mardi 31 mai 2011

Amir Khadir : un bon ou un mauvais député ?

Un député peut être ou être perçu comme un homme important de la société. Trop passent inaperçus alors que quelques uns, et ils sont rares, ont ce feu sacré qui génère une capacité, hors de l’ordinaire, d’agir, de réagir, d’être remarqué et suivi. Plusieurs chefs politiques animés de cette qualité rare, dès leur jeunesse, sont devenus de grands leaders de leur nation.

Le député Amir Khadir de la circonscription de Mercier à Montréal est un de ceux là. Né en Iran, immigré au Canada à l’âge de douze ans, il est un physicien, un médecin spécialisé en microbiologie-infectiologie. Il a formé avec une féministe de gauche, Françoise David, un nouveau parti de gauche Québec Solidaire (QS) dédié, entres autres, à la séparation du Québec de l’ensemble canadien. Il a réussi à se faire élire à l’Assemblée Nationale du Québec en 2008, où il est le seul député de son parti.

Khadir est un homme cultivé qui s’intéresse à la poésie, à la littérature ainsi qu'à la philosophie. Il aime la physique qui lui offre des « réponses simples, englobantes, qui résument en quelques mots ou en quelques phrases mathématiques de grandes vérités ».

Étudiant, il s’implique dans le Mouvement Étudiant Iranien hors-Iran qui lutte contre la dictature en Iran. Il fait partie du Comité pour la défense des Droits Humains en Iran. Il est l’un des fondateurs du Centre culturel et communautaire des Iraniens à Montréal. Il appuie les moudjahiddines du peuple iranien, un organisme islamique socialiste, ce qui le place sous la surveillance du Service Canadien du renseignement de Sécurité. Il est diplômé de McGill en physique et de Laval en médecine.

Il est de tous les mouvements de protestation, de toutes les manifestations : Outils de paix, Caravane Québec-Cuba, Santé-Tiers-Monde, Objection de Conscience, Solidarité-Union-Coopération, Médecins du Monde, Coalition des Médecins pour la justice sociale. Il participe à des projets de ces groupes au Nicaragua, au Zimbabwe, en Inde et en Irak.

Puis, Khadir saute en politique et devient membre du Rassemblement pour l’Alternative Progressiste, candidat défait du Bloc Québécois dans Outremont en 2000, candidat défait de l’Union des Forces Progressistes dans Mercier en 2003, signataire du manifeste « pour un Québec Solidaire » en opposition à celui « pour un Québec lucide » de l’ex-PM Lucien Bouchard et fondateur du parti politique « Québec Solidaire ».

Après une première défaite dans Mercier, Khadir est élu député QS en 2008. À l’Assemblée Nationale, de son siège de député, il demande, en juin 2010, la condamnation de l'arraisonnement par Israël d'un navire qui cherche à casser le blocus autour de Gaza. En novembre 2010, Khadir soutient une pétition électronique demandant la démission de Jean Charest, PM du Québec, et obtient 240 000 signatures. En décembre, il présente une motion pour réhabiliter l’ex-député Yves Michaud blâmé par l’Assemblée Nationale, il y a dix ans, pour des propos antisémites. Le même mois, un sondage le place comme le politicien le plus populaire au Québec.

Depuis qu’il est député, Khadir participe à toutes les manifestations montréalaises organisées par la gauche de la gauche. Il a lancé des chaussures sur une effigie du président américain GWBush lors d'une manifestation à Montréal, en réaction au geste du journaliste irakien qui avait fait de même en Irak, quelques jours plus tôt. Il participe à une manifestation afin de dénoncer la vente de produits israéliens (2% de ses ventes) faite par un petit commerçant de chaussures de la rue Saint-Denis à Montréal. Il s’oppose aux projets de réalisation de travaux de construction avec la formule Partenariat Public-Privé, n’hésitant pas à utiliser le mot « corruption » et ses déclinaisons lorsqu’il parle de ceux qui sont mêlés à la construction, qu’ils soient élus ou entrepreneurs.

Khadir s’oppose à la loi privée, actuellement en étude au parlement québécois, pour sécuriser l'entente entre la Ville de Québec et la compagnie Québecor en rapport avec la gérance du nouvel amphithéâtre prévu pour la ville de Québec. La loi cautionnera l'absence d'appels d'offres publics par la ville pour confier ce mandat à une entreprise privée. La loi protégera cette entente contre toute poursuite légale.

Cette loi spéciale, présentée par l’opposition, requiert l’unanimité des votes et Khadir menace de la boycotter. Pour lui, le maire de Québec doit dévoiler le contenu de toutes les offres reçues privément pour la gestion du nouvel amphithéâtre.

Ce problème résulte du fait que le maire de Québec n’a pu obtenir une participation privée pour la construction de l’amphithéâtre qui se chiffre à 400 millions $. Tout sera financé par des fonds publics, soit 200 millions $ par le gouvernement du Québec et le reste par la ville de Québec. Ce sera le seul aréna de hockey professionnel qui ne sera pas construit par des promoteurs privés.

Dès les premiers jours de l’annonce de ce projet, je me suis opposé au principe d’un financement public pour un tel projet. J’estime qu’il pourrait devenir un « éléphant blanc ». La ville de Québec n’a pas le bassin de population ni le nombre d’entreprises privées importantes suffisamment riches pour financer une telle entreprise de hockey professionnel. Elle a déjà eu une équipe dans le passé « Les Nordiques de Québec », mais elle l’a perdue, faute de fonds.

Aujourd’hui, alors que le coût d’un billet à chaque match approche les 200 $ et que celui de la finale de la coupe Stanley, qui débute cette semaine, coûte en moyenne 1,900 $, on peut imaginer que Québec, une ville de fonctionnaires, aura de la difficulté à remplir les gradins pour chaque joute. Par conséquent, pourra-t-elle rencontrer les deux bouts d’une telle opération financière ? Si Khadir réussi à arrêter le projet, comme le prédit le maire si la loi n’est pas votée, il rendra peut être un bon service aux payeurs de taxes de la capitale. Sur-le-champ, la majorité lui reprochera son geste, mais un jour, elle reconnaîtra qu’il lui aura rendu un fier service en arrêtant cette folie des grandeurs du maire.

Un aspect intéressant, à ce moment-ci de la conjoncture politique au Québec, est la nouvelle stratégie du Parti Québécois (PQ) envers Québec Solidaire. Suite à l’élection de 2008, le PQ voyait dans le QS un allié séparatiste. Il applaudissait sa venue. Mais, avec le temps, la popularité de Khadir croît sans cesse. Le PQ, encore ébranlé par la récente victoire surprise du NDP et la disparition soudaine du Bloc Québécois à l’élection fédérale, voit dans le QS un danger similaire. Il craint que les électeurs insatisfaits diviseront leurs votes entre le PQ et le QS et que cela favorisera les candidats libéraux qui se faufileront entre leurs adversaires pour gagner leur comté respectif et permettre au parti libéral de se maintenir au pouvoir.

Le PQ a donc entrepris de salir Khadir et le QS, car il les voit dorénavant comme des ennemis politiques. Une campagne de dénigrement a été entreprise par le parti. C’est Pauline Marois, la chef du PQ, qui en a donné le signal de départ en traitant la position de Khadir de « niaiseuse ». Les auteurs du site indépendantiste Vigile ne cesse depuis quelques jours d’attaquer la personne de Khadir et de le banaliser. Plusieurs animateurs de radio, péquistes camouflés, le ridiculisent. Ce n’est pas beau et ce n’est que le début.

Nous avons 125 députés à Québec et le seul qui fait les manchettes sur des sujets importants, mais avouons-le souventes fois forts discutables, c’est Amir Khadir. Même si on ne partage pas ses opinions, ses politiques et ses prises de position, il faut reconnaitre que c’est avec intelligence, conviction et efficacité qu’il avance ses idées d’opposition. J’aimerais bien qu’il se trouve d’autres députés comme lui sur les bancs de l’autre côté de la chambre. La politique deviendrait beaucoup plus intéressante et les débats plus vrais et nombreux.

Du choc des idées jaillit la lumière !

Claude Dupras

vendredi 27 mai 2011

Les Juifs, les Arabes et Harper

Depuis la venue de Stephen Harper à la tête du Parti Conservateur du Canada (PC), petit à petit je me suis éloigné, pour des raisons de politiques, de ce parti où j’ai œuvré durant plusieurs décennies du temps où il se nommait le Parti Progressiste-Conservateur (PPC). L’une de ces politiques est la position du PC sur le conflit israélo-palestinien.

Suite à la dernière élection, j’ai cru que le PC chercherait à se recentrer en dépassant sa stratégie électorale qui est de positionner ses politiques en fonction du vote des groupes ethniques. Certains signes récents démontrent qu’il n’en est rien. Fier de sa majorité hors Québec, le PC semble vouloir foncer droit devant lui et ne rien changer à sa stratégie.

La politique canadienne (je devrais dire Harperienne) en rapport avec les juifs et les arabes est difficile à comprendre et le PM vient de l’indiquer à nouveau au G8 de Deauville en France. L’ensemble des chefs d’État, sous l’impulsion du président français Sarkozy, visent à établir un considérable plan d’aide économique pour les pays du printemps arabe. Après avoir, durant de longues décennies, largement financé et armé les régimes dictatoriaux de ces pays, les pays du G8 se tournent enfin vers les peuples arabes qui ont subi et chassé les despotes qui les dirigeaient. Ils veulent les aider à se donner les instruments démocratiques pour se diriger et les moyens financiers pour assurer leur développement économique.

Il me semble que c’est une position stratégique importante. Le potentiel du printemps arabe est si grand qu’il peut changer la face du monde, dans le bon sens, en rétablissant dans cette grande région orientale de la planète une qualité de vie qui permettra à ses peuples, dans un premier temps les Tunisiens et les Égyptiens, de reprendre leur place sur l’échiquier mondial. L’Occident ne peut manquer cette chance unique qu’offre le monde arabe.

Mais voilà, tous les pays sont d’accord, sauf le Canada. Pourquoi ? Le ministre tunisien des finances, bien diplomatiquement, blâme « le peu de liens forts avec le Canada ». Est-ce seulement çà ?

De son côté, le président américain Obama a reçu des éloges de la part des leaders mondiaux qui ont trouvé courageux son récent discours durant lequel il a préconisé que les négociations de paix entre Israël et les Palestiniens reprennent avec comme base de discussion de départ, les frontières d’avant la guerre de six-jours de 1967. Israël avait alors conquis l’est de Jérusalem, la Cisjordanie et la bande de Gaza. Ces frontières pourraient être modifiées par des échanges de territoires. Harper s’est montré en désaccord avec cette proposition.

Harper se prononçait peu sur le printemps arabe, au moment où le PM Israélien Benjamin Netanyahou exprimait ses craintes d’instabilité future, dans la région du Moyen-Orient, devant la montée des révolutionnaires égyptiens et autres. Ce n’est qu’à la toute fin de Moubarak qu’Harper les a appuyés.

De plus, il reconnaît encore le droit à Israël de continuer à construire de nouvelles colonies sur le territoire arabe occupé, alors qu’aujourd’hui Netanyahou argumente que la nouvelle démographie rend impensable de remettre Jérusalem-est aux Palestiniens. Après avoir refusé de se soumettre à toutes les résolutions de l’ONU demandant au gouvernement israélien d’arrêter les constructions, il plaide le fait accompli.

Netanyahou est actuellement engagé dans une campagne internationale pour contrer l'ONU qui veut reconnaître officiellement l’État de la Palestine. Le vote aura lieu bientôt et le Canada votera contre. Il sera un des rares pays à le faire. Harper est aussi opposé à l’union des deux partis politiques palestiniens, le Hamas et le Fatah, qui est comme un pré-requis pour la reconnaissance de leur État.

Et cela malgré les voix qui viennent de partout pour appuyer cette reconnaissance, comme celles de vingt personnalités israéliennes, dont plusieurs hauts anciens responsables. Ils affirment, dans une pétition : "Une proclamation de l'indépendance palestinienne n'est pas seulement un acte légitime, elle constitue un acte positif et constructif pour les deux nations", israélienne et palestinienne, … "l'incapacité de la communauté internationale et en premier lieu des États Unis à relancer des négociations de paix, reflète une vérité déconcertante: la paix a été prise en otage du processus de paix". L'appel est signé notamment par l'ancien procureur général de l'Etat Michael Ben Yair, l'ancien directeur du ministère des Affaires étrangères Alon Liel, l'ancien président du parlement Avraham Burg et par le prix Nobel en économie Daniel Kahneman.

Alors que le Canada a toujours eu une approche neutre, indépendante et sans parti pris dans le conflit israélo-palestinien, nous nous retrouvons aujourd’hui avec un premier ministre qui agit systématiquement en faveur d’une partie, en notre nom, sans avoir eu un mandat spécifique de notre part. Tout comme le fait la droite américaine. Netanyahou, reconnaissant, a affirmé publiquement que le PM Harper est le meilleur ami d’Israël parmi tous les chefs d’État.

Une telle politique m’attriste car elle ne rend justice à personne. Elle n’avance pas les choses. Elle nuit à la réputation du Canada comme le démontre le vote contre sa candidature au conseil de sécurité des Nations-Unies. C’est navrant et cela nous amène à nous demander si notre pays entretient une politique raciste lorsqu’il traite des arabes et des juifs ? Je ne peux le croire, mais en tout cas il semble en donner des preuves.

Claude Dupras

lundi 23 mai 2011

Les francophones et les femmes sont absents du pouvoir au Canada

Le nouveau cabinet de ministres du premier ministre canadien Stephen Harper vient tout juste d’être assermenté par le Gouverneur Général du Canada. Il inclut quatre ministres du Québec (dont deux sont des ministres juniors qui dépendent d’un autre ministre) sur un total de 39 ministres. Ce n’est pas fort. On ne peut, cependant, blâmer le PM puisque que les Québécoises et les Québécois n’ont élu que cinq députés du Parti Conservateur du Canada (PC), dans les 75 comtés du Québec, lors de la récente élection fédérale.

Dans notre système parlementaire britannique, le premier ministre est tout-puissant et ceux de son entourage immédiat, « l’inner-circle », sont ceux qui ont le plus d’influence sur lui. Ils sont, par conséquent, les vrais moteurs de la gouverne du Canada. Aujourd’hui, comme le rapporte le journal torontois Le Star, seuls douze hommes composent ce vrai pouvoir à Ottawa, dont seulement six élus. Il n’y a aucune femme. Tous les autres ne sont que des porteurs d’eau.

Ce groupe dirigé par le PM comprend son chef de cabinet (le compétent Nigel Wright), le premier assistant de ce dernier (l’Ontarien Derek Vanstone), le ministre des finances (le respecté Jim Flaherty), son secrétaire principal (le réformiste Ray Novak), son responsable des politiques (le réformiste Paul Wilson), son directeur des communications (le Québécois Dimitri Soudas), le ministre du trésor (l’allianciste réformiste Tony Clement), le ministre de l’immigration (l’Albertain Jason Kennedy), le ministre des affaires extérieures (l’Ontarien John Baird), le ministre de la défense (Peter Mackay de la Nouvelle-Écosse) et le ministre de la justice (l’Ontarien Rob Nicholson).

Le maillon faible est Soudas, un québécois d’origine grec qui ne comprend rien à la sensibilité politique québécoise et qui s’est montré, durant les dernières années, d’une arrogance surprenante, déplaisante et improductive envers nous. Le PC ne va nulle part au Québec avec lui, comme vient de le démontrer clairement le résultat de la récente élection générale. Il est dans l’intérêt du PC et du Québec qu’il soit muté.

Quant aux autres membres du groupe des 12, ils sont forts compétents et aideront le PM a bien diriger le pays. Le malheur est qu’ils démontrent de la difficulté à comprendre l’approche politique des Québécois et, je dirais même, celle des francophones des autres provinces. On l’a vu, dans le passé, sur les questions du registre des armes à feu, de la défense de l’environnement, des propositions de « loi et ordre », du pro-militarisme excessif, du « copier-coller » de politiques de la droite de la droite de GWBush, de l’appui unilatéral à Israël dans le conflit israélo-palestinien, du manque de progressisme dans ses propositions, de la concurrence déloyale envers l’Hydro-Québec, etc.

Par contre, les Québécois d’âge moyen appuient les politiques conservatrices d’accroissement d’échanges commerciaux via de nouveaux accords de libre-échange avec l’Europe et d’autres pays, les bons rapports avec le président américain, la concentration des efforts du gouvernement sur l’économie, la prudence fiscale, les efforts pour réduire la taille du gouvernement, les déficits, la dette, etc.

Les Québécois ont été dupés par le Bloc Québécois qui a constamment cherché à « démoniser » Harper. Au lieu de débattre avec des arguments apolitiques, le Bloc a réussi, sur chaque sujet, à les rattacher à de supposés desseins morbides du PM canadien contre le Québec. Ces attaques de tous les instants ont porté fruit au point que les Québécois ont voté « tous, sauf Harper ». Mais, comme il y a de la justice dans tout, le Bloc a été surpris et éliminé. N’eut été de cette approche constamment négative, Harper aurait probablement fait élire plusieurs autres députés au Québec et aujourd’hui nous serions mieux représentés dans le parti au pouvoir à Ottawa.

Je me suis opposé souventes fois, dans mon blog, aux politiques de Harper mais sans attaquer sa personne et sans lui attribuer des motifs insensés ni malhonnêtes.

Contrairement au passé, où l’électorat était préoccupé par de grands enjeux politiques comme la construction du pipeline canadien, le plan national d’énergie, le bilinguisme et le biculturalisme, le respect des droits (fiscaux et autres) des provinces, le rapatriement de la constitution, l’accord constitutionnel du Lac Meech, etc., il réagit maintenant aux politiques qui le touchent directement sur la base de leurs valeurs respectives, comme ceux mentionnés précédemment. Cela a permis, pour une première fois, l’élection d’un parti majoritaire à Ottawa sans le Québec.

Le PM Harper a une grande tâche devant lui s’il veut atteindre l’unité nationale requise pour un grand pays comme le Canada. Il ne peut oublier que seulement 39,6% des électeurs ont voté pour lui et son parti, qu’il doit d’être le PM de tous les Canadiens et, pour se faire, doit reconnaître que ses positions politiques actuelles sont ancrées trop droite pour un grand nombre de ses compatriotes.

Si le PM Harper veut vraiment réussir à convaincre une grande majorité de ses compatriotes, entre autres les Québécois, de l’appuyer, le PM doit se repositionner vers le centre du spectre politique. Pour se faire, il serait utile qu’il ait dans son groupe des 12, de fortes personnalités québécoises et des femmes capables de faire la part des choses pour l’amener à bien servir tous les Canadiens.

Claude Dupras

mercredi 18 mai 2011

La prison de DSK

On peut affirmer que le président du FMI a reçu le « full treatment » de la part de la justice américaine. Pour une fois dans sa vie, Dominique Strauss-Khan est traité comme monsieur et madame-tout-le-monde et cela fait sursauter un grand nombre de Françaises et Français. Même si je n’oublie pas la présumée victime de cette agression sexuelle, j’ai été surpris et trouvé insoutenable certaines photos de DSK se rendant à la cour et devant la juge.

Je comprends que tous les suspects de crime ne sont pas identiques et peuvent être : membres de la pègre, revendeurs de drogues, voleurs de grand chemin, tueurs à gage, bandits financiers, scélérats, violeurs et encore. Je suis d’accord qu’ils soient tous traités de façon égale, de leur arrestation à leur jugement.

Aux USA, le système de justice est accusatoire, l’accusé doit se défendre mais il n’est pas coupable tant qu’un juge ne l’aura pas condamné. Au Canada comme en France, même si nous sommes sous arrestation, notre système nous présume innocents. C’est à la justice de faire la preuve des accusations qu’elle porte, devant les jurés et les juges. Ainsi, nous sommes assurés d’être traités avec justice.

Lorsque la police américaine présente l’accusé à un juge, elle prépare normalement de bons dossiers. Mais il demeure, qu’à ce moment-là, l’inculpé innocent doit prouver qu’il l’est. Le passé nous a démontré, souventes fois, que plusieurs accusés sont libérés par le juge de première instance. Donc, innocents ! Pourtant, ces inculpés ont dû encaisser le même genre d’humiliations publiques et de difficultés personnelles que DSK vient de subir en se rendant devant la juge newyorkaise, où les représentants des medias étaient partout, et de vivre comme un prisonnier depuis plusieurs jours dans sa cellule inconfortable et morbide de la prison reconnue comme l’Alcatraz de NY.

Il ne s’agit pas pour moi de défendre ici DSK. S’il est coupable, j’espère qu’il subira une peine à la hauteur de son agression envers une jeune femme sans défense. Mais j’exprime mon désaccord sur la façon avec laquelle les accusés sont traités à New York. Tout est fait en fonction des médias sans tenir compte des conséquences physiques ou psychologiques sur l’individu détenu.

Le scénario de la cause de justice DSK serait rendu au même point qu’il l’est aujourd’hui si la police et la justice avaient agi discrètement en respectant la personne humaine. Nous n’aurions pas vu les images déplorables de DSK, qui ont fait le tour de la planète, et il serait aujourd’hui en maison de détention et non incarcéré comme un vulgaire brigand. C’est une garde à vue moins sévère. Il devrait en être de même pour tous les autres prévenus de l’état de NY.

Être accusé et pris dans les rouages de la justice américaine est déjà un châtiment important pour tout individu qui se respecte et un lourd fardeau à porter pour longtemps, qu’il soit ou non innocent.

Si DSK est reconnu coupable, le temps sera venu de l’incarcérer comme il se doit.

Claude Dupras

dimanche 15 mai 2011

Avec l’affaire DSK, Sarkozy sera réélu

Je ne sais pas si Dominique Strauss-Kahn (DSK) est coupable, mais les évènements qui se sont déroulés samedi dans cette chambre d’hôtel de New York viennent de bousculer cul-sur-tête la politique française. Après avoir fait un si bon travail au FMI, DSK s’enlignait de toute évidence sur la présidence française à laquelle il aspire depuis toujours.

Déjà depuis quelques semaines, une campagne négative avait été entreprise contre lui pour le dénigrer aux yeux des Françaises et des Français. Il y a eu l’évènement d’une Porsche Panamera de plus de 100,000 $ qu’il a utilisée avec son épouse la belle ex-journaliste Anne Sinclair. Ce supposé scandale était suivi d’un autre soit celui de la confection de trois de ses costumes à des prix de 7 000 $ à 35 000 $ par un tailleur français de NY. Cela ajouta à la rumeur que DSK a un train de vie digne des plus riches et que plusieurs membres du PS s’inquiétent de l’image de riche qu’il projette. Ce sont les mêmes qui reprochent au président Sarkozy d’être en symbiose avec l’argent, de protéger ses amis riches et d’avoir un style de vie « bling bling ». Voilà que leur candidat favori, DSK, va encore plus beaucoup plus loin avec son mode de vie quotidienne. Plusieurs pensent qu’un vrai socialiste est normalement le défenseur des petits, et qu’un DSK vivant la grosse vie est loin de donner l’image d’être près des préoccupations quotidiennes des travailleurs qui bossent jour après jour et difficilement pour rencontrer les deux bouts et nourrir leur famille.

L’incident de NY a mis en évidence, de plus, le fait qu’il logeait depuis vendredi, seul, dans le cinq étoiles Sofitel de NY, dans une suite à 3 000$ la nuitée et qu’il a été arrêté alors qu’il était assis en première classe du vol d’Air France.

Ces insinuations envers DSK sont tristes et ne devraient pas faire partie du débat politique. La France a suffisamment de problèmes pour prendre la meilleure personne possible pour la diriger durant les quatre prochaines années. Et DSK semble être cet individu. Mais c’est fini… car la politique est un commerce d’images et d’illusions.

Même si DSK est blanchi des accusations de la police newyorkaise qui planent sur lui, il en restera quelque chose dans l’arrière-pensée des électeurs français. À moins que ce soit un coup monté. À ce moment-là, DSK deviendra la victime et tout basculera en sa faveur. Mais cette probabilité est mince.

La prochaine élection présidentielle s'annonce très serrée, ce qui signifie que chaque vote va compter. J’ai l’impression que DSK vient de perdre les milliers de votes qui auraient fait la différence. J’ai des amis français de droite qui étaient prêts à voter pour lui. Mais aujourd’hui… si DSK revient de tous ses problèmes, ils le sont beaucoup moins.

C’est Sarkozy qui doit jubiler. DSK parti et Ségolène Royal knout-out, c’est soit Martine Aubry (la femme des 35 heures) soit François Hollande (l’ex-premier secrétaire PS qui a vu son parti éliminé au deuxième tour lors de la dernière élection présidentielle) qui sera son adversaire socialiste à sa gauche et Marine Lepen du FN à sa droite. Deux des trois seront au deuxième tour.

Sarkozy y sera, malgré sa descente aux enfers des sondages. Il reprend du poil de la bête et le dernier sondage lui donne une embellie de cinq points pour l’amener à 32%, et ce n’est pas fini… C’est un politicien hors de l’ordinaire et un campaigner extraordinaire. Il l’a clairement prouvé lors de la dernière élection. Même s’il arrive deuxième au premier tour, il gagnera les votes du candidat (e) éliminé (e). Si c’est le (la) socialiste, la gauche ira à Sarkozy avant d’aller au Front National. Si Marine Lepen est éliminée, la droite de la droite ira à Sarkozy qui est à droite avant d’aller à gauche. Il ne peut pas perdre.

Claude Dupras

mardi 10 mai 2011

Je suis un ti-coune, un suiveux, un stupide, un abruti …

Le vote massif des Québécois et Québécoises a éliminé le Bloc Québécois et donné 58 comtés sur 75 au NDP. Depuis, c’est la débandade chez les observateurs, journalistes et blogueurs séparatistes. Au lieu de suivre l’exemple de leur chef, Gilles Duceppe, qui a accepté le vote en le qualifiant de démocrate, plusieurs de ces derniers s’en prennent méchamment et violemment à leurs compatriotes qui ne les ont pas suivis et ils les traitent de tous les noms.

Voici ce que dit Normand Lester, journaliste politique, à la radio et dans sa chronique d’hier du journal Le Devoir : « les Québécois sont : « des suiveux », « des moutons complexés », « de petits rongeurs nordiques », « des stupides et solidaires », « des électeurs qui ne comprennent rien à la politique », des « ti-counes », « des imbéciles qui ont voté aveuglément pour des politiciens dont bon nombre sont soupçonnés d’être des menteurs et des corrompus ». Cela, dit-il démontre « les limites de la démocratie » et la « médiocrité collective » des Québécois. Et encore…

Lester est un bon journaliste qui a une expérience internationale. Ses commentaires sur ce qui se passe dans le monde sont intéressants et semblent toujours précis et réalistes, mais lorsqu’il écrit sur le Canada et le Québec, son jupon séparatiste dépasse et il perd toute son objectivité. C’est triste de le voir volontairement réduire son renom au niveau de la partisannerie politique.

Lester ne veut pas comprendre que le vote des Québécois fut pour le changement et par conséquent contre l’establishment des partis traditionnels. Personnellement, mon vote a été, pour une première fois, à gauche pour le NDP et j’en ai donné les raisons sur mon blog. Plusieurs de mes amis ingénieurs, médecins, avocats, dentistes, entrepreneurs, ouvriers et même agriculteurs ont posé un geste similaire. Même, quelques uns de mes amis séparatistes m’ont écrit pour me dire qu’ils en avaient soupé du Bloc Québécois et voteraient pour Jack Layton. Et ils n’étaient pas seuls puisque le peu de votes qu’à reçus le Bloc démontre qu’une partie importante des « purs et durs » indépendantistes a voté de la même façon. Les Québécois ont vu, en Layton, la solution qu’ils recherchaient pour mettre de l’ordre dans la politique canadienne.

Lester est clairement de mauvaise fois en affirmant : « des milliers de Québécois se sont ainsi précipités pour voter en faveur de « poteaux » néo-démocrates dont ils ne savaient absolument rien sauf qu’ils étaient des candidats de « Jack ». Et vous M. Lester que saviez-vous des candidats conservateur, libéral, NDP et autres de votre comté ? Je gagerais que vous ne les connaissiez même pas. En réalité, vous avez décidé de votre vote du 2 mai dernier, il y a plusieurs années lorsque vous êtes devenu séparatiste. Et même si le candidat du Bloc avait été un « poteau », vous auriez quand même voté pour lui et cela, nonobstant la qualité des autres candidats de votre comté.

Remarquez, M. Lester, que vous n’êtes par le seul a ne pas connaître les candidats de votre comté car c’est ainsi pour la très grande majorité des électeurs. Durant la période électorale, nous apercevons, tout à coup, leurs photos sur les pancartes publicitaires et quelques uns livrent, à chaque maison, un court pamphlet sur leur candidature. On vote, sans les avoir rencontrés, sans vraiment les connaître.

Aux USA, les représentants et les sénateurs du Congrès, ont des budgets importants et du personnel qualifié en grand nombre. Même s’ils sont démocrates ou républicains, ils ne suivent pas nécessairement la ligne du parti comme on peut le constater à chacun des votes. Ils sont libres et jusqu’à un certain point indépendants de leur parti malgré qu’ils aient été choisis par les membres enregistrés de leur parti dans leur État.

C’est différent au Canada et au Québec et ailleurs où le système parlementaire britannique est implanté. Là, c’est la ligne du parti qui compte. Le PM est le chef de parti qui fait élire le plus grand nombre de députés. Le PM n’est pas élu au suffrage universel par tous les habitants du pays ou de la province. Voilà pourquoi, en général, nous ne votons pas pour le candidat mais pour le parti. On vote libéral, conservateur, NDP ou bloquiste. Pas nécessairement pour le meilleur candidat mais pour celui qui appuie le chef que nous voulons. En réalité, les candidats sont tous des poteaux. Certains, meilleurs ou plus connus que d’autres. Mais tous savent que leur élection ou réélection ne dépend pas d’eux mais de la faveur que trouvera leur chef ou leur parti auprès de l’électorat. C’est le résultat de la récente élection. Les vagues qui ont porté au pouvoir les Diefenbaker, Trudeau, Mulroney et maintenant Layton le démontrent bien.

Ce qui est exceptionnel, c’est que Jack Layton ait réussi à convaincre le plus grand nombre de se retourner vers lui. Quel est la clef de sa réussite ? Elle n’est sûrement pas parce que les Québécois sont des « ti-counes », des « suiveux », des « stupides » comme le prétend Norman Lester, mais parce qu’ils sont sensibles, intelligents, prévoyants et qu’ils ont du flair ! Depuis toujours, ils ont fait la preuve de leur bon sens politique et ils continuent à le faire.

Norman Lester n’est pas le seul a déblatérer sur les Québécois, Il y a plusieurs blogueurs et contributeurs au site séparatiste Vigile qui y vont gaiement aussi. Là encore, hier, je pouvais lire, sur une des pages d’accueil, que le vote des Québécois était « ethnique » et que ceux-ci n’étaient que : « des ignorants », « des sans colonne », « des abrutis », « des objets de rigolade », « un peuple de consanguins », « une race d’abâtardis », « des pleutres » etc.. Et ils ajoutent que nous avons décidé de nous « suicider collectivement », de nous « tuer élégamment » ; de « détruire ce qui nous représente », de nous être « mis à genoux devant la nation qui nous domine », d’avoir donné notre loyauté à « un parti dont le centre est situé à Toronto », d’être des « ti-counes en attente de disparition », et encore et encore. Où est la censure de Vigile qu’il applique pour les textes antisémites ? Et ceux qui nous insultent ?

Pour moi, c’est simple. Ces salisseurs de Québécois et de Québécoises ne sont que des mauvais perdants malappris !

Claude Dupras

samedi 7 mai 2011

Ben Laden : un assassinat ?

Les Américains ont réussi après de longues années à trouver, au Pakistan, le repaire de Ben Laden, le chef incontesté d’Al-Qaeda, et, après plusieurs semaines de préparation, l’ont envahi.

Durant ce raid, Oussama Ben Laden est mort et son corps emporté par les Navy Seals, le corps d’élite de l’armée américaine. Il a été clairement identifié et enseveli en mer.

J’appris la nouvelle de la bouche du président Obama lors de sa conférence de presse sur le sujet. Ben Laden avait été tué et non capturé. Obama précisa que l’ennemi no 1 des USA était armé et avait résisté. Donc, les troupes étaient en position de légitime défense. Je compris que Ben Laden n’avait pas été assassiné.

Par contre, un point m’inquiéta. Je ne comprenais pas comment un pays pouvait intervenir illégalement de cette façon dans un autre pays souverain sans la permission de ce dernier.

Puis, surprise ! La version américaine changea, plus d’une fois. Il devint de plus en plus clair que Ben Laden aurait pu être capturé et amené devant une cour internationale pour jugement. Nonobstant cela, plusieurs affirment que son « meurtre délibéré » était légitimé par la vie meurtrière de Ben Laden. Pourtant, Saddam Hussein avait été trouvé dans son trou, amené en cour, jugé et exécuté. Il est vrai qu’il était un chef d’État et qu’il n’avait pas touché le cœur des USA comme Ben Laden l’a fait.

Depuis, une pléiade d’opinions s’expriment sur internet sur ce moment important. Les Américains en général sont très heureux, soulagés et plusieurs même euphoriques par l’ « exécution » de Ben Laden, mais les Européens expriment un certain malaise.

Le président Obama a été unanimement loué et applaudi par tous les partis politiques américains. On lui accorde beaucoup de crédit pour cette opération militaire héliportée bien dirigée. Par contre, d’autres, et ils sont nombreux, comme le cinéaste Michael Moore et grand supporteur d’Obama, critiquent cette action « barbare » qui est, selon eux, hors des principes de justice de toute démocratie qui se respecte. Ils affirment que ce fut une exécution de sang-froid prévue d’avance.

On compare cette décision brutale au procès de Nuremberg qui suivit la deuxième guerre mondiale, où les principaux dirigeants du régime nazi, dont le numéro 2 Herman Goering, ont été amenés devant un tribunal de juges internationaux pour être jugés. Ce procès a eu lieu après que les Alliés aient envahi l’Allemagne jusqu’à Berlin et que l’armée allemande ait rendu les armes. La fin de la guerre avait alors été signée par les deux parties.

La guerre contre le terrorisme, déclenchée par GWBush après les impensables attentats meurtriers du 11 septembre 2001 à New York, est toujours active. Elle s’est étendue, entre autres, en Afghanistan où combattent toujours plus de 100 000 soldats américains, sans compter ceux de tous les autres des pays de l’OTAN, dont le Canada. Ce pays a été le berceau des Talibans qui ont protégé Ben Laden et ont entraîné les recrues d’Al-Qaeda en vue de leurs mauvais coups en Occident et ailleurs. Donc, c’est en temps de guerre que les USA ont tué Ben Laden. La guerre n’autorise-t-elle pas les meurtres ?

Temps de paix pour Nuremberg, temps de guerre pour Ben Laden. Est-ce une différence suffisante pour justifier la décision d’Obama ?

Il faut se rappeler que les Alliés ont toujours cherché à tuer Hitler durant la deuxième guerre mondiale. Ce fou furieux avait entraîné son peuple, pourtant d’une intelligence supérieure, dans un conflit qui finalement a fait plus de 50 millions de morts en six ans.

Nous respectons notre système de justice et nous voulons le protéger puisque tout accusé peut se défendre pour faire valoir son innocence. Il ne nous vient pas à l’idée d’encourager la police à tuer les suspects de crimes majeurs.

Qu’auriez-vous fait à la place d’Obama, alors que les USA recherchaient vivement Ben Laden depuis le 11/9 et l’avaient finalement déniché. Le ramener vivant aurait donné quoi, puisqu’il est clair que Ben Laden n’avait même pas une mince chance d’être gracié par une cour de justice américaine ou internationale. Depuis vingt ans, ce dernier revendiquait la paternité de grands actes de terrorismes contre les USA et l’Occident, partout dans le monde, et a créé un réseau de jeunes tueurs prêts à sacrifier leur vie pour aider sa cause. Il a été impitoyable et des milliers d’individus ont perdu leur vie, suite à ses consignes, et cela continue. On peut se demander si sa mort alimentera un nouveau cycle de vengeance chez ces fous de Dieu ? Par contre, un Ben Laden en prison, aurait généré combien de prises d’otages pour le faire libérer ?

J’espère que le président Obama divulguera un jour tous les faits précis de la mort de Ben Laden. Nous avons le droit de connaître la vérité pour être à même de bien juger de cette situation qui embarrasse nos démocraties en rapport avec les droits de l’homme.

Il semble qu’Obama ait suivi le dicton « À la guerre, comme à la guerre ». Je ne peux, actuellement, le blâmer d’avoir fait éliminé ce chef terroriste assassin ? Il ne faut pas avoir la mémoire courte. Qu’en pensez-vous ?

Claude Dupras

mardi 3 mai 2011

The conservatives are coming !

L’élection générale canadienne a produit un résultat exceptionnel : un gouvernement conservateur majoritaire; une opposition néo-Démocrate; un Parti Libéral décimé, un Bloc Québécois éliminé et un Parti Vert enfin représenté au parlement.

Le Parti Conservateur du Canada (PC) a réussi l’impossible. Il a gagné une majorité de députés à la Chambre des Communes sans le Québec où il a vu cinq de ses onze députés sortant-de-charge perdre leurs sièges. Trois de ses principaux ministres québécois, dont Lawrence Cannon, vice-premier ministre et ministre des Affaires Extérieures du Canada, ont été défaits Pour une première fois, un parti fédéral a gagné une majorité au Parlement, sans le Québec. C’est tout un tour de force qu’ont réalisé Stephen Harper et ses stratèges politiques. Le PC devait gagner 67% des sièges hors Québec pour atteindre une majorité parlementaire. Réussir cet objectif dans un pays aussi vaste que le Canada, avec une population aussi diversifiée et un paysage politique aussi différent d’une région à l’autre, constitue un tour de force politique hors de l’ordinaire. Finalement, le PC a recueilli 165 sièges, soit dix de plus que la majorité. Même sans ses six élus du Québec, le PC a maintenant 159 députés, soit quatre au dessus de la barre de la majorité. Il peut donc gouverner sans le Québec.

Le Parti Néo-Démocrate (NDP) a aussi connu une soirée électorale unique. La vague de support au parti, prévue par les sondeurs politiques, s’est transformée en un véritable tsunami politique au Québec. Ce parti qui n’avait jamais eu plus d’un député québécois, se retrouve aujourd’hui avec 56 députés sur un total possible de 75. Son chef, Jack Layton, a fait une campagne électorale exceptionnelle. Avec un budget très limité, il a réussi l’impossible. Il a su toucher la corde sensible des Québécois et leur montrer que leur avenir politique se retrouve dans un parti national, un parti fédéraliste. L’handicap, c’est qu’ils se retrouvent dans l’opposition officielle. Donc, loin du pouvoir et de la possibilité de générer les grandes décisions, puisque le parti au pouvoir est majoritaire. Mais cela n’est pas la fin du monde.

La majorité des Québécois ne pouvait faire autrement puisqu’elle n’acceptait pas les politiques et les orientations extrêmes du PC. Le vote stratégique des Québécois a été de renforcer l’opposition sociale-démocrate pour freiner la dérive vers la droite où veut l’entraîner le PC. Ils ont eu raison et avec le NDP, ils réussiront peut être non pas à faire fléchir les politiques du PC, dans un avenir rapproché, mais, petit à petit, à ramener l’opinion publique canadienne vers le centre du spectre politique. Ce qui compte, c’est le temps. C’est l’avenir.

Le gouvernement PC sera au pouvoir un peu plus de quatre ans. C’est vite fait et c’est une période courte dans la vie d’un peuple. Durant ce temps, ceux qui ne sont pas de la droite de la droite, pourront ramener le bons sens dans le débat politique canadien. Je ne suis pas de la gauche, mais du centre-droit, et je me sens confortable de m’associer avec les gens de gauche du NDP pour atteindre cet objectif. Je crois que cette position est essentielle pour corriger le tir du PC qui fait trop american republican party.

Le Bloc Québécois (BQ) nous a cassé les oreilles avec ses lamentations et ses exagérations depuis trop longtemps. Ses grands discours, ses accusations à tout vent, ses gémissements et ses cris contre tout ce qui était de nature fédérale, n’ont mené à rien pour le Québec. Enfin, mes compatriotes ont vu clair et ont conclu : « assez, c’est assez ». De 43 députés, le BQ se retrouve à quatre députés. Ce qui est plus grave pour lui, c’est qu’il n’est plus reconnu comme un parti politique canadien (minimum de 12 députés) et qu’il perd les subventions annuelles de plus de 3 millions de $ (86% des revenus totaux du BQ) que lui accordait le gouvernement canadien. Il était temps que cesse cette absurdité.

Le malheur de cette déconfiture du Bloc est le sort réservé à son chef Gilles Duceppe. Ce dernier est un vrai patriote qui a mis son intelligence et sa santé au service de notre nation québécoise. Il l’a fait en gentleman et il mérite toute notre affection et notre reconnaissance. Même si je n’ai jamais été en accord avec ses objectifs, j’ai toujours gardé une admiration réelle envers Gilles Duceppe. J’aurais bien aimé, qu’avant cette élection, il passe le flambeau du leadership à un autre et mette fin à sa carrière politique fédérale. Il en serait alors sorti avec tous les honneurs. Malheureusement, aujourd’hui, il a dû démissionner devant l’amère et écrasante défaite de ses troupes et en sort humilié. Il ne méritait pas cela.

Le parti libéral du Canada (PLC) a subi une défaite démoralisante. Il s’est effondré. Depuis le scandale des commandites, qui continue à le hanter, le PLC souffre. Son chef Mikael Ignatieff a fait une bonne campagne, mais il a démontré qu’il n’est pas un politicien. Et, le succès politique appartient aux politiciens. C’est malheureux, mais c’est comme çà. Le PLC sort de l’élection avec le plus bas score depuis toujours, 34 députés au Canada dont seulement six au Québec. Alors qu’encore récemment, ce parti était reconnu comme le parti de la gouvernance au pays, le voilà relégué aux limbes politiques canadiennes. Il souffre toujours du scandale politique qui a marqué le gouvernement Chrétien et son étiquette « parti libéral », au Québec surtout, l’afflige. Seul le temps l’aidera. Ignatieff a démissionné aussitôt de son poste et le PLC repart à la recherche d’un nouveau chef.

Je demeure convaincu que le PLC a jugé trop vite son ancien chef Stéphane Dion qu’il a blâmé du piètre résultat lors de la dernière élection. Le résultat de celle d’hier est encore pire que celui de Dion qui avait fait élire 77 députés. Je garde un grand respect pour ce dernier, car j’ai la conviction que le Canada a perdu, en sa personne, un leader intelligent, dédié, sincère et grand.

Le Parti Vert (PV) a enfin fait élire son chef à la Chambre des Communes. Mme Élizabeth May a obtenu la confiance des électeurs du comté Saanich-Gulf Islands de l’ouest canadien, près de Victoria. Ils lui ont donné une très belle majorité. J’en suis très heureux. Mme May est une personne renseignée, charismatique, émotive, éloquente, persuasive et dédiée à la cause de l’environnement. Au parlement, elle sera une porte-parole extraordinaire devant le PM Harper pour discuter des effets désastreux de l’exploitation des sables bitumineux de l’Alberta. Le PM a démontré dans le passé qu’il est insensible aux revendications des écologistes. Enfin, il y aura au parlement, une personne capable et crédible pour lui faire face.

Les Canadiens viennent de vivre une élection extraordinaire à laquelle on référera souvent dans l’avenir. L’histoire du Canada raconte que les Québécois ont toujours été les vrais leaders de la politique nationale et, encore un fois, j’ai l’impression qu’ils agissent ainsi. L’intérêt supérieur de notre pays n’est pas de se tourner vers la droite de la droite, là où veut-nous entraîner notre PM Harper. Malheureusement aujourd’hui, nos compatriotes canadiens des autres provinces, ont été amené à pencher de ce côté. L’unité que les Québécois viennent de manifester en concentrant leur vote sur le NDP, un parti fédéraliste, démontre qu’ils veulent combattre sur le même niveau que les Conservateurs. Il est vrai que nous sommes généralement très sociaux-démocrates et que le NDP répond à beaucoup de nos valeurs. Mais il y a plus dans notre geste.

Nous recherchons des politiques de bon sens, des politiques qui répondent à nos aspirations et je dirais même à celles de tous les Canadiens. Ce ne sont pas les machines politiques des grands partis qui nous impressionnent. Nous venons de le démontrer en élisant au Québec, tous les candidats d’un parti dont la majorité, pensant être battue d’avance, n’a même pas fait de campagne sérieuse pour être élue. Nous avons élu des étudiants comme députés, un anglophone qui ne parle pas le français dans un comté 100% francophone, une députée qui était à Las Vegas durant la période électorale, une autre qui était en voyage en France et qui doit revenir pour accepter son mandat, etc… Ce qui comptait c’était le message.

The conservatives are coming… Il faut les aider à bien faire les choses, à notre goût.

Claude Dupras