Elle doit, aussi, analyser les achats de titres boursiers par des ministres suite à la vente du réseau provincial de gaz naturel à l’entreprise privée. En somme, vérifier si les révélations du journal Le Devoir dans ce qu’on a appelé « le scandale du gaz naturel » sont exactes.
Immédiatement, le chef de l’opposition Daniel Johnson
s’élève contre cette commission qu’il qualifie de tactique diffamatoire pour
salir l'image de l'Union nationale. Il souligne que depuis qu’ils ont pris le
pouvoir, les libéraux agissent de la même façon que l’Union Nationale alors
qu’elle était au pouvoir.
Témoin appelé par la commission Salvas, Gérald Martineau
qualifie le favoritisme « bleu » de philanthropie. Il se voyait un
bon papa qui donnait aux pauvres l’argent qu’il percevait des riches. Il supportait les petites entreprises
francophones par le patronage, contrairement aux libéraux qui, depuis toujours,
gavaient de contrats la grande entreprise anglophone et étrangère. Même s’il y avait une certaine vérité dans ses
propos, le patronage qu’il pratiquait était discrétionnaire et allait ainsi à
l’encontre d’une bonne gestion des fonds publics.
Le 1er août 1962, deux ans après le début de
l’enquête, le juge Salvas présente un premier rapport préliminaire. En janvier
1963, le rapport final est déposé. La commission reproche au gouvernement de
Duplessis d’avoir fait des pratiques d’achats qui ont servi, en partie, à
financer une caisse électorale occulte et pour récompenser les services rendus
par les organisateurs de l'Union nationale dans les différentes régions du
Québec.
La commission Salvas blâme durement certains ministres et
haut-fonctionnaires d’avoir profité d'informations privilégiées pour acheter
des titres de la Corporation du gaz naturel et qualifie ces transactions de
contraires à « la morale et l'ordre public ». Salvas recommande une loi
spéciale pour que de tels abus ne se reproduisent pas dans le futur.
Cependant, aucune accusation n’est portée contre
Duplessis, Sauvé, et ni l'ancien premier ministre Antonio Barrette, malgré les
demandes des avocats du premier ministre Lesage.
Suite au rapport, seulement cinq personnes sont
poursuivies au criminel sous des accusations de fraude et de conspiration. Ce
sont les ministres Antonio Talbot, de la voirie ; Joseph D. Bégin, de la
colonisation et organisateur en chef de l’Union Nationale ; plus le
conseiller législatif et trésorier du parti Gérald Martineau. De plus, un haut
fonctionnaire, Alfred Hardy, est inculpé. Il agissait comme directeur du
service des achats durant la plus grande partie de l’ère Duplessis. Il y a
aussi un homme d’affaires de Québec, Arthur Bouchard, frère du conseiller
législatif du même nom, qui doit répondre à une accusation de conspiration pour
fraude.
L’action contre M. Antonio Talbot a pris tout le monde
par surprise car son nom n’était même mentionné dans les recommandations de
poursuites du rapport de la commission Salvas.
Suite à ces procès, Jos D. Bégin est déclaré non coupable
des accusations portées contre lui. Gérald Martineau, est d’abord acquitté mais
la cour d’appel, poussée par le gouvernement libéral, revint avec huit chefs
d’accusations et il est condamné à 49 000,00$ d'amende et trois mois de prison,
que M. Martineau servira dans un hôpital. Antonio Talbot est condamné à payer $100 pour
chacun de 13 chefs d’accusations, étant donné qu’il n’avait pas profité
personnellement de quoi que ce soit. Alfred Hardy est condamné à payer un
montant total $3 100 pour ses dix neufs chefs d’accusation pour la même
raison que le précédent. La cause contre Arthur Bouchard est retirée.
Plusieurs sont satisfaits du résultat de cette commission et
des jugements rendus. Contrairement à ceux qui disent que la commission Salvas
n’a accouché que d’une souris, C'est un point tournant dans la lutte au
patronage politique au Québec qui avait été pratiqué durant le long règne
de l’ex-premier ministre Alexandre Taschereau, de celui d’Adélard Godbout et
continué sous Duplessis. Un coup fort dans l’opinion
publique en rapport avec la nécessité d’une observation rigoureuse des
principes de la justice et de la morale requise des personnages politiques. On
référera longtemps à l’enquête Salvas dans l’avenir pour juger les hommes
politiques qui agiront sans éthique.
Puis, pour confirmer, une autre fois, sa mesquinerie
antiduplessiste, Lesage refuse de faire ériger la statue de bronze de Maurice
Duplessis commandée par Paul Sauvé en 1959 et réalisée par l’artiste Émile
Brunet, pour marquer son nationalisme, son amour du Québec et ses dix-neuf ans de
service à la tête du gouvernement de la province de Québec.
Vingt ans plus tard, le premier ministre René
Lévesque, un homme non marqué par la partisannerie politique et qui a toujours su
démontrer qu’il sait reconnaître les services rendus à la nation, décide d’installer
la statue de Duplessis, près du parlement du Québec, en un endroit particulier qui
reflète l’importance des services rendus par Maurice le Noblet Duplessis pour
le développement et l’avancement du Québec.
Conclusion
Dès sa première prise de pouvoir en 1939, Duplessis sait que le Canada anglais n’accepte pas la clause de l’exclusivité et cherche toujours à la contourner pour se donner de plus en plus de pouvoirs. Face à ces tentatives, sa réponse est simple et bien comprise par les Québécois : « Rendez-nous notre butin ». Il est intraitable, incontournable et bien appuyé par le Conseil privé de Londres qui est appelé à juger les conflits et qui affirme que les provinces « sont aussi souveraines dans leur domaine que le parlement de Westminster lui-même » et que « le fait pour le gouvernement fédéral d’avoir un pouvoir général de dépenser ne le justifie pas de dépenser dans des domaines de compétence provinciale. ». Depuis, le gouvernement fédéral a aboli le droit d’appel au Conseil privé de Londres et veut éliminer (disons « se libérer de ») la jurisprudence de cet organisme du droit constitutionnel canadien.
Conclusion
Dès sa première prise de pouvoir en 1939, Duplessis sait que le Canada anglais n’accepte pas la clause de l’exclusivité et cherche toujours à la contourner pour se donner de plus en plus de pouvoirs. Face à ces tentatives, sa réponse est simple et bien comprise par les Québécois : « Rendez-nous notre butin ». Il est intraitable, incontournable et bien appuyé par le Conseil privé de Londres qui est appelé à juger les conflits et qui affirme que les provinces « sont aussi souveraines dans leur domaine que le parlement de Westminster lui-même » et que « le fait pour le gouvernement fédéral d’avoir un pouvoir général de dépenser ne le justifie pas de dépenser dans des domaines de compétence provinciale. ». Depuis, le gouvernement fédéral a aboli le droit d’appel au Conseil privé de Londres et veut éliminer (disons « se libérer de ») la jurisprudence de cet organisme du droit constitutionnel canadien.
Après la guerre en 1944,
lorsque Duplessis reprend le pouvoir, il sait qu’il a beaucoup à faire pour
reprendre les droits d’impôt directs cédés à Ottawa, le régime de
l’assurance-chômage créé par le fédéral grâce à un amendement constitutionnel
appuyé par le gouvernement libéral de Godbout et les allocations familiales que
le gouvernement fédéral juge comme faisant partie de son pouvoir de dépenser.
Le PM Mackenzie King ne
veut plus reconnaître les pouvoirs fiscaux des provinces et substitue leur
autonomie fiscale par un régime de subventions. C’est à prendre ou à laisser. Les
provinces qui n’acceptent pas par écrit le nouvel arrangement, perdront les
subventions. Duplessis s’inscrit en faux contre ces invasions dans le domaine
provincial. Il réclame le respect intégral de la Constitution. Il devient un
résistant en refusant les subventions qu’il qualifie d’empiètement du fédéral.
Il exige le respect du pouvoir du Québec avec compensation financière. Le
parti libéral du Québec, toujours aussi à genoux devant Ottawa, l’accuse de
faire perdre de l’argent à sa province.
Les élections
provinciales de 1948 deviennent un genre de plébiscite et les électeurs
ratifient la position de Duplessis. Il en ressort renforcé car Duplessis gagne
tous les comtés francophones et le parti libéral ne remporte que les huit
comtés à prédominance anglophone. L’autonomie provinciale devient le leitmotiv
de Duplessis et il gagnera toutes ses autres élections, jusqu’à sa mort, avec
ce thème malgré les promesses alléchantes « de pain et de beurre »
des libéraux et l’opposition grandissante à sa politique sociale. Cela démontre
bien toute l’importance que les Québécois ont toujours apportée aux questions
constitutionnelles.
Le point culminant de la
crise constitutionnelle sous Duplessis arrive en 1957 avec le financement des
universités. Duplessis interdit aux universités d’accepter les subventions
fédérales. Le fédéral, gêné que ses politiques créent des pertes financières
pour le Québec, décide de mettre de l’argent de côté dans un fond au nom du
Québec en espérant qu’un jour la situation politique québécoise change en sa
faveur. Duplessis augmente la pression en créant son propre impôt et, devant
une opinion publique révoltée, le PM fédéral Louis Saint-Laurent se voit obligé
d’accorder 10 % de son champ fiscal au Québec.
À la mort de Duplessis,
le fédéral qui n’avait pas encore cédé sur la question des subventions,
réalisait de plus en plus qu’il ne pouvait plus continuer bien longtemps à
pénaliser le Québec.
Il faut aussi souligner
la finesse d’esprit de Duplessis qui avait autorisé le gouvernement fédéral à
amender la Constitution en vue de l’établissement d’un régime de sécurité de la
vieillesse mais avait exigé d’ajouter une mention à l’amendement à l’effet que
toutes les lois antérieures sur le sujet auraient priorité sur toute loi
fédérale. Ainsi, Ottawa n’a pu empêcher la mise-sur-pied, par les gouvernements
provinciaux suivants, du régime des rentes du Québec ni de la Caisse de Dépôt
et de placement. Ce furent de grands succès.
Aussi, le rapport de la
commission Tremblay que Duplessis créa en 1950 sur la Constitution replaçait le
Canada à l’heure des « Pères de la confédération » : « respect intégral des exclusivités, des
compétences garanties aux provinces conforme à l’article 92, un espace fiscal
bien délimité et permettant au Québec d’exercer ces pouvoirs ». Le
premier ministre Jean Lesage, qui avait tant critiqué et sali Duplessis, déposa
le rapport Tremblay à sa première conférence fédérale-provinciale comme
représentant la position du Québec.
Duplessis a été un grand
constructeur. Écoles, universités, facultés de génie de Polytechnique et Laval,
hôpitaux, barrages hydroélectriques, électrification rurale, drainage, routes
et pavage, autoroutes, etc.
Grâce à sa connaissance
de l’histoire, à sa résistance, à son sens stratégique, il a été un des
principaux leaders qui ont permis d’ériger le Québec d’aujourd’hui.
L’ère Duplessis n’était pas celle de la grande
noirceur, comme se plaisait à dire le PM Jean Lesage et comme le répètent
trop de québécois d’aujourd’hui sans vraiment connaître ce qu’elle a été, mais
celle durant laquelle le Québec s’est donné les outils, les moyens financiers
et les pouvoirs pour sortir de la grande noirceur.
FIN