samedi 28 février 2015

La France, le Québec et la laïcité


Éric Zemmour, essayiste, journaliste et polémiste français, a écrit un livre qui connaît actuellement un succès extraordinaire en France, « Le suicide français ». Je viens tout juste d’en terminer la lecture et il m’a appris pourquoi la France d’aujourd’hui n’est pas la France d’hier. Il raconte l’histoire totale d’une déconstruction joyeuse, savante et obstinée des moindres rouages qui avaient édifié la France. Je le recommande fortement.
J’ai pensé traiter, à ma façon, d’un de ces rouages concernant la venue des maghrébins en France et ce qui en a découlé depuis leur immigration massive. J’y vois une situation similaire au Québec.
En 1905, la loi sur la laïcité est adoptée en France. Elle affirme que la République assure la liberté de conscience. Elle garantit le libre exercice des cultes.
Elle établit les règles sur la séparation des Églises et de l’État. Dans les écoles, entre autres, elle ne s’adresse pas aux élèves mais aux professeurs qui doivent maintenir la neutralité religieuse.
En 1958, la nouvelle constitution française précise la laïcité : La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l'égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d'origine, de race ou de religion. Elle respecte toutes les croyances.
Jusqu’en 1970, les prénoms des enfants sont français conformément à un calendrier contrôlé par le préfet, comme dans la Rome des romains. Ainsi Fatima pouvait être soit Catherine, Nathalie ou Françoise mais pas Fatima. Yehudi pouvait être Jean-Jacques, Charles ou Nicolas mais pas Yehudi. Et cela s’appliquait aussi aux enfants des nouveaux venus, arabes ou juifs maghrébins.
En septembre 1989, il y a à peine 26 ans, les Français sont sidérés. Ils ne savent pas comment appeler le voile : un tchador, un foulard, un morceau de tissu, un fichu… Deux étudiantes de 13 ans et 14 ans viennent d’être renvoyées d’un collège pour avoir refusé de l’ôter pendant les cours. L’évènement prend une ampleur nationale puis internationale. La gauche prend la défense des gamines. Une manifestation a lieu à Paris contre l’interdiction. Le PM Rocard et le ministre de l’éducation Jospin ne tranchent pas. Le Conseil d’État élabore une doctrine balancée qui concilie laïcité et liberté individuelle. Les juges du Palais-Royal estiment que « le port du voile islamique est compatible avec la laïcité s’il n’y a pas de menace pour l’ordre ou le fonctionnement normal de l’enseignement. Le Ministre met ses pas dans ceux des juges et publie une circulaire à cet effet.
Quelques années plus tard, en 1993, François Bayrou, le centriste devenu ministre de l’éducation, revoit la circulaire et fait la distinction entre signes religieux ostentatoires interdits et les autres autorisés. De plus, la loi est changée et dorénavant, les prénoms des enfants sont choisis par ses père et mère.
En 1996, la Cour Européenne des droits de l’homme confirme et décrète que : ..le prénom est un moyen d’identification… il revêt un caractère intime et affectif pour les parents et relève de la sphère de la vie privée. En fait, plusieurs y voient là, le passage de l’assimilation au multiculturalisme.  
En 2004, après 15 ans de tergiversations, le président Chirac ose interdire le voile islamique à l’école, faisant semblant d’inclure dans sa législation les croix trop visibles et les calottes portées par les enfants juifs. Personne n’est dupe ». Il croit que le pouvoir législatif ajouté à celui du judiciaire est en mesure de régler la question. Mais ce ne sera que deux grand coups d’épée dans l’eau car ces décisions ne respectent pas les règles de la loi sur la laïcité.
Le débat porte aussi sur le droit des femmes. Les grand-mères ont toujours eu dans le passé des fichus pour cacher leurs cheveux, traces de la passion érotique des méditerranéens. Pour plusieurs, la liberté et la dignité de la femme sont bien plus méprisées par la pornographie, la publicité et le cinéma.
En réalité, Chirac recherche l’assimilation. Par exemple, une règle non écrite mais respectée fait en sorte que les jeunes juifs doivent ôter leur kipa de leur tête et ranger leur étoile de David sous la chemise puisque toute manifestation de tout signe religieux est interdite dans l’espace public.
En 1980, cette pratique est abandonnée au bénéfice du Moi tout-puissant et de sa liberté individuelle. Les musulmans s’engouffrent alors dans leur société pour utiliser leur religion comme un manifeste identitaire leur permettant de retrouver une certaine puissance et une autonomie politique.
Pendant ce temps, la France ne se rend pas compte qu’elle perd la guerre du halal. Dans les quartiers, où la population musulmane devient majoritaire, cette dernière impose sa culture et son culte. Elle islamise tous les domaines de l’existence. Les boucheries halal se multiplient. Les mamans demandent des viandes halal à la cantine scolaire. Certaines matières de l’enseignement sont récusées comme le darwinisme, les croisades, la Shoah, Voltaire, l’infidèle Mme Bovary.. Le ramadan doit être respecté à l’école, les jeunes filles rabrouées par leur grand frère même si elles sont décemment habillées, etc… C’est une islamisation par le bas. Quelques décennies plus tard, après le regroupement familial, les émeutes, les marches, la sortie forcée des Français de certains quartiers, l’affaire des filles voilées, etc… la France en sort bouleversée. Plus elle s’oppose, plus elle est accusée de manque de bonne volonté et de racisme par les jeunes immigrés.
En fait, au nom de la liberté, une société totalitaire s’est instaurée dans la société française. Au nom des droits de l’homme, une nation dans une nation s’est érigée. La France est devenue multiculturelle. Depuis, elle s’adapte difficilement, veut, veut pas. Et tout ça, malgré sa loi sur la laïcité.
Aujourd’hui, au Québec, nous sommes au point où était la France avant 1905 et en 1958. On débat pour savoir si oui ou non notre Assemblée Nationale doit voter une loi de la laïcité. Pour plusieurs, c’est la solution à leur peur démesurée face au nombre croissant de musulmans dans notre société. D’autres affirment aussi qu’elle assurera l’égalité homme et femme. Pour un bon nombre, ils veulent imposer leur conviction athéiste. Tous donnent en exemple la loi de la laïcité de la France sans vraiment connaître son impact réel, son efficacité et sans avoir une démonstration concluante qu’elle a atteint ses objectifs.

Claude Dupras

samedi 21 février 2015

La campagne référendaire québécoise est lancée

Il faut le reconnaître, les séparatistes québécois ne sont pas des lâcheurs. Même après avoir subi une dégelée électorale, ils foncent à nouveau tête baissée vers leur objectif, sans tenir compte des erreurs qui leur ont fait si mal.

La principale fut d’avoir laissé entendre, en période électorale, qu’il y aurait un autre référendum pour séparer le Québec de l’ensemble Canadien. Le principal fauteur de cette erreur fut leur candidat-vedette, le milliardaire Pierre-Karl Péladeau (PKP), qui arriva sur scène le poing en l’air à la Lénine pour marquer avec force sa détermination séparatiste.

À ce moment-là, la campagne électorale du parti Québécois (PQ), qui se déroulait relativement bien, s’écroula subitement malgré l’excellente équipe de candidats que présentait la Première Ministre Pauline Marois. Le chat était sorti du sac. Marois ne put réaligner sa campagne, perdit l’élection, le pouvoir et démissionna.   
Aujourd’hui, au moment où se déroule la campagne à la chefferie du Parti Québécois (PQ), les sondages indiquent que 72% de la population votante n’est pas favorable à la séparation et que les jeunes de 18-24 ans, n’appuient pas le PQ, massivement.
PKP est candidat avec quatre autres dont les ex-ministres Bernard Drainville, Alexandre Cloutier et Martine Ouellet et un outsider Pierre Céré.  Malgré tout, PKP demeure le grand favori avec près de 60% d’appuis qui comprennent principalement les péquistes à tête blanche car les jeunes ne sont pas au rendez-vous. 
Le récent sondage CROP au Québec place PKP devant Couillard, advenant une élection. Les séparatistes qui ont toujours qualifié les sondages CROP de « bidon » s’en régalent aujourd’hui.
Mais en même temps, PKP perd des plumes dans son parti à cause de sa moche campagne, teintée d’erreurs de comportement et de stratégie. La dernière, l’affirmation de la possibilité qu’advenant une victoire du PQ à la prochaine élection, son gouvernement pourrait déclarer unilatéralement l’indépendance, sans référendum. Aux Québec, les élections sont gagnées avec 35% à 42% du vote exprimé alors qu’un référendum exige 50% +1. Les péquistes expérimentés savent bien qu’une telle élection est un accro intolérable à la démocratie et qu’aucun gouvernement du monde ne la reconnaîtra.
PKP a démontré à l’annonce de sa candidature qu’il était un mauvais orateur. Depuis, il ne s’est pas amélioré et il ne s’aide pas, non plus, avec le contenu de ses discours. Au sein de son parti, les épaules de ses auditeurs se haussent de plus en plus. Ils sont surpris de son manque d’habilité à s’exprimer avec conviction. Au récent conseil national du PQ, tous attendaient son discours. Il ne fut pas à la hauteur de ce moment important. Un journaliste présent a écrit : « il a parlé comme un jeune étudiant qui ne s’est pas préparé pour son examen oral. L’assemblée ne lui a réservé que des applaudissements polis ». Ailleurs, dans sa tournée des comtés pour chercher des appuis, il se veut éducateur et historien. Il fait appel à un discours patriotique pour toucher le cœur sensible de ceux qui l’écoutent. Il rappelle la conquête anglaise de la Nouvelle-France en oubliant le peu de support accordé par les rois de France à la colonie. Il souligne aussi les rébellions des patriotes de 1836-38 contre la milice britannique, les tensions politiques de l’époque et la proposition de Lord Durham pour assujettir les francophones à la domination vigoureuse d’une majorité anglaise afin de les assimiler. En somme, il cherche à rappeler certaines actions passées des anglais afin qu’aujourd’hui, pour creuser un fossé entre les anglophones et nous, nos compatriotes se révoltent contre les anglophones du gouvernement canadien actuel. En fait, cela est partie de notre histoire et n’a rien à voir avec 2015. Grâce à leur solidarité, nos pères ne se sont pas laissés faire et ont riposté en agissant pour que nous devenions ce que nous sommes. Un peuple fier, fort et autonome dans un grand pays indépendant qu’est le nôtre, le Canada.
Et il y a l’incident de Rouyn-Noranda. En tournée de campagne, il assista en fin de soirée à un concert de chansons anglaises donné par des artistes francophones du groupe pop montréalais Groenland. Soudainement, à la surprise de tous, il cria du fond de la salle « en français ». Le lendemain, sans excuse, il déclara « je suis un défenseur de la langue française », persista dans sa position et signa. Son porte-parole, insista pour dire que PKP n’était pas ivre et justifia sa bévue comme étant normale après une journée de cabale bien remplie. Ouais !
 
Ces situations surprenantes démontrent une stratégie revancharde, irrespectueuse et déplacée. Le moins que l’on puisse dire, c’est une approche mesquine envers les anglophones du Québec.
À cause de PKP, les rapports journalistiques des rencontres de candidats à la chefferie portent surtout sur la séparation du Québec. C’est devenu une enchère entre eux pour déterminer lequel a la meilleure façon d’aborder cette question. Pendant ce temps, heureux de la tournure des évènements, le PM Philippe Couillard se frotte les mains car il connaît le pouls de la population et sait qu’elle ne veut rien savoir d’un nouveau référendum.   
À la dernière assemblée générale du PQ, les dirigeants ont hésité à faire adopter des résolutions politiques expliquant que le nouveau chef devait imprimer sa marque sur le programme. Donc, ce que propose et dit PKP, qui deviendra vraisemblablement le chef, sera le prochain programme du PQ. Quelle différence avec le PQ d’hier dont les membres savaient se tenir debout. Certains, dont Jacques Parizeau,  ont même quitté la salle en protestation contre des éléments du discours de René Lévesque qui présidait la réunion. Ils l’ont humilié pour faire valoir leurs opinions.
Aujourd’hui, aveuglement, les péquistes suivent le joueur de flute PKP même si, malgré ses réussites impressionnantes en affaires, il ne démontre absolument pas, à ce jour, des qualités de chef d’État. Tellement désespérés de reprendre le pouvoir, ils mettent tous leurs œufs dans le même panier malgré son manque d’expérience politique. Il ne faudrait pas qu’il trébuche car, comme Perrette, ils diront  « adieu veau, vache, cochon, couvée…. ». Le rêve s’évanouira en un instant. Pourtant, ils ont d’autres bons candidats qui montrent de telles qualités comme le jeune Alexandre Cloutier qui, à 37 ans, a le même âge que Robert Bourassa lorsqu’il devint premier ministre.  
Les campagnes référendaires du passé dirigées par René Lévesque, Jacques Parizeau et Lucien Bouchard étaient basées sur des arguments sérieux qui découlaient de conflits et de débats importants avec le gouvernement fédéral tels les accords du lac Meech et de Charlottetown, de commissions gouvernementales nationales et québécoises, d’états-généraux de la nation et de toute une série d’autres de même nature issus des niveaux nationaux et provinciaux. Y participaient pour les péquistes, des individus de la trempe des René Lévesque, Jacques Parizeau, Lucien Bouchard, Jacques-Yvan Morin, Camille Laurin, Denis Lazure, Marc-André Bédard, Jean Garon, Yves Bérubé, Claude Charron, Lise Payette, Pierre Marc Johnson, Gérald Godin, Rodrigue Biron, Yves Duhaime, Denis Vaugeois, Denis de Belleval et des dizaines d’autres. Aujourd’hui, rares sont les individus de cette trempe dans le PQ.
Pour les remplacer, PKP veut créer « un think tank sur la séparation » dont il choisira évidemment les membres. Ils seront sûrement séparatistes puisque les conclusions devront aller dans le sens qu’il recherche. Elles seront contestées pour cette raison car les Québécois se méfieront d’un tel organisme.
Les fédéralistes de leur côté ne sont pas en reste non plus. Ils n’auront pas de Pierre Elliott Trudeau, Jean Chrétien, Paul Martin sur le plan fédéral, mais Stephen Harper et ses conservateurs, s’ils sont encore au pouvoir. Pas fort pour défendre le système fédéral dans un référendum québécois.
Pauvres Québécois ! Il me semble que nous avons donné souventes  fois nos opinions sur la question de la séparation du Québec et que les sondages scientifiques démontrent qu’elles n’ont pas changé. Nous avons tellement d’autres problèmes importants à régler, pourquoi devons-nous nous faire rabâcher les oreilles avec les mêmes rengaines. Assez, c’est assez ! Non ?
La meilleure situation pour le PQ serait que PKP ne gagne pas. Les raisons sont celles de son écrasante défaite à la dernière élection qui a permis au parti Libéral de gagner une majorité inattendue. Les mêmes débats ajoutés à la question de conflits d’intérêts (l’ex-ministre Lisée l’a bien démontré) donneront le même résultat électoral ou pire.
Claude Dupras