vendredi 28 février 2014

L’intérêt du parti avant l’intérêt général

Nous voilà, Québécois, à l’aube d’une nouvelle élection générale. Le Parti Québécois a, depuis un an, repris du poil de la bête et trône dans les sondages. Cette situation est un hommage à la longue expérience politique de Marois et à l’excellence de ses conseillers. Voulant profiter de la situation et voyant à l’horizon la possibilité de diriger un gouvernement majoritaire avec le pouvoir de mettre en force le programme politique de son parti, elle va provoquer une élection. Et cela, malgré que la minorité qu’elle dirige, depuis moins de deux ans, ait fait adopter une loi pour fixer automatiquement la date des élections aux quatre ans. Elle veut imiter ainsi le PM canadien, le conservateur Stephen Harper, qui ne respectant pas la loi fédérale, avait subitement déclenché une élection avant la date prescrite pour gagner une majorité. Et il avait réussi. Bizarres chefs de partis qui interprètent la loi à leur façon pour satisfaire l’intérêt de leur parti, prétextant qu’elle ne s’applique pas si les partis sont minoritaires, même s’ils n’ont pas été défaits en chambre sur une question gouvernementale vitale.

Le programme du parti Québécois a été adopté démocratiquement par les membres du parti. On peut dire, sans exagérer, que le PQ est un des partis les plus démocratiques du Canada, l’autre étant le Nouveau Parti Démocratique sur le plan fédéral. Aux congrès du PQ, tous les délégués, dûment élus dans leurs comtés, débattent vraiment de chaque résolution et décident indépendamment de l’adopter, de l’amender ou de la rejeter, nonobstant, souventes fois, les désirs de la direction et du chef du parti. La constitution du parti a été ainsi adoptée. Et l’article 1, de cette constitution du Parti Québécois, stipule : « Aspirant à la liberté politique, le Parti Québécois a pour objectif premier de réaliser la souveraineté du Québec à la suite d’une consultation de la population par référendum tenu au moment jugé approprié par le gouvernement ». On ne peut être plus clair. Le but du parti est la séparation du Québec de l’ensemble canadien. Le PQ est séparatiste.

Un très grand nombre de Québécois n’appuient pas le PQ, justement à cause de cet article et cela même s’ils étaient tentés de voter pour un bon gouvernement péquiste en qui ils auraient confiance. Ils ne le font pas de crainte que le PQ ne les engage dans un autre référendum pour briser leur pays, le Canada. Par deux fois, les Québécois ont dit « NON », mais, pour les péquistes, c’est la phrase de René Lévesque qui résonne toujours dans leurs têtes : « à la prochaine ».

A leur congrès de 2012, les péquistes ont approuvé, en l’absence de leur chef Marois, une résolution pour modifier la loi sur la consultation populaire pour permettre des référendums d’initiative populaire qui s’appliqueraient même pour la souveraineté. Le ministre Drainville, le même qui est l’auteur de la « Charte des valeurs… », a confirmé que le processus référendaire pourrait être déclenché par une pétition avec une exigence de 15% des électeurs inscrits. Aujourd’hui, avec les réseaux sociaux et l’internet, il est relativement facile de réunir des milliers d’internautes autour d’une question. On connaît les abus en Californie de tels référendums électoraux et vouloir appliquer cette méthode pour séparer le Québec du Canada est irresponsable. Même si Pauline Marois a dit vouloir consulter la population sur les modalités de mise en place de cette idée, on peut comprendre qu’elle ne s’y oppose vraiment pas. A mon avis, un gouvernement qui veut engager la population dans une telle décision doit avoir les mains libres d’agir et en prendre la responsabilité entière et non pas être obligé d’agir par une pétition.

A la question de journalistes sur la tenue d’un référendum dans un prochain mandat majoritaire, la PM Marois répond vaguement et promet « un livre blanc sur l’avenir du Québec ». Elle dit vouloir une nouvelle consultation sur l’option séparatiste en vue d’aboutir à des propositions qui seront avalisées par son gouvernement. Elle dit refuser de s’engager officiellement dans un autre référendum mais elle suit exactement le chemin du référendum de 1995 qui avait été précédé de la Commission de l’avenir du Québec. Il est clair que les propositions, dont elle parle, seront avancées par des partisans du parti et de l’option indépendantiste. En fait, elle se fout de nous ! « Nous allons réfléchir collectivement », lance-t-elle, alors que tous les sondages indiquent que 50-60% des Québécois s’opposent à la tenue d’un nouveau référendum. Et, sans même sourire du coin de la bouche, elle ajoute : « on ne bousculera pas les Québécois, nous allons leur donner une avenue claire, et tenir le référendum dans un moment approprié ». En somme, elle a décidé que le résultat de la commission ira dans le sens qu’elle veut, que le référendum aura lieu, mais qu’il est nécessaire pour elle de maquiller la réalité pour calmer ceux et celles qui s’y opposent.

La PM Marois cherche aussi à refaire le coup de la Commission sur la charte des valeurs québécoises… de la neutralité… de la laïcité… (je ne sais plus quel nom y donner, tellement il change constamment). Pour gagner le débat sur la question de cette charte, le parti québécois profite de l’islamophobie que les dépositions à la commission génèrent. On est rendu au point, que beaucoup de Québécois ont peur de l’Islam, méprisent ceux qui pratiquent cette religion et acceptent la charte pensant que c’est la solution à ce pseudo problème. On fait croire que toutes les femmes musulmanes doivent porter le voile sous les ordres de leur père ou mari. On ne veut pas savoir que l’Islam exprime une grande sagesse, une ouverture sur la fraternité humaine, un respect de toutes les religions, de la famille, un engagement envers les faibles et les déshérités… On fait de l’Islam un monstre et pour le contrer on est pour la charte, car c’est elle qui plantera la lance dans cette bête de l’apocalypse qui supposément étend sa menace sur nos tous. J’exagère, vous direz… eh ! bien dites-moi ce que vous disent vos amis et voisins sur tous les messages antimusulmans qu’ils reçoivent via les réseaux sociaux sur leurs appareils intelligents et leur ordinateurs. Certes, il y a les islamistes, les purs, durs et cruels. Ce sont des minorités qui n’ont rien à voir avec les musulmans que je connais au Québec, en Algérie, au Maroc…. Et il faut avoir côtoyé ces derniers pour comprendre qu’ils sont des gens qui ont des familles, des enfants, des ambitions, des problèmes, des préoccupations, des joies, des misères… comme nous.

La charte des valeurs a fait remonter le PQ dans les sondages. Il en a fait sa stratégie électorale et ce faisant a fait passer l’intérêt du parti avant l’intérêt général. Tout a été bien pensé. La charte est devenue le sujet du jour surtout en région où le PQ pense trouver sa majorité. Plusieurs de nos compatriotes voient les musulmans dans leur soupe. A les entendre et à les lire, ils sont responsables de tous les maux, ils infiltrent même les garderies. Ils pointent du doigt ceux qui les défendent comme étant des alliés qui doivent aussi être maudits (j’en sais quelque chose). J’ai l’impression qu’un désir de revanche domine, aujourd’hui, chez trop de Québécois. La charte a créé inutilement une profonde division chez les Québécois, entre les francophones et avec les anglophones et allophones. C’est inadmissible et malsain.

La PM Marois aime souvent copier la France, mais le Québec n’est pas la France. Nous sommes en Amérique et nous sommes tous des descendants d’un immigrant, quelle que soit la religion. Ensemble, nous avons construit nos pays et ensemble nous continuerons à le faire. Et au Québec, tout cela peut se faire en français, sans division mais en se respectant mutuellement.

Au lieu de se concentrer sur les vrais problèmes, comme celui du manque criant de main d’œuvre qualifiée, de l’économie qui cherche à nous fuir, des emplois qui se perdent, des usines qui ferment, des Québécois qui veulent partir, de la dette qui nous écrase, de l’amélioration de l’éducation, de la solidification du français, etc… le gouvernement du Parti Québécois démontre encore, nonobstant tout ce qu’il dit, qu’il n’a qu’un seule idée : diviser les Québécois afin de pouvoir gagner un référendum pour séparer le Québec du Canada. Il est important que tous les Québécois placent cette question au cœur des enjeux réels de la prochaine élection.

Claude Dupras

vendredi 21 février 2014

Et la main-d’œuvre, on la trouvera où ?

Les affaires roulent au Québec. Les entreprises manufacturières et les entrepreneurs spécialisés n’ont pas trop de difficulté à obtenir de nouveaux contrats. Leur problème est de trouver la main d’œuvre compétente pour les réaliser. Ce n’est pas facile mais après plusieurs mois de recherches, elles réussissent de peine et de misère à mettre la main sur les oiseaux rares. Celles qui ne réussissent pas s’endettent, risquent et se tournent vers la mécanisation et la robotisation qui produisent davantage et réduisent leur besoin en main d’œuvre.

Par contre, l’avenir n’est pas rose, car la disponibilité de main-d’œuvre québécoise spécialisée et qualifiée se rétrécit au moment où de plus en plus de départs pour la retraite s’amorcent. En effet, de nouvelles statistiques indiquent que pour une première fois : « le nombre de Québécois âgés de 15 à 64 ans va diminuer ». De 2000 à 2010, l’augmentation moyenne du nombre de travailleurs de cette catégorie a été de 39 000 alors que depuis, elle diminue et a atteint 11 000 individus en 2013. En 2014, le nombre est négatif et, pour la première fois, notre bassin de main d’œuvre commence à se vider.

Que résultera-t-il de cette pénurie de bons travailleurs pour le Québec et pour nous ? Les entreprises auront de la difficulté à prendre de l’ampleur et à devenir plus importantes, donc moins de nouveaux emplois potentiels. Elles s’arracheront les travailleurs et cette concurrence féroce augmentera les coûts.

Une bonne partie de ce mal vient du fait que notre taux de natalité qui était parmi les plus élevés de notre continent est devenu un des plus bas. La décision de la PM Marois d’augmenter les frais annuels de garderie, ne viendra pas encourager les familles à avoir plus d’enfants puisque leur budget familial, déjà très serré, sera gravement affecté par ces augmentations.

Alors que de plus en plus d’immigrants qualifiés seront requis pour combler la demande, le débat sur la charte des valeurs québécoises rend les néo-Québécois actuels nerveux et malheureux car ils n’aiment pas la tournure qu’il prend. Plusieurs s’expriment et parlent de quitter le Québec pour aller s’installer dans une province plus sympathique à leur religion.

C’est une faute grave de notre part d’avoir créé de tels ressentiments. Nous oublions trop souvent que chaque nouvelle personne venue sur notre territoire a le potentiel de se marier, d’avoir des enfants, de s’acheter une maison, une auto, de se procurer tout ce qui est essentiel au développement d’une famille, etc… Toutes ses activités monétaires ajoutent au développement économique et affectent positivement, avec celles des autres, la croissance du Québec et la qualité de vie de chacun. En en réduisant le nombre, on risque d’affecter directement notre avenir économique. On se tire une balle dans le pied !

Il y a aussi et toujours notre inaptitude à contrer le décrochement scolaire. Je suis témoin, presque quotidiennement de ses méfaits dans de petits villages près de chez moi. J’y trouve de jeunes adolescents, beaux, solides, à l’air intelligent et qui pour une raison ou une autre ont quitté l’école trop jeunes. Sans formation, sans emploi sérieux, sans projet d’avenir, ils m’indiquent par leur air désabusé, leur désappointement et leur méfiance du système. Pourquoi en sont-ils là ? Leurs parents ? Leurs instituteurs ou institutrices. Leur milieu ? Et que faisons-nous pour les récupérer, leur faire reprendre les études, les encourager, les guider ? On me dit qu’ailleurs, en campagne, c’est pareil. Quant à Montréal, les statistiques font peur. Il y a là un grand nombre de talents perdus qui doivent et peuvent être retrouvés par des efforts d’individus qui réalisent la situation et par le gouvernement qui la connaît. Notre économie en a besoin. S’ils sont bien orientés et encouragés, ils ont le potentiel d’apprendre de bons métiers et de combler le manque criant d’électriciens, de plombiers, de ferblantiers, de ferronniers, de plâtriers, etc… tous des métiers bien payés qui sont en manque de personnel compétent.

La pénurie de travailleurs qualifiés ne se retrouve pas seulement dans les entreprises manufacturières et chez les entrepreneurs de construction mais aussi dans des domaines comme le transport, les mines, les écoles et plusieurs autres. La ministre de l’immigration par la loi 71, qu’elle vient de déposer à l’Assemblée Nationale, veut recruter les meilleurs candidats en implantant en ligne un système où des personnes compétentes et intéressées à venir au Québec pourraient faire une « déclaration d’intérêt ». Ainsi une banque de candidatures de personnes qualifiées dans différents domaines de spécialisation pourra être mise sur pied afin que notre gouvernement puisse être en mesure d’inviter les candidats dont il a besoin à soumettre une demande formelle d’immigration. En somme, il s’agit d’aller plus vite pour aider nos entreprises. Si c’est fait sans arrière-pensée et non contre un groupe ou un autre, je crois que c’est une idée pragmatique qui mérite d’être mise en place. 80 000 demandes d’immigration sont actuellement faites parmi lesquelles le Québec en accepte en moyenne 50 000 par an. Qu’il s’organise pour choisir ceux qui répondent d’abord plus précisément aux impératifs du marché et en augmenter le nombre, au fur et à mesure que cela deviendra nécessaire !

Claude Dupras

vendredi 14 février 2014

Que le vrai Philippe Couillard se lève !

Il est neurochirurgien. Il est un homme politique québécois. Un politicien pas comme les autres. Il surprend souvent pour le mieux. Trop souvent pour le pire.

Ministre de la santé durant cinq années sous le gouvernement de Jean Charest, presque un record, il a démontré en tout temps le calme de son intelligence en agissant avec une certaine grandeur, élévation et générosité donnant ainsi au ministère la stabilité qu’il recherchait depuis longtemps.

C’est là que ses qualités ont été remarquées par nul autre que le ministre péquiste actuel, Réjean Hébert, alors doyen de la faculté de médecine et des sciences de la santé de l'Université de Sherbrooke : « Philippe Couillard a fait preuve d'un sens politique exceptionnel en réussissant à imposer et à maintenir la santé parmi les priorités du gouvernement. Il a aussi réussi à bien informer la population ».

Malgré des difficultés prévisibles de soins et de gérance à court terme, il a créé de grands réseaux intégrés de services, les CSSS, en fusionnant les CLSC avec les CHSLD et, dans plusieurs cas, avec l'hôpital de la région qui de plus en plus s’annoncent bénéfiques.

Nonobstant toutes les protestations, il a ouvert la porte au privé afin de soulager les hôpitaux du nombre grandissant de patients et réduire les délais d’attente du public. Des cliniques privées ont été permises, mises sur pied et les Québécois, qui les fréquentent et payent des frais additionnels, apprécient les courts délais qu’elles offrent pour « voir » un médecin et se faire soigner avec les membres de leur famille. Il ne s’agit pas d’un système privé parallèle mais complémentaire et intégré.

Le départ du PM Jean Charest a motivé Couillard à revenir en politique après cinq ans d’absence. Il a brigué les suffrages pour la chefferie de son parti et a gagné. Il s’est fait élire député d'Outremont et a fait son entrée cette semaine à l’Assemblée Nationale du Québec en tant que chef de l’opposition officielle.

Suite à sa venue comme chef libéral, les premiers sondages le favorisèrent grandement. Il semblait imbattable dans une élection générale. Mais ce n’était pas compter sur les qualités politiciennes de la première ministre Pauline Marois et de ses conseillers. Ils savent que la politique est un commerce d’images et d’illusions qui vise à faire réagir émotionnellement les électeurs.

Ils comprennent que la majorité des Québécoises et Québécois pensent que la politique peut résoudre tous leurs problèmes, qu’elle peut organiser la société pour que celle-ci devienne idéale et que toute image qui peut faire croire que cela se fait est une bonne image pour un politicien.

Quant aux illusions, on les utilise pour laisser une perception fausse, un jugement erroné, une opinion fausse, une apparence trompeuse qui ne correspond pas à la réalité. Toute illusion qui peut faire croire que la société sera mieux organisée est bonne pour un politicien.

Les « faiseurs d’images » de Pauline Marois se sont mis à l’œuvre. Sa coupe de cheveux a changé, ses robes ont remplacé ses pantalons, ses lunettes sont plus à jour…, elle est mieux préparée, présente, toujours prête à bondir, montre un aplomb surprenant dans la défense de ses dossiers, convaincante et surtout a l’air vraie. Au total, la perception qu’ont les Québécois de Pauline Marois s’est grandement améliorée et les illusions qu’elle a créées de bonne gérance et de ses capacités de relancer l’économie québécoise ont eu leurs effets.

Mais l’ex PM péquiste et économiste, Jacques Parizeau, a voulu mettre les points sur les « i ». « C’est la première fois depuis trente ans que je suis inquiet quant à l’avenir économique du Québec », écrit-il dans une lettre ouverte, il y a quatre jours.

Il souligne une étude des Hautes Études Commerciales, publiée à la fin janvier, affirmant que le niveau de vie des Québécois stagne depuis 1981 alors que les dépenses publiques poursuivent leur croissance. Ainsi, Québec a grandement accru son endettement depuis le début des années 2000. Le diagnostic est dur, réaliste et ce qui frappe le plus est « la lente et persistante détérioration de l’économie du Québec depuis dix ou douze ans ».

Parizeau estime que les sommes allouées à la politique industrielle sont insuffisantes. « Il va falloir mettre beaucoup d’argent et beaucoup d’organisation », ajoute-t-il dans une entrevue. En somme, nous avons besoin d’un plan bien structuré, pensé et non d’une distribution de millions $ à hue et à dia, sans réflexion à l’ensemble, simplement pour obtenir une publicité positive capable d’améliorer l’image du parti.

De son côté, Philippe Couillard a trouvé son chemin de Damas et refuse une telle approche politicienne qu’il qualifie de mirage et il ne veut agir ainsi. Il veut respecter les Québécois en leur parlant intelligemment d’une façon vraie. Il joue gros car il n’est pas évident qu’une telle franchise rapporte des votes au moulin. Et cela tend à être démontré par les sondages CROP et LEGER de décembre qui indiquaient que la tendance avait changé et que la faveur populaire penchait vers les péquistes.

Depuis, Couillard traverse une mauvaise période. L’effet de cette nouvelle importante a attiré davantage l’attention de la presse sur ses moindres faits et gestes. Depuis, les critiques pleuvent. Les reportages sont plus souvent qu’autrement négatifs, souvent insignifiants. Peu de journalistes et animateurs de radio et télévision relèvent ses commentaires pour en faire des topos. Ce qui compte pour eux, c’est le sensationnel. Ils ne sont pas intéressés par les vraies solutions aux vrais problèmes. C’est à se demander, parfois, s’ils les comprennent. Pourquoi agissent-ils ainsi ? Pour faire grimper leur cote d’écoute ou la circulation de leur journal ? Pour se montrer au diapason avec l’opinion publique ? Une chose certaine, une telle dérive nuit considérablement à l’homme politique visé et dans le cas présent au Québec, c’est Philippe Couillard. Mais cela peut changer et vite.

Suite à sa première prestation comme chef de l’opposition, le 11 février dernier, le journaliste chevronné, attaché depuis toujours à la colline parlementaire de Québec, Denis Lessard de la Presse, a écrit ce qui suit dans sa colonne du journal : « Philippe Couillard a offert une solide performance à l'Assemblée nationale », puis « l'affrontement quotidien des deux chefs à l'Assemblée nationale a gagné en qualité et en intensité » et ajoute « il est parvenu à maintenir la barre haute avec des interventions mesurées, incisives sans être agressives…. Même ses détracteurs chez les libéraux reconnaissent qu'il a été «rassurant ». Lessard conclut « Manifestement, Pauline Marois prend plus au sérieux cet adversaire que son prédécesseur… ».

Ce fut un bon début à l’Assemblée Nationale et possiblement un point tournant dans le niveau de popularité de Philippe Couillard.

Une chose est certaine, nous savons que la PM Marois veut faire de l’appui à la « charte sur les valeurs québécoises », l’enjeu électoral. S’il n’en tient qu’à Couillard, la prochaine campagne électorale sera réaliste, utile et portera sur les vrais enjeux : l’économie qui confronte l’avenir des Québécois et la réalité qu’un Parti Québécois majoritaire nous engagera à nouveau dans un troisième et coûteux référendum pour séparer le Québec de l’ensemble canadien, alors que par deux fois, les Québécoises et les Québécois ont rejeté cette proposition.

Si le vrai Philippe Couillard se lève, ce sera toute une campagne électorale.

Claude Dupras

jeudi 6 février 2014

Le crucifix, thème de la prochaine élection québécoise

La solidarité des Canadiens-français et la fibre politique que la France leur a léguée constituent les raisons principales de leur présence relativement importante au Canada. De peuple conquis, bafoué, diminué, la nation canadienne-française a trouvé les grands chefs politiques et religieux dont elle avait besoin pour remporter des victoires importantes. Elle a toujours su tirer son épingle du jeu, même quand les règles établies visaient à la contrôler, l’assimiler ou l’angliciser. Le Clergé lui a enseigné la solidarité, ce qui l’a sauvé des jours noirs depuis la conquête et lui a permis de vaincre, de se maintenir et de progresser. Les hommes politiques ont su bénéficier de cette solidarité pour défendre la place du peuple français d’Amérique dans ce grand pays et assurer leur survivance.

De 66 000 Canadiens-français au moment de la conquête, nous sommes, aujourd’hui, plus de 8 millions sur le territoire canadien et cela malgré le départ, à partir de 1861, de milliers d’émigrés Québécois vers les filatures du Nord-Est des USA à cause du manque de travail. Ils y sont restés et ont fondé des familles. En 1930, on évaluait leur nombre à 900 000. On voyait des « Petits Canadas » dans les états du Maine, du Vermont, du Massachusetts, du New Hampshire, du Rhode Island et du Connecticut. Aujourd’hui, leurs descendants se chiffrent à plus de 3 000 000. Mais dans le « melting pot » américain, ils ont perdu leur langue française.

C’est le taux de fécondité élevé, surnommé « la revanche des berceaux », conséquence de la rigide position du Clergé relativement au devoir conjugal et à la famille, encouragé par les nationalistes, qui a permis aux Canadiens-français non seulement de compenser largement pour les exils volontaires de ses enfants mais aussi de contrebalancer, depuis la conquête, le flux de l’immigration anglaise de familles nombreuses. Cette méthode fructueuse démontra, plus que tout autre, la solidarité des Canadiens-français.

De plus, pour tâcher de résorber les effets du manque de travail, le Clergé a encouragé la colonisation pour développer l’agriculture dans de nouvelles régions du Québec, telles la Mauricie, les Bois-Francs, le Saguenay et les Laurentides. Plus tard, la Gaspésie et finalement l’Abitibi. Omniprésent dans la vie des Canadiens-français, il a aussi posé des gestes importants qui ont assuré la protection de leur langue française et de leur religion, par exemple :

. En 1774, Monseigneur Briand, l’évêque de Québec, n’hésite pas une seconde à soutenir la Couronne britannique contre les colonies britanniques américaines qui invitent les Canadiens à s’engager avec elles dans une guerre d’indépendance. Mgr Briand aime la politique de conciliation des Anglais mais redoute surtout le fanatisme anticatholique des américains. Pour défendre la Colonie, une milice canadienne-française est formée en toute hâte et vient gonfler les rangs de l’armée du Gouverneur Carleton qui n’a que 1 500 soldats. Usés par un hiver particulièrement rigoureux, les Américains battent en retraite devant 10,000 hommes fraîchement débarqués d’Angleterre. Le Québec ne fera donc pas partie des futurs États-Unis. Si les Américains avaient gagné, parlerions-nous encore français ? La solidarité prêchée par Mgr Briand a fait la différence.

. En 1788, Monseigneur Hubert constate que dans son grand diocèse les Canadiens-français sont en voie de paupérisation et victimes d’un nombre croissant d’injustices, qu’ils développent une rancœur grandissante contre les Anglais, qu’ils font preuve d’indifférence devant la faible administration anglaise et qu’ils s’insurgent contre la quasi-monopolisation des commerces de la fourrure du Nord-Ouest et du blé par les Anglo-Écossais qui profitent de leur situation pour s’emparer aussi de la richesse foncière. Bouleversé, Mgr Hubert cherche à persuader Carleton mais sa réponse ne le satisfait pas. Appuyé par les siens, il décide de se rendre à Londres et de faire part de ses constatations directement au gouvernement anglais. Devant ce plaidoyer et d’autres, Londres réagit et adopte la troisième constitution du Canada qui divise le pays en deux provinces : Le Haut-Canada et le Bas-Canada, pour tenir compte des préjugés et des coutumes des habitants français et veiller à leur conserver la jouissance de leurs droits civils et religieux. Mgr Hubert a fait ce qu’il avait à faire.

. Vers 1850, Monseigneur Bourget, évêque de Montréal, a l’ambition de faire du catholicisme un instrument capable de résister au pouvoir protestant. Il lance un programme de retraites paroissiales qui opèrent une véritable conversion en profondeur. Il mélange religion et politique. On assiste à un retour en force de la religion catholique. L’évêque encourage aussi les Canadiens français à se lancer à la conquête de l’Ouest du continent. Il affirme : « Le meilleur moyen pour un peuple de conserver sa foi est de la propager au loin ».

. Le 2 mai 1949, Monseigneur Charbonneau, archevêque de Montréal, lance un vibrant appel en faveur des familles éprouvées par la grève de l’amiante : « La classe ouvrière est victime d’une conspiration qui veut son écrasement et quand il y a conspiration pour écraser la classe ouvrière, c’est le devoir de l’Église d’intervenir ». Il réclame de Québec un code de travail qui soit « une formule de paix, de justice et de charité » et demande une quête pour aider les grévistes. Par ailleurs, il appuie la non-confessionnalité dans les œuvres alors que les évêques sont contre. Aux infirmières, il propose une association professionnelle commune alors que les évêques veulent deux associations, une catholique et l’autre protestante. Il fait l’apologie du CCF, le parti socialiste, alors que les évêques croient que l’Église possède une doctrine sociale capable de guérir tous les maux. Devant le manque de Canadiens-français dans le monde des affaires, il propose d’introduire le bilinguisme dans tout l’enseignement de son diocèse. Il prononce de grands discours favorables au nationalisme économique. Il prend beaucoup d’autres positions d’avant-garde avant d’être démis par le pape. Ses idées et ses actions ont fait leur chemin et montré la voie vers le futur aux Canadiens-français.

. Il y a aussi les milliers de maisons d’enseignements des communautés religieuses comme celles des Jésuites, des Frères des Écoles Chrétiennes, des sœurs Sainte-Croix, des sœurs des Saints Noms de Jésus et de Marie et tellement d’autres qui ont su éduquer une grand nombre de Québécoises et Québécois en leur enseignant les cours élémentaire, secondaire, classique ou scientifique et qui ont produit des femmes et des hommes qui sont devenus dirigeants de la nation et d’entreprises de toutes sortes. Sur cette base solide s’est bâti le système d’éducation d’aujourd’hui. Il en fut de même dans le domaine hospitalier et d’autres.

Tout ce qui précède n’est qu’un très bref aperçu de l’histoire du Québec et de l’importance du Clergé et de l’église catholique dans son cheminement. Le crucifix accroché au mur de l’Assemblée Nationale au-dessus du siège du président a été placé là, en 1956, pour marquer le passé religieux et historique du Québec.

Il semble de plus en plus probable que le Québec sera en élection générale bientôt. La premier ministre Pauline Marois a le vent dans les voiles et vise à changer sa minorité parlementaire en une forte majorité. Les deux derniers sondages, favorables à son parti et à sa personne, la motivent à profiter de la situation. D’autant plus que son projet de charte sur « les valeurs québécoises » ou « la laïcité », on ne sait plus comment le nommer, visant à défendre tous signes religieux ostentatoires portés par les employés du gouvernement, attire un nombre important de Québécoises et Québécois.

Le débat sur la charte expose clairement la profonde division qu’elle crée chez les Québécois. On est pour ou on est contre, on n’est pas entre les deux. Le seul groupe uni à 90% (mon évaluation) pour la charte est celui des séparatistes. Pour eux, ce n’est pas son contenu qui compte mais le fait qu’elle plait à une majorité de l’électorat francophone. Ils y voient l’argument capable de rallier au Parti Québécois (PQ) les circonscriptions électorales actuellement entre les mains des autres partis politiques afin que leur parti puisse imposer un autre référendum sur la séparation du Québec de l'ensemble canadien.

Aujourd’hui, le PQ, au nom de la laïcité, veut décrocher le crucifix de l’Assemblée nationale et le placer dans une pièce voisine qui n’a aucun rapport avec l’Assemblée Nationale malgré qu’il ait été une valeur québécoise importante depuis la découverte du Canada. De son côté, l’opposition libérale, qui favorise aussi la laïcité, veut maintenir le crucifix à sa place actuelle. S’il y a élection, cela deviendra possiblement un des thèmes de la campagne électorale. Croyez-le ou non !

Pourtant la devise du Québec est : Je me souviens !

Claude Dupras