jeudi 30 mai 2013

Montréal : les transfuges et le plus bas soumissionnaire

La campagne électorale pour l’élection municipale de Montréal de novembre prochain approche à grands pas. Ce sera une longue campagne. Elle a vraiment commencé hier lorsque le candidat à la mairie Denis Coderre a démissionné de son poste de député libéral fédéral qu’il occupait depuis plus de seize ans à la Chambre des communes.

Comme à chaque année depuis le départ de Jean Drapeau en 1986, plusieurs conseillers municipaux sortant-de-charge ont de drôles attitudes, je devrais dire tristes. Ils cherchent à ajuster leur engagement futur aux circonstances politiques du moment et laissent tomber leurs allégeances passées. Pour des considérations purement électorales, ils s’allient avec le favori des sondages. Non pas pour des raisons politiques importantes mais simplement pour protéger leur avenir personnel, leur revenu et leur pension future.

Sous Drapeau, les conseillers du Parti civique de Montréal étaient solidaires du chef et du parti. Unis, ils ont été au pouvoir durant 30 ans et cela a été profitable pour Montréal qui a été transformée de fond en comble. Ils ont été les fondateurs du Montréal moderne.

Les succès du Parti Civique, qui a toujours été bien appuyé par une vaste majorité de Montréalais, sont la réponse à ceux qui cherchent à nous faire croire que l’intérêt de Montréal réside dans l’élimination des partis politiques municipaux. Il n’y en avait pas avant Drapeau et c’était la pagaille. Aujourd’hui, on parle d’équipe : « Équipe Coderre », « Équipe Bergeron.. ». On ne s’engage pas fermement, sauf bien faire… En somme, fini le programme de parti. Ce n’est pas fort ! La prochaine élection s’annonce pour être le summum d’un commerce d’images et d’illusions. Pauvres Montréalais !

Coderre a annoncé il y a quelques semaines que son équipe sera composée de 50% de transfuges et de 50% de nouveaux candidats. Depuis, son maraudage a du succès comme on l’a vu encore aujourd’hui lorsque trois maires d’arrondissement élus sous la bannière du parti Vision Montréal ont renié leur parti qui bat de l’aile pour annoncer qu’ils se représenteront dans l’« Équipe Coderre ». Je n’ai rien contre Coderre, au contraire je l’aime bien. Mais ce qu’il propose risque de déboucher, durant son mandat, sur du marchandage en coulisse par les conseillers qui voudront négocier leur vote pour obtenir ce qu’ils désirent.

Par ailleurs, Coderre a embrassé la proposition du maire sortant Gérald Tremblay qui blâme le principe du « plus bas soumissionnaire » pour les maux de collusion et de corruption de Montréal.

À mon humble avis, proposer une telle modification est une démonstration du manque de compréhension du système de soumissions publiques. Si, suite à un appel d’offres public, un corps public n’accorde pas le contrat au plus bas soumissionnaire qui a respecté toutes les exigences des documents de soumissions et des plans et devis du projet sur lequel il a soumissionné, à qui va-t-il l’accorder ?

J’ai été durant 45 ans ingénieur conseil en mécanique, électricité et pratiqué la gérance de travaux de construction pour des projets de bâtiments publics et privés. Toujours, nous avons procédé par soumissions publiques ou privées et accordé les contrats aux plus bas soumissionnaires. Nous respections ainsi les règlements et procédures du Bureau des Soumissions Déposées du Québec (BSDQ) qui a comme mission « de recevoir et d’acheminer des soumissions d'entrepreneurs spécialisés de l'industrie de la construction afin de permettre aux entrepreneurs généraux et spécialisés, et ultimement aux propriétaires, de bénéficier des bienfaits d'une saine concurrence par l'application d'un Code de soumission ».

Pour la gérance de travaux, nous procédions avec des appels d’offres, de même nature, par lots de construction qui correspondaient aux différentes spécialités (briqueteurs, plâtriers, maçons …). Pour être juste envers les donneurs d’ouvrages et les entrepreneurs-soumissionnaires qui dépensent des sommes importantes pour soumissionner et qui respectent toutes les exigences techniques et financières décrites aux documents, comment ne pas choisir le plus bas soumissionnaire conforme aux exigences de l’appel d’offres ? Si on n’agit pas ainsi, à qui accorder le contrat ? Après négociations avec un autre entrepreneur ? Lequel ? Non, ce n’est pas équitable et ça peut devenir une porte ouverte à la corruption. Voilà pourquoi je ne comprends ni le maire Tremblay ni Denis Coderre de venir proposer une voie autre que ce principe du plus « bas soumissionnaire » qui a fait ses preuves.

Du côté du génie civil, c’est la méthode de demande de prix qui a été fautive dans le passé et qui a créé tous les problèmes découverts par la Commission d’enquête Charbonneau. Les plans et devis de génie civil doivent être bien préparés par des professionnels expérimentés, toutes les données en rapport avec les conditions existantes du sol et autres services doivent être clairement décrites et détaillées, des règles équitables et uniformes doivent être définies afin que chaque entrepreneur qui le désire puisse soumissionner un prix ferme. Il faut aussi, comme c’est le cas pour l’industrie de la construction régie par le BSDQ, ouvrir les soumissions à tous les entrepreneurs québécois et non pas en limiter le nombre sur la base de territoires. Et cela est possible. En suivant rigoureusement une telle méthode, on ne peut qu’accorder le contrat au plus bas soumissionnaire. Sinon, on fait quoi ?

Pour assurer de bons résultats, il restera aux gouvernements, aux villes et autres donneurs d’ouvrages à régulariser et améliorer les procédures de dépôt de soumissions pour assurer qu’il n’y a pas de système de collusion entre les entrepreneurs. Celui-ci est facilement détectable si on veut se donner la peine de le détecter. Ainsi la concurrence sera assainie et le grand public en profitera.

Claude Dupras

mardi 21 mai 2013

Hollande, la crise, l’avenir

Je viens de terminer la lecture du long texte de l’allocution du président français François Hollande à sa conférence de presse semi-annuelle. C’est un document intéressant qui fait état de ce que le président à réaliser et veut faire.

Il a résumé sa première année avec une mer de mots, démontrant, en fait, que sa promesse de croissance est devenue une austérité sévère. La conséquence : la France souffre. Son économie stagne. Elle perd des parts du marché mondial. Plusieurs de ses importantes entreprises réduisent leur production ou ferment tout simplement. Son chômage est record. Sa productivité ne s’améliore pas. L’innovation n’est pas au rendez-vous. Le moral des Français est bas. La misère s’installe. La France est en récession. « Moi, président » s’avère être un homme de grands discours mais de peu d’actes productifs. Un chef en chute libre et déjugé par les Français. Un irréaliste.

Pourtant la France est forte de son peuple. C’est le pays du TGV, d’Airbus, du nucléaire, du Concorde, le pays de Pasteur, de Braille, des frères Lumière, de Michelin et, depuis toujours, d’inventeurs et d’innovateurs de toutes sortes qui par leur intelligence et leur travail ont contribué à changer le monde. C’est un pays d’individus racés, forts, travaillants et compétents. C’est le pays de l’excellence : mode, restauration, vin, architecture, de la qualité de vie... des droits de l’homme. C’est un des premiers pays de tourisme. Et je pourrais continuer pour démontrer qu’il n’a rien à envier aux autres, au contraire.

La France est la deuxième économie de l’Europe, après l’Allemagne. Par rapport à cette dernière, les statistiques indiquent que tous travailleurs confondus, le nombre d’heures travaillées en France est supérieur, la France est plus productive, les salaires augmentent plus vite, la consommation est moins taxée, l’impôt sur les sociétés est similaire, le taux de naissances est fortement supérieur, la politique familiale est beaucoup plus généreuse, l’assurance-maladie est pour tous, l’indemnisation du chômage est plus élevée, l’âge du départ à la retraite est plus bas de 5 ans, les propriétaires sont plus nombreux, le nombre des pauvres est plus bas, et encore…

Mais là où l’Allemagne gagne des points sur la France c’est sur sa croissance qui est supérieure, son déficit public qui est moindre, sa compétitivité qui est au rendez-vous, son exportation qui est plus forte, son coût de la main d’œuvre qui est légèrement plus bas et les moyens alloués à l’accompagnement et au suivi des demandeurs d’emploi qui sont plus importants. Tout ça débouche sur un taux de chômage de beaucoup inférieur à celui de la France.

Pour l’an II, Hollande dit vouloir viser particulièrement ces problèmes et propose, à nouveau, beaucoup d’idées. Le président a élaboré les priorités de son gouvernement dans un projet qu’il qualifie de « l’offensive » (vive les créateurs d’images). Mais, ce dernier ne résiste pas à la critique de plusieurs, dont l’Allemagne, puisqu’il ne s’attaque pas vraiment aux maux de son pays: chômage des jeunes, assouplissement du marché du travail, réduction du train de vie de l'État et notamment du nombre de fonctionnaires, refonte des systèmes sociaux jugés trop généreux et report de l'âge de la retraite. Le président n’arrive pas à frapper le clou sur la tête.

De plus, il n’aborde pas « the big picture » comme diraient les américains.

L’Europe vit sa crise économique depuis 4 ans. Certains blâment cette crise sur l’euro. Ils oublient que la construction de la zone euro fut plus politique qu’économique et qu’avec une structure institutionnelle insuffisamment forte, l’Europe n’a pu réagir effectivement dès le début de la crise. Aussi, depuis son existence, elle ne génère pas de croissance.

Son problème réside, à mon avis, dans la gouvernance de l’Europe qui n’est pas suffisamment centralisée pour être forte comme elle devrait l’être.

La France a été à la base de la création de l’entente européenne. Elle est le deuxième pays en importance de la zone euro et un des rôles importants de son président est d’assurer la force de l’Europe puisqu’il y va de l’intérêt de son propre pays. Au lieu de gêner l’Allemagne en la blâmant pour ses propres déboires, la France devrait plutôt la convaincre de renforcir, avec elle, l’Europe en persuadant tous les États composants à s’unir davantage pour mieux travailler ensemble et être en mesure de s’entraider afin d’enrayer les crises économiques futures.

Pour combattre la crise, les USA ont stimulé leur économie en y investissant massivement dès le début. De son côté, l’Europe, n’ayant d’autres choix que le sérieux budgétaire, a joué la carte de l’austérité. Alors que les USA en sont sortis, les grecs, les espagnols, les portugais, les italiens et même les français ont souffert et souffrent énormément du fléchissement de l’activité économique de leur pays. Contrairement aux Européens, les Américains ont géré la valeur externe de leur dollar, ont planifié le contrôle de leur économie et ont utilisé les budgets fédéraux pour ce faire. L’Europe n’a pu agir ainsi car ni ses richesses, ni ses dettes ne sont regroupées. En plus, elle ne peut taxer.

Les liens financiers serrés entre les USA et l’Europe font en sorte que l’économie américaine sera affectée si la crise économique européenne continue de s’aggraver. Les Américains craignent aussi que des crises sociales en découlent et que la stabilité politique de certains pays soit alors en danger. Ils veulent éviter cela à tout prix. Si la zone euro perdait un membre comme la Grèce, ils croient que ce serait difficile pour l’Europe mais qu’elle pourrait s’en sortir. Mais si c’est un pays plus important comme l’Italie ou l’Espagne, ce serait un choc qui pourrait s’avérer fatal. En somme, l’Europe est aussi forte que son maillon faible.

La situation actuelle démontre l’inefficacité de la politique économique européenne et découle du manque d’intégration de la politique des pays européens. Malheureusement, une intégration réelle n’est pas pour demain. Et, c’est là que réside un des vrais défis des pays de l’Europe et du président français s’ils veulent assurer un avenir stable à leur propre pays.

À court terme, comme solution, certains économistes américains proposent une union bancaire USA-Europe et l’imposition d’une taxe commune pour garnir une cagnotte assurant un appui financier important au moment où un pays devient en détresse. En somme, les pays occidentaux se protègeraient mutuellement et éviteraient de possibles remous sociaux importants issus de la souffrance de leur peuple. Tout comme lors des deux guerres mondiales. C’est une idée pratique qui mérite d’être bien analysée par la France qui pourrait en devenir la promotrice. Voilà, à mon avis, un autre vrai défi pour François Hollande.

En résumé, un des rôles primordiaux du président français dans la crise actuelle est de bien gérer son pays et de trouver les incitations capables de le relancer économiquement en encourageant les entrepreneurs de croissance. Mais plus important encore, pour le long terme, c’est de travailler avec les autres gouvernements européens pour produire des réformes fortes, significatives et communes afin que l’Europe unie soit capable de bien contrôler son avenir.

Claude Dupras

dimanche 12 mai 2013

Le souffre-douleur montréalais

La démission du maire de Montréal Gérald Tremblay fut émotionnelle et difficile pour lui. Plusieurs témoins à la Commission d’enquête Charbonneau avaient entaché indélébilement sa réputation au point qu’une bonne partie de la population était devenue embarrassée de le voir à la tête de la ville.

Le gouvernement du Québec, qui aime suivre le vent, se transforma en arnaqueur de la démocratie montréalaise et l’encouragea à renier les responsabilités que le peuple de Montréal lui avait confiées. Cet homme émotif, toujours accessible et réceptif, fut touché droit au cœur par le manque de soutien du gouvernement. À contrecœur, il tira sa révérence et sortit la tête basse de la vie publique, alors qu’il méritait de la tenir haute jusqu’à la fin de son mandat.

Gérald Tremblay arriva à la mairie de Montréal au moment où la ville avait à faire face aux plus grands défis structurels de son histoire. Même plus importants que ceux de l’ex-maire Jean Drapeau qui avait réussi à faire abolir les classes de conseillers municipaux A, B et C dans les années ’60.

Les 28 municipalités de l’île de Montréal s’apprêtaient à s’unir en une ville. Tremblay travailla ardemment pour cet objectif qui fut atteint. La structure organisationnelle de Montréal devait être refaite et un travail gigantesque, herculéen et d’une grande complexité attendait le nouveau maire.

En plus, Tremblay devait bien étudier, analyser des documents et des projets en vue de réunions du comité exécutif, du conseil municipal, de la mairie de l’arrondissement Ville-Marie (où il était aussi maire) et de l’agglomération montréalaise. À celles-ci s’additionnaient de multiples rencontres et des participations à des évènements de toutes sortes, locaux, provinciaux, nationaux et internationaux, où il représentait les Montréalais. Il devait aussi recevoir à l’hôtel de ville tous les personnages importants qui se présentaient à la mairie pour offrir leurs hommages, où en recevoir, et signer le livre d’or, tels : chefs d’états, ambassadeurs, consuls, équipes sportives, artistes, hommes et femmes politiques, etc… Il devait être à l’écoute des doléances particulières d’investisseurs, de promoteurs, de chefs d’entreprises, de syndiqués, et encore... Cette liste, non-exhaustive, démontre le grand nombre d’activités du maire de Montréal qui lui requièrent beaucoup de temps.

Alors que la ville unifiée prenait enfin ses premiers ébats sérieux, voilà que deux ans plus tard le gouvernement vota une nouvelle loi donnant aux villes fusionnées la possibilité de se dé-fusionner. Quinze choisirent de partir. Montréal dut alors être réorganisée et le maire Tremblay se remit à la tâche pour repenser la nouvelle structure, la définir et la mettre en marche. Encore une fois du très gros boulot.

À sa première élection, le maire Tremblay créa un parti politique Union-Montréal, une coalition hétéroclite de politiciens des banlieues dont le maire de St-Léonard, Frank Zampino, comptable agréé. À ce moment-là, dans plusieurs milieux, on doutait de la probité de l’administration de St-Léonard.

Homme d’équipe, le maire Tremblay, reconnaissant l’immense travail qui s’annonçait, décida que le prochain président de l’exécutif, son comité et le directeur général de la ville, se verraient confier les responsabilités de bien gérer la machine administrative de la ville de Montréal.

Homme d’une valeur exceptionnelle et d’une honnêteté légendaire, avocat à 20 ans, MBA d’Harvard Business School, professeur aux HEC, ex-président de la SDI, ex-député d’Outremont, ex-ministre de l’industrie du Commerce et de la Technologie, membre d’importants conseils d’administration dont l’Hydro-Québec et la Caisse de Dépôts et de Placements du Québec, homme dévoué à aider les jeunes promoteurs et leurs entreprises, nouveau maire de Montréal, Gérald Tremblay avait à choisir le nouveau président de l’exécutif et les membres de ce comité.

Aveuglé par on ne sait quoi, au point de ne pas être alerté par les rumeurs d’actions louches qui émanaient de l’administration Frank Zampino de la ville de Saint-Léonard et de l’entourage de celui-ci, Gérald Tremblay mit toute sa confiance dans ce dernier et le nomma au poste-clef de président. Ce fut là son erreur.

Depuis qu’il a quitté la ville, il mérite mieux que les blâmes que j’entends et le cynisme que je perçois de la part de trop de ses anciens commettants. Durant sa gouverne, nonobstant tous les scandales qui l’affligent et qui pointent vers Zampino et sa gang, la ville de Montréal s’est agrandie et a été transformée pour le mieux, dans d’innombrables domaines.

A son départ, il a affirmé : « Je ne vous ai jamais trahis ». Je le crois et je suis persuadé qu’avec le temps, les Montréalais et les Montréalaises reconnaîtront son mérite, particulièrement, au mois de juin prochain, lors de la tenue du Grand Prix du Canada à Montréal, évènement, parmi d’autres, qu’il a su récupérer pour sa ville.

Claude Dupras

mercredi 1 mai 2013

Que les firmes de génie coupables soient punies !

J’ai été ingénieur-conseil durant plus de 40 ans. J’ai vécu la naissance du génie au Québec, particulièrement celle des firmes francophones. Ma promotion de 1955, comptait 105 ingénieurs, la première fois que Polytechnique en produisait plus de 100.

Nous étions à peine quelques années avant la révolution tranquille qui viendra tout changer. De l’hydroélectricité, aux écoles secondaires et polyvalentes, aux cegeps, aux hôpitaux gouvernementaux, à la modernisation du système routier à la relocalisation d’une grande partie de la population dans la couronne métropolitaine, et encore, tout découlait de la révolution tranquille. D’un coup, le besoin de services d’ingénieurs conseils éclata. C’est ainsi que de cette promotion plus de 10 nouvelles firmes d’ingénieurs conseils prirent naissance, dont la mienne devenue Dupras Ledoux, Desjardins Sauriol (devenue Dessau), Gendron Lefebvre, etc..

Ma firme était spécialisée en mécanique et électricité de bâtiments, gérance de travaux et informatique avec un personnel variant de 50 à 100 individus. On qualifie aujourd’hui une telle firme de « petite firme ». Depuis 15 ans, j’ai l’ai quitté pour la retraite et mes autres occupations. Elle demeure toujours active.

Pour dénicher des contrats, nous devions nous faire connaître professionnellement pour obtenir des nominations, présenter multiples applications aux commissions scolaires, aux villes, au gouvernement, aux CA des hôpitaux, etc… avec le CV des employés de la firme et la liste de ses réalisations. Et malgré de petits budgets de relations publiques nous avons réussi, petit à petit, à obtenir des mandats de plus en plus importants, ici et là, dans les domaines privé et public.

La commission d’enquête Charbonneau sur la construction dévoile que des systèmes de collusion et de corruption inimaginables étaient en place dans le domaine public. Encore hier, un témoin dénommé Gilles Cloutier, qui se présente comme un organisateur hors pair pour élections municipales, est venu expliquer comment il a réussi à faire élire les maires et les conseillers municipaux de dizaines de villes et villages du Québec. Pour atteindre ses fins, il utilisait des méthodes irrespectueuses des lois électorales. Il a admis avoir été mandaté pour ce faire, à tour de rôle, par deux firmes d’ingénieurs-conseils : Dessau et Roche.

Cloutier offrait (il garantissait presque) aux aspirants-candidats à la mairie et au conseil des villes impliquées, de les faire élire en organisant leur campagne électorale avec la méthode clef-en-main (financement, organisation, publicité etc.) et cela gratuitement à la condition qu’ils s’engagent, une fois élus, d’accorder durant leur mandat, sans soumission ou autrement, tous les travaux municipaux nécessitant un travail de génie civil à la firme d’ingénieurs-conseils qui avait retenu ses services.

Non seulement, ces firmes nommées semblent avoir triché en œuvrant pour la ville de Montréal et avoir participé illégalement au financement des partis politiques du Québec dans le but d’obtenir des contrats publics, elles se sont abaissées, selon les dires de Cloutier, à devenir des fossoyeurs de la démocratie en mettant sur pied et en finançant des stratagèmes électoraux illégaux.

En aparté, Cloutier a fait des déclarations ayant rapport avec du financement illégal qu'il aurait collecté lors de la campagne référendaire de 1995 sur la séparation du Québec de l’ensemble canadien. On se rappellera quelle fut gagnée de justesse par le NON. Les souverainistes-indépendantistes-séparatistes accusent, depuis ce jour, le clan du NON de leur avoir volé le pays Québec. Ils rappellent la déclaration du premier ministre Parizeau, le soir du vote, qui blâma les « ethnies et l’argent » pour la défaite de son option et pour laquelle il a essuyé des reproches sévères. Les déclarations de Cloutier viennent confirmer en partie l’opinion de Parizeau et renforcent la hargne des séparatistes envers les fédéralistes, tout en allant à l’encontre de la bonne entente au Québec. Encore-là, il a rendu un mauvais service.

Les exemples précédant l'aparté, ajoutés à tous les autres donnés depuis le début de l’enquête, sont intolérables. À mon avis, toutes les firmes qui les ont générés et qui seront reconnues coupables par la loi, devront être punies. Que faire ?

Voici ma suggestion :

Premièrement, l’Ordre des Ingénieurs doit agir, enquêter et suspendre tous les ingénieurs qui de près ou de loin ont participé à ces illégalités. C’est une question de déontologie et de protection de la société.

Deuxièmement, ces firmes devraient perdre le droit de soumissionner pour une période de cinq ans sur tous les projets directs et indirects, financés par le gouvernement, où la collusion a été démontrée. Si une ou l’autre des firmes perd des mandats et se réveille avec du personnel en surplus, que ces ingénieurs spécialisés et compétents créent leur propre de « petites firmes » et obtiennent des mandats à leur compte.

La réalisation des plans et devis et la surveillance des travaux de 90 % des travaux publics peuvent être faits par les « petites firmes » spécialisées. C’est un mythe de penser que nous avons besoin au Québec de « grosses firmes » fourre-tout de 2 000 à 20 000 employés pour la réalisation des projets de construction publics. Ces firmes sont trop grosses, leur pouvoir n’a pas de limite et elles bousculent les petites firmes compétentes par leurs manèges et leur gros budget de développement des affaires.

Les « grosses firmes » pour les projets internationaux et certains très gros projets locaux, c’est bon, mais chez nous, il faut reconnaître davantage la valeur des « petites firmes » et bien les utiliser. Normalement, les clients sont très bien servis par ces dernières car leurs patrons s’impliquent personnellement dans la réalisation de leurs projets. Il est bon de rappeler ici, que dans le domaine privé, les grands projets sont souventes fois réalisés par les « petites firmes ».

Troisièmement, ces firmes devraient payer une amende égale au montant total des crédits d’impôt accordés par le gouvernement à tous les prête-noms qui ont participé à cette illégalité. En plus, chacun de ces prête-noms devrait rembourser personnellement aussi les crédits d’impôts dont il a bénéficié. Ainsi, le gouvernement recevra la presque totalité des montants versés et tous ceux qui ont participé à ce stratagème seront punis.
Par contre, les partis politiques qui ont reçu ces contributions ne devraient pas être obligés de les rembourser. Ils ne peuvent être blâmés par ce stratagème imaginé et mis en place par les firmes et les contributeurs. L’argent est dépensé et les sommes sont si mirobolantes qu’un remboursement nuirait à la solidité financière des partis politiques.

Quatrièmement, les firmes de génie ayant travaillé pour Montréal et faisant partie de la collusion du partage des contrats devraient rembourser 20% des honoraires supplémentaires qu’elles ont perçus sur les contrats exécutés pour la ville, puisque les coûts des travaux de la ville ont été augmentés, par tricherie des entrepreneurs, de 20% à 30% par rapport aux coûts normaux et qu’ils n’ont rien dit.

Cinquièmement, il serait sensé que tous les dirigeants actuels de ces firmes et les membres de leur conseil d’administration soient renvoyés pour une période de 5 ans et remplacés par des individus dont la compétence et la probité est reconnue.

Si on n’agit pas radicalement et vite, on verra dans quelques années la tête de l’hydre ressurgir.