samedi 26 juin 2010

Le parc Olympique de Montréal, un citron ?

La Presse rapporte, aujourd’hui, qu’un groupe de recherche sur les espaces festifs a présenté un rapport pour changer la nature du parc Olympique La raison : pour masquer « l’héritage des Jeux Olympiques de Montréal qui est considéré comme un échec dans le monde ». On suggère de « briser le béton pour le remplacer par des espaces verts, rendre la rue Pierre-de Coubertin commerciale et changer le nom du site pour refaire son image ».

Premièrement, une mise au point s’impose. J’ai voyagé assez souvent dans le monde pour savoir que ce n’est pas l’héritage qui est critiqué. Le monde s’en fout que ces Jeux soient bons ou non pour l’héritage des montréalais. Non, c’est le dépassement des coûts des installations olympiques qui a frappé l’imagination mondiale et qui continue à être donné comme un mauvais exemple à éviter par les nouveaux pays qui aspirent à obtenir la tenue des jeux du CIO. À voir ce qui se passe à Londres pours les installations sportives des prochains JO, où les coûts sont incommensurablement plus hauts que prévus, je crois que l’exemple de Montréal va être enfin oublié.

Ce ne fut pas une erreur de construire un stade couvert. C’était une demande sine qua non du baseball majeur pour garder la concession des Expos à Montréal. Lorsque le maire Drapeau avait obtenu la venue de l’équipe à Montréal pour la faire jouer temporairement au parc Jarry, il avait convenu avec les autorités de la ligue qu’un stade couvert serait construit éventuellement.

Fut-ce une erreur de confier à l’architecte Taillebert la réalisation du parc Olympique qui contenait le stade d’athlétisme, le vélodrome et les bassins de natation sans compter les milliers de places de parking en sous-sol ? Peut-être, parce qu’il a proposé un design complexe par rapport au peu de temps disponible pour le réaliser. Mais le résultat est un chef d’œuvre architectural unique dans le monde et qui est vanté partout. Ce complexe a coûté trop cher ? Oui. Mais il aurait coûté beaucoup moins si les syndicats d’ouvriers de la construction avaient collaboré au lieu de garder un revolver sur la tempe du COJO en créant toutes sortes de délais et en le menaçant s’il n’obtempérait pas à leurs demandes qui devenaient de plus en plus exagérées.

Quant au mat et la toile qui couvre le stade, ils ont été réalisés quelques années après les JO et là le problème est simple : le design n’était pas assez bon. Nous avons dépensé des millions de $ pour un système qui ne marche pas. C’est la faute à qui ? Taillibert ? Non, car le design a été fait par des ingénieurs canadiens. On a cherché à justifier le piètre résultat par toutes sortes d’excuses en prétextant même que c’était un projet irréalisable. Quelle sottise ! Le premier projet et le deuxième des Américains se sont avérés défectueux. Ce sont de mauvais designs qui furent à la base de tout ce qui est arrivé avec la couverture du stade. Heureusement que ce ne sont pas ces ingénieurs qui ont envoyé un homme sur la lune car il ne serait jamais revenu…

Puis, il y a l’utilisation du stade. Pendant les premières années tout était beau. Les Expos, le club de football Alouettes et le club de soccer Manic de Montréal, remplissaient le stade et on ne parlait pas de mauvais héritage… au contraire. J’avais mes billets de saison pour les Expos et il était fort intéressant de se retrouver au stade pour une partie. Les billets étaient en grande demande.

Puis la débandade a commncé. Soudainement le Manic, malgré ses nombreux supporteurs enthousiastes, a disparu. Les Alouettes ont perdu peu à peu leurs supporteurs et finalement leur franchise. La propriété des Expos a changé de mains et non pour le mieux. Les nouveaux propriétaires n’avaient pas suffisamment d’argent pour supporter une telle équipe professionnelle dans les périodes creuses. Face à des difficultés, Ils blâmèrent le stade et affirmaient que le jeu était trop éloigné des spectateurs (pourtant, il ne l’était pas lorsque le stade était rempli à craquer). Le RIO réaménagea le terrain, coupa dans les estrades et rapprocha ainsi les amateurs. Rien ne fit. Puis, comble du ridicule, on insinua que le stade était trop loin du centre-ville, pourtant on s’y rend en 20 minutes, et on proposa la construction d’un nouveau stade pour garder les Expos à Montréal. Finalement, ces derniers quittèrent notre ville et Montréal perdit du coup toute la publicité que notre participation à cette grande ligue de baseball professionnelle américaine apportait à notre ville.

Ce n’est pas à cause du stade que l’on a perdu ces équipes, c’est le résultat de promoteurs inadéquats et insuffisamment riches.

Plus tard, la concession des Alouettes revint à Montréal et au lieu de réintégrer le stade, le nouveau propriétaire qui avait peu de sous, logea l’équipe au vieux stade Molson sur les flancs du Mont-Royal, près du centre-ville. Dès la première saison, j’avais mes billets de saison. Le stade était inconfortable, sans parkings, sans services sanitaires suffisants et adéquats, avec une restauration minimale, etc… rien à comparé au stade olympique qui était toujours à vingt minutes de là, vide. Les nouveaux propriétaires demandèrent l’aide des gouvernements pour améliorer leur stade. Ces derniers et la ville de Montréal acquiescèrent, au lieu de dire non et de forcer le propriétaire à réintégrer le stade olympique. Depuis, les octrois continuent à débouler et le stade Molson s’est agrandi au détriment du parc du Mont Royal. Combien de blogs ai-je écrit pour décrier cette folie ! Le comble du ridicule, c’est que les Alouettes utilisent le stade olympique lorsque le stade Molson ne peut loger tous les spectateurs quand la demande est trop forte.

Quant au soccer, le groupe Saputo s’est mis en tête de le relancer à Montréal. Avec tous les nouveaux immigrés qui viennent de pays où le « foot » est le sport national, la nouvelle équipe « les Impacts » fait fureur. Au lieu d’utiliser le stade olympique, Saputo a construit, tout à côté du stade Olympique sur le même terrain, un stade de soccer à prix économique et minable architecturalement, qui utilise les parkings de ce dernier. Cette nouvelle structure défigure l’ensemble architectural du parc Olympique. Pour ajouter à l’injure, Saputo veut agrandir son stade et demande aux gouvernements des octrois importants. Pourtant, lorsque la foule est trop nombreuse, il transfert son équipe dans le stade olympique au grand plaisir des adeptes. Ridicule…

Autre situation choquante, le déménagement de l’imposante, importante et magnifique fontaine dessinée par le grand artiste peintre du Québec, Jean-Paul Riopelle, construite sous sa supervision et installée au milieu des promenades du parc olympique. Peu de publicité était faite pour inviter le public à aller voir cette œuvre. Elle fut déménagée, il y a à peine quelques années, pour être réinstallée dans le centre-ville. Ridicule…

Il semble que nos dirigeants politiques et les investisseurs font tout pour saboter le parc Olympique. Le problème de ces derniers, ils n’ont pas les poches assez profondes pour vraiment supporter des équipes professionnelles. Ils se retournent vers les solutions faciles et les gouvernements pour trouver les argents dont ils disent avoir besoin. Le malheur est que nous n’avons pas assez de familles du calibre des Bronfman ou Molson à Montréal pour vraiment faire vivre de façon permanente de grandes équipes professionnelles dans notre ville. Le baseball est parti, le basketball n’est qu’à Toronto, le soccer n’est pas de taille mondiale.

Les immenses espaces vides du stade, particulièrement dans la tour, auraient pu être disponibles pour les activités sportives des étudiants montréalais. McGill, par exemple, au lieu d’empiéter sur le Mont-Royal pour construire un centre de sports, aurait pu faire une entente avec la RIO pour utiliser une partie du stade. Déjà les bassins de natation, les pistes d’athlétisme, etc. étaient disponibles. Par métro, les étudiants auraient pu facilement voyager entre le centre sportif installé au stade et leur université. De même pour les étudiants des universités de Concordia et d'UQAM ainsi que ceux de différents collèges. Le stade olympique aurait pu devenir un grand centre sportif pour notre jeunesse. Au lieu de suivre une telle route, que j’ai défendue devant les représentants de McGill et du conseil de ville de Montréal, les gouvernements ont accepté de dépenser des argents ici et là pour satisfaire les demandes de tous et chacun. On est dont heureux, chacun dans sa cour! Pendant ce temps, notre exceptionnel parc olympique dépérit.

Ce n’est pas en démolissant le parc Olympique que nous trouverons une solution. Les promoteurs de cette idée prennent comme exemple le nouveau Quartier des Spectacles qui vient d’être réalisé au centre-ville. Ils oublient que ces dépenses importantes sont justifiées par une demande importante des Montréalais et Montréalaises qui participent depuis plusieurs décennies à des activités de festivals au cœur de la ville et qu’il fallait réaménager l’ensemble pour tenir compte de ce fait. Plusieurs parties extérieures du parc peuvent devenir des espaces verts et être plus accueillantes, mais ce n’est pas en « brisant du béton » que nous protégerons l’héritage qu’est pour nous le stade Olympique. Et, changer le nom n’est qu’une chimère.

Claude Dupras.

samedi 19 juin 2010

L’expo2010 un grand succès

De retour de l’expo2010 de Shanghai, je viens d’afficher, sur mon site internet, 937 photos captées sur le terrain de ce grand évènement. Cette exposition internationale est la plus importante jamais tenue puisqu’elle regroupe un nombre record de participants et attend un nombre record de visiteurs, soit près de 100 millions. Comme Montréalais, ayant vécu de près l’expo67 de Montréal, j’ai parcouru le site de l’expo2010 et ses pavillons avec un œil critique, Ceux, parmi mes lecteurs, qui ont visité l’expo de Montréal sauront aussi faire, grâce à mes photos, les comparaisons qui s’imposent avec celle de Shanghai.

L’expo2010 est située sur les deux rives de la rivière Huang Pu qui divise la ville de Shanghai. L’expo67 se situait en partie sur l’île de Montréal mais surtout sur l’île Ste-Hélène agrandie, en plein fleuve Saint-Laurent, avec la nouvelle île Notre-Dame qui la juxtaposait et qui fut créée de toute pièce. Ce n’est pas prendre parti que d’affirmer que le site de l’expo Montréal était de beaucoup plus spectaculaire que celui de Shanghai.

Le nombre de pays participants à Shanghai est de beaucoup supérieur à celui de Montréal mais les pavillons ne sont pas généralement plus importants. Les pavillons américain, russe, tchécoslovaque, cubain, canadien, français, allemand de l’est, etc… étaient beaucoup plus impressionnants à Montréal qu’ils le sont à Shanghai. D’ailleurs, pour ceux qui n’ont pu visiter expo67, vous pouvez comparer le bâtiment du pavillon français sur l’île Notre Dame (celui du casino) et la structure du dôme géodésique des USA, sur l’île Sainte-Hélène, désigné par Buckminster Fuller, puisque les deux structures sont toujours en place. Montréal l’emporte haut la main.

De plus à Montréal, un certain mystère accompagné d’une profonde curiosité faisait partie des sentiments que nous ressentions. En effet, en 1967 le rideau de fer existait et était étanche. La poigne de l’URSS et des partis communistes était solide partout en Europe de l’Est. Nous considérions la menace communiste dangereuse. La venue des délégations de l’URSS et des pays de l’Europe de l’Est en plus de Cuba de Fidel Castro (qui n’était pas encore ouvert au tourisme), devenaient pour nous tous : un mystère à découvrir. On ne retrouve pas ce sentiment à Shanghai. Le monde a bien changé depuis que le monde des communications y a vu. Le communisme a disparu de l’Europe. Même la Chine de Mao Tsé-toung est méconnaissable car bien que dirigée par le parti communiste chinois, elle est devenue totalement capitaliste.

En 1967, les pays devaient compter sur un grand nombre d’hôtes et d’hôtesses pour recevoir les visiteurs et expliquer leurs présentations. Aujourd’hui, ce sont de grands écrans vidéo qui présentent en boucle les images et les informations.

Il ne s’agit pas pour moi de dénigrer l’expo2010. Au contraire, c’est une très belle et imposante exposition. La plus importante jamais tenue. Le pavillon de la Chine est sûrement le plus imposant pavillon de toutes les expositions. Il est magnifique, souligne l’esprit de la culture chinoise traditionnelle et démontre la puissance nouvelle de ce pays.

Nous y sommes restés 6 jours, alors qu’au moins 15 jours auraient été nécessaires pour voir la grande partie de ce que l’expo présente. Les Chinois on fait un travail du tonnerre. Malgré les foules nombreuses, on y accède facilement et rapidement. Les services aux visiteurs sont nombreux. La restauration diverse et excellente. L’accueil est chaleureux, poli, prévenant. Malgré les problèmes de langues, le visiteur étranger se sent à l’aise. Le site est très vaste et le transport bien pensé et important.

Comme à Montréal où on trouvait de longues filées pour accéder aux pavillons, à Shanghai c’est de même mais en plus long. Mais ce n’est pas nécessairement un désavantage, puisqu’en ligne on côtoie de près les Chinois et on se rend compte que malgré leur air sévère qu’ils savent sourire. Ils démontrent du respect pour le visiteur et du bonheur de le voir. La seule contrainte et elle est surprenante, c’est que plusieurs font tout pour passer devant celui qui est en avant d’eux. J’ai l’impression que cette coutume vient du temps où ils devaient faire de longues files devant les magasins pour acheter le minimum vital. On apprend vite à se mettre en position de blocage. Cela ajoute au charme!

Le lien pour mes albums de photos d’expo2010 est : http://claude.dupras.com/l'expo2010.htm

J’espère qu’elles seront vous intéresser et vous donner une bon aperçu de ce qu’est l’expo2010. N’hésitez pas à me faire part de vos commentaires et de vos questions.

Merci

Claude Dupras

dimanche 13 juin 2010

La folie de l’Assemblée Nationale du Québec

Quel mauvais spectacle nous ont offert nos députés ! C’est triste de le constater. Au lieu de travailler ensemble pour aider à solutionner les problèmes financiers, de santé, d’enseignement et combien d’autres qui confrontent l’avenir des Québécois, nos députés se sont chamaillés comme des enfants qui se battent pour un suçon.

Jean Charest est le PM du Québec et les libéraux sont le gouvernement. Ils ont été élus démocratiquement par les Québécois et Québécoises. Et ce sont ces derniers qui décideront de ceux qui les remplaceront lors des prochaines élections prévues par la loi.

Chercher à faire démissionner le chef du parti libéral sous de faux prétextes tout en créant une obstruction systématique sur tout et rien n’est que de la politicaillerie de basse-cour indigne d’un homme ou d’une femme politique qui se respecte.

Dans mon blog du 2 avril dernier intitulé « Bye, Bye, Jean Charest », je prévoyais le déplaisir des Québécois suite à la présentation du budget et je prédisais sa descente aux enfers lors de la prochaine élection. Je suis en désaccord avec plusieurs des propositions de ce budget qui facilitent trop la possibilité pour le gouvernement de fouiller dans nos poches. J’ai appris dans ma vie politique qu’ « un politicien qui taxe est un politicien qui se fait battre », et je crois que ce sera le sort du PM et de son parti à la prochaine élection. À moins que ça change…

Plusieurs décisions importantes de Jean Charest et de son parti favorisent le Parti Québécois pour la prochaine élection. Leur refus d’établir une commission d’enquête sur la construction est une erreur majeure et le nouveau budget coule davantage le navire rouge.

Le parti de l’opposition officielle veut à tout prix la peau de Jean Charest car il le sait fort habile en période électorale et « dur à battre ». Les péquistes le craignent au point qu’ils sont, aujourd’hui, prêts à tout pour le salir afin de prendre le pouvoir, même nonobstant la vérité. Au début de la session, malgré le sérieux de ses critiques, le PQ n’avançait que lentement dans les sondages. Depuis qu’il use d’injures, d’insinuations mensongères, de dénaturation des mots et gestes de leurs adversaires et d’autres tactiques de même nature, le PQ progresse plus vite. Ce dernier a même réussi à endoctriner une partie de l’électorat en lui faisant croire à la véracité du contenu de ses attaques négatives envers le PM et son parti. C’est ce que je découvre sur internet, où plusieurs internautes réclament la démission du PM, souventes fois avec virulence.

Mais la nature extrême des débats (je devrais dire « attaques personnelles de bas niveau… ») récents à l’assemblée nationale me fait penser que le PQ ne s’est pas vraiment aidé malgré sa nouvelle popularité. Peut être n’est-elle qu’éphémère ? Le PQ a oublié une autre vérité de la vie : « La merde lancée en l’air retombe souvent sur ceux qui la lancent ». Les actions du PQ ont forcé le gouvernement à imposer le bâillon pour terminer la session parlementaire et à ne pas voter plusieurs nouvelles lois importantes. C’est insensé. Le PQ et son chef pourront en souffrir à long terme. Non seulement, ils ont nui à la solution de problèmes, mais, dans la chaleur des débats, leurs propres images ont été dévoilées telles qu’elles sont et l’électorat a compris clairement qu’elles ne sont pas aussi pures que le PQ et son chef aiment le prétendre.

Malgré mes désaccords avec Jean Charest, je reconnais qu’il a été un bon premier ministre pour le Québec. Cependant, à cause des circonstances, le temps est peut être venu pour lui de laisser la place de chef de l’État québécois à un autre. Par contre, je doute qu’il le fasse dans les circonstances actuelles où sa probité et son honnêteté sont questionnées.

Quant à Pauline Marois, la chef du PQ, qui a autorisé la débandade verbale d’insinuations mensongères dont nous avons été témoins à l’Assemblée Nationale, elle vient de démontrer encore une fois, qu’elle n’a pas ce qu’il faut pour devenir un bon premier ministre du Québec. Malgré qu’elle vive dans une maison de verre, je doute qu’elle quitte car elle veut à tout prix être PM et trop d’intérêts la supportent.

Les deux partis ont suffisamment de bons talents dans leurs rangs pour offrir aux Québécois et Québécoises, lors de la prochaine élection, de nouveaux chefs et un bon choix politique pour l’avenir du Québec. J’espère que ce sera le cas.

Claude Dupras

mardi 8 juin 2010

Le Vietnam, un État policier : Nouvelle arrestation de Lê Thi Công Nhân

Il est 17h00. C’est le 28 mai 2010. Je suis à Hanoi, au Vietnam. Je reviens à l’hôtel Moevenpick où nous logeons, mon épouse et moi, après avoir visité le musée de la littérature. J’aperçois dans la vitrine du « Highlands Coffee », qui est voisin de l’hôtel, une enseigne qui offre le « free wifi ». J’y vais seul pour lire mes emails, avec mon ipodtouch,

J’opte pour un fauteuil à droite de l’entrée du café près d’une grande vitre qui donne sur l’intersection des rues avoisinantes. Au moment où je m’installe, j’aperçois une jeune dame dans la trentaine qui semble convoiter le même siège. Je lui offre avec plaisir et elle me remercie avec un léger sourire. Je m’installe finalement au centre du café dans un fauteuil, face au bar. La jeune dame est à ma gauche, un peu en arrière de moi, et je dois tourner la tête et légèrement le corps pour l’apercevoir. Mais je l’oublie vite car je me concentre sur ce que me révèle mon ipod.

Une dizaine de minutes plus tard, quelqu’un touche à mon épaule. Je me retourne, c’est la jeune dame. Elle me donne vite une serviette blanche de papier pliée en deux et sans dire un mot retourne à sa place. Surpris, je la regarde, mais elle m’évite et son regard est fixé vers l’extérieur. Elle est petite, le visage un peu grassouillet et porte des verres noirs. Elle a un air intelligent, déterminé mais semble quelque peu préoccupée. Elle est calme.

Je déplie la serviette et y trouve un message écrit de sa main sur un mémo jaune. Je lis : « I’m Lê Thi Công Nhân. U can find (sth…) about me on Internet. I’m under house arrest now (3 years after 3 years in prison). The secret polices are around this coffee shop and I should be arrested again. Pls inform about this to US embassy, EU, Human Rights Watch. Thanks a lot.”

Stupéfait, je ne bouge pas, je glisse vite le mémo dans mon portefeuille. Je la regarde quelque peu mais elle m’évite toujours. Je n’ai jamais entendu parler de cette personne. Je décide de rester dans le café et attendre la suite des évènements. Je recherche par mon ipod qui elle est mais je ne trouve rien (je faisais une erreur avec son nom). Quelques minutes plus tard, trois jeunes hommes et une jeune fille habillés en civil, à l’allure policière, entrent dans le café et s’assoient, sans brouhaha, avec la jeune dame. Je les regarde brièvement. Ils engagent une conversation avec elle, mais elle semble ne répondre que par signes de têtes. Elle a l’air triste et demeure calme.

Que faire ? Au bout de dix minutes, je quitte le café et j’aperçois à l’extérieur au moins un autre policier en civil qui me suit de l’œil.

De retour à l’hôtel, je vérifie sur internet qui est Lê Thi Công Nhân. Google me dit: « Lê Thi Công Nhân est bien connue dans les milieux dissidents au Vietnam en tant qu’avocate au franc-parler pour les droits de l'homme. Elle a été interrogée par « Voice of America » et « Radio free Asia »: là et ailleurs, elle a appelé au respect des droits de l'homme dans son pays.

Arrêtée le 6 Mars 2007 par la sécurité de la police de Hanoi et jugée par la Cour Populaire de Hanoi le 11 mai 2007. Lê Thi Công Nhân a été condamnée à quatre ans d'emprisonnement, en vertu de l'article 88 du Code pénal, pour "propagande contre l'État » (le parti communiste). Sa peine fut réduite d'un an suite à un appel le 27 Novembre 2007, bien que sa peine supplémentaire d'assignation à résidence en liberté de trois ans n'ait pas changé.

Amnistie Internationale la considère comme une prisonnière d’opinion et a demandé alors sa libération immédiate et inconditionnelle.

Elle fut libérée le 6 mars 2010, après la fin de sa sentence, mais arrêtée à nouveau pour trois heures le 9 mars sous prétexte qu’elle avait violé les conditions de son assignation à résidence.
»

Je suis le seul qui sait qu’elle vient d’être arrêtée à nouveau. Dois-je avertir immédiatement les gouvernements ou organismes tel qu’elle me le demande dans son mémo ? Je m’informe auprès de personnes locales sérieuses et on me conseille de ne rien faire pour l’instant car cela pourrait me créer des embêtements avec le gouvernement Vietnamien puisque je serai encore huit jours au Vietnam et de n’en parler à personne car le parti a ses informateurs, qu’ils soient guides, etc… Je décide de suivre ce conseil et d’agir dès ma sortie du pays. C’est ce que je fais par ce présent blog et par les messages que j’ai fait parvenir selon les désirs de Lê Thi Công Nhân.

Le parti communiste du Vietnam est le dictateur du pays. Il compte comme membres seulement 3% de la population et pour le joindre il faut avoir de bons contacts car n’entre pas qui veut dans cette « gang ». Il contrôle l’armée, la police et le gouvernement. L’homme le plus fort du pays est le secrétaire général du parti communiste et non le président. Il n’y a pas d’élection dans ce pays. Tous les membres du gouvernement et les bureaucrates sont communistes. Il est reconnu qu’ils font preuve de corruption et sont accusés d’incompétence à cause de leurs fréquents changements de décision.

Pourtant le développement économique du pays est réel et rapide. D’un des pays les plus pauvres d’Asie, il est devenu aujourd’hui un pays dynamique et son taux de pauvreté a diminué de dix fois. C’est depuis 1987, année où le parti communiste a décidé d’accepter l’économie de marché, que tout a changé. Il s’est finalement rendu à la demande du Vietnamien moyen, particulièrement celui du sud, qui est un individu entreprenant et qui veut à tout prix réussir à bien gagner sa vie. Depuis, de petites et grandes entreprises de toutes sortes fourmillent de partout.

Actuellement, les Vietnamiens tolèrent le parti communiste car l’environnement économique de leur pays leur permet de faire des affaires et des sous. Il y a aussi le fait que le Vietnam a vécu 5 guerres contre des pays étrangers durant les 100 dernières années et les a toutes gagnées. Le peuple vietnamien demeure reconnaissant à Ho Chi Minh et à son parti communiste pour avoir bien mené ces batailles et obtenu l’indépendance de leur pays.

Mais cela ne change pas le fait qu’il y a contradiction entre politiques communistes et politiques démocratiques. En général, les Vietnamiens sont heureux de bénéficier de libertés sociale, économique et religieuse mais surpris que les dirigeants du pays emprisonnent ceux qui veulent la liberté de parole. Plusieurs estiment que le parti communiste est suffisamment fort dans l’opinion publique pour permettre que des personnes comme Lê Thi Công Nhân, qui est très connue, puissent s’exprimer librement sur l’organisation politique de leur pays. Même si pour eux, la notion des droits de l’homme n’a pas l’importance que nous lui donnons puisqu’ils pensent que ce sont plutôt les devoirs du citoyen qui priment dans la société, ils ne comprennent pas pourquoi ceux qui les défendent ne puissent le faire.

Cela démontre que le parti communiste vietnamien est une « gang » au pouvoir qui ne veut d’aucune façon risquer de le perdre. Tant que le Vietnam demeurera un État policier, il n’aura pas la crédibilité requise pour accéder au rang qu’il mérite sur la scène internationale.

J’espère que les organismes internationaux s’uniront pour plaider à nouveau la cause de Lê Thi Công Nhân afin qu’elle soit libérée.

Claude Dupras