s’oppose à réintégrer des immigrants illégaux, réclame une force militaire forte et le droit de chaque individu à posséder une arme, veut minimaliser les taux d’impôts en diminuant les dépenses gouvernementales et balancer le budget. Pour ce parti, les hommes sont égaux et pour réussir, il faut travailler, sinon « ne vous plaignez pas car votre situation est votre responsabilité et, si vous ne réussissez pas, arrangez-vous avec vos troubles car c’est votre faute ». Il récompense le mérite personnel, l’initiative et l’entreprise. Tout cela, nonobstant les conséquences trop souvent négatives sur les besoins des moins nantis de la population.
Il favorise l’intervention du gouvernement pour voter des lois appuyant les « valeurs religieuses ». Il s’oppose à l’avortement, à la contraception, aux mariages homosexuels... Il rejette les positions scientifiques sur l’évolution, la science si elle est en désaccord avec les enseignements judéo-chrétiens, etc…
La droite melting pot ne reconnait pas les problèmes dus aux changements climatiques et les qualifie d’ « invention socialiste ». Le sénateur Ted Cruz, un des candidats favoris à la présidence au congrès du parti républicain du 8 novembre prochain, a promis de déchirer le document de l’entente sur l’environnement COP21 de Paris, signé par 200 pays, s’il devient président en 2016. Elle rejette une politique d’immigration pour réintégrer les hispaniques entrés illégalement au pays. Elle favorise une politique étrangère unilatéraliste et idéaliste cherchant à imposer la démocratie ailleurs, comme en Irak, en Afghanistan et en Syrie. Elle craint les musulmans…
Lorsqu’on écoute les discours des candidats républicains actuels à la présidence on réalise qu’ils collent aux principes énoncés précédemment.
Le membership du parti républicain réside principalement chez les riches, les hommes d’affaires, les blancs, les couples mariés avec enfants, les banlieusards, les ruraux et les chrétiens.
Le parti républicain a aussi un establishment fort. C’est un groupe non clairement défini composé de gens puissants (élus, ex-élus, riches contributeurs, penseurs…) qui agissent pour défendre leurs privilèges. Dans la présente course, le candidat Trump attaque, avec raison, ce dernier prétextant qu’il influence l’adoption des lois sur la base de contributions financières des intéressés et non dans l’intérêt du pays. Trump, qui mène une campagne pour gagner, approche de son but. Il se voit soudainement menacé par John Kasich, devenu le candidat de l’establishment, qui vient de remporter sa première victoire dans l’État de l’Ohio où il est gouverneur. Trump craint ainsi ne pas réussir à obtenir une majorité de délégués avant la convention ce qui favorisera le jeu de coulisses par l’establishment pour le battre sur le plancher de la convention, nonobstant le fait qu’il aura obtenu le plus de votes lors des primaires. Belle démocratie !
Qui veut joindre les rangs du parti républicain ?  Moi, NON.

Claude Dupras

6 commentaires:

Claude B. a dit…

Salut Claude,
Intéressant ce petit tour d'horizon pour coiffer la droite républicaine aux USA. Cruz et Trump sont deux fous dangeureux mais je crois bien que Cruz est le pire des deux.Il y a eu Marine chez-nous en fin de semaine. Celle-là aussi est dangeureuse mais eller est très habile et efficace. Je l'ai vu à l'oeuvre dans un débat télévisé en France il y a quelques années de cela et, malgré la cacophonie de l'évènement, il y avait aussi Daniel Cohn-Bendit ce soir là, elle a réussi à se démarquer en dépit d'une tentative évidente de la museler. Ces chantres de la droite peuvent nous surprendre.Je pense à Ronald Reagan que je voyais comme l'incarnation du démon dangeureux de la droite avant qu'il devienne président. Je ne suis pas plus de droite qu'avant mais force est de constater qu'une fois au pouvoir les choses peuvent changer. La Dame de fer et Reagan sont de bons exemples. Peut-on vraiment dire que leur passage au pouvoir a été désastreux pour leur pays respectif? En prenant de l'âge je deviens plus zen.

Ciao

Michel D. a dit…

Bonjour Claude,

Moi, deux points à propos de Trump.

1- Je ne comprends pas qu'il puisse financer sa campagne avec SON fric sans aucune limite. Avantage pour un milliardaire. Ya pas de loi sur ça aux USA ?

2- Je n'ose imaginer ce clown à la tête de la puissance américaine. On aura beau dire qu'il aurait une équipe et des conseillers, mais son impétuosité, son égocentrisme et son je-m'en-foutisme seraient dangereux pour la paix mondiale.

Bonne semaine.

Michel D

Claude Dupras a dit…

Salut Michel

Pour la candidature du parti, pas de limite. On parle de centaines de millions de $ par candidats. Exemple, Jeb Bush qui a quitté la course a dépensé près de 200 millions $ dont plus de la moitié pour de la publicité négative contre Trump. Aux USA, si t'a pas d'argent, ôté-toi de là. Trump est un qui dépense le moins. Les autres sont financés par des PAC, riches contributeurs qui mettent de l'argent dans un pot pour atteindre un objectif quelconque. Les PAC ne sont pas nécessairement pour un candidat mais peuvent aussi faire leur propre cabale pour une cause, telles religieuse, droite, gauche, les armes, contre Obamacare, etc... Money is no object!

Si on se fie à ses discours, Trump est comme tu dis un clown. Mais pour gagner il s'adresse à une frange d'Américains qui pensent ce qu'il dit. Ce gars là n'est pas un fou. Pour réussir ce qu'il a fait dans sa vie, il faut avoir de la discipline, de la vision, du savoir-faire, du leadership, etc... Il est très intelligent. A mon avis, il ne sera pas pire que les autres. Ce n'est que s'il est choisi et élu président que l'on saura qui est le vrai Trump politique. Sur YouTube-Trump on peut écouter tous ses discours devant les foules immenses qu'il attire partout. C'est révélateur de son pouvoir de persuasion et d'attraction. Jamais ai-je vu un tel candidat politique. La prochaine convention républicaine du 8 novembre promet. Ce sera le show du siècle, à ne pas manquer!

Claude

Pierre C. a dit…

Braco Claude, quelle lucidité cher ami!

Gérard D. a dit…

Cher Claude,
Merci pour un tel exposé sur un sujet généralement plus ou moins connu mais qui a acquis de nos jours une importance considérable..... Merci encore d'éclairer ma lanterne..............Gérard G.

Gilbert A. a dit…

superbe analyse que j'ai adressée à mes amis partenaires interessés
par ta démarche !!!