vendredi 28 novembre 2008

Un coup bas d’Harper

Le PM canadien Stephen Harper et son gouvernement conservateur viennent de déposer un budget révisé à la Chambre des Communes où les députés seront appelés la semaine prochaine à l’adopter. J’ai été surpris de constater que ce document n’est pas à la hauteur des dangers qui nous menacent. Pour se défendre de son inaction, le ministre des finances promet que les vraies mesures feront parties du budget de la prochaine année financière du gouvernement.

Ce qui est surprenant dans le document déposé est que le gouvernement conservateur veut éliminer immédiatement les subventions annuelles de l’État versées aux partis politiques pour financer leurs activités. C’est une économie de 27 millions de $. Ce montant est ridicule comparé aux 400 millions de $ qu’Harper vient tout juste de dépenser inutilement en imposant la dernière élection générale simplement parce qu’il voulait obtenir une majorité parlementaire. Il ne l’a même pas eue et les Canadiens sont revenus à la case de départ plus appauvris.

Cette décision machiavélique du PM fera très mal à ses adversaires politiques. Le parti Libéral du Canada perdra 8 millions de $, le NDP 5 millions $, le Bloc Québécois 2,5 millions de $, et les Verts 1,8 millions de $. Tous ont besoin de ces montants pour maintenir en opération leur secrétariat, leur département de recherches et suffire aux dépenses de voyagement du chef et des autres principaux leaders de leur formation. Il est grand le Canada et tous sont en dette suite à la dernière élection générale. Le parti Vert ne pourra continuer. Quant au Parti Conservateur qui perdra 10 millions de $, il n’a pas de dette et ses coffres sont remplis à craquer.

C’est l’ex-PM Jean Chrétien qui a changé la loi du financement des partis. Avant, les partis devaient trouver les fonds eux-mêmes et il n’y avait pas de limites aux dons qu’ils pouvaient recevoir. La nouvelle loi les limite maintenant à $5,000 alors que jadis les banques contribuaient 75,000 $ et plus à chacun des grands partis. Les grandes corporations et les entrepreneurs importants y allaient aussi de grosses contributions. Chrétien a voulu assainir tout cet aspect de la politique et a instauré le financement des partis par l’État. C’était une mesure de saine démocratie qui visait en plus à éliminer les réseaux d’influence malsains qui bénéficiaient de faveurs liées directement à l’importance de leurs contributions comme ce fut le cas avec le scandale des commandites.

Le Parti Progressiste-Conservateur du Canada n’a pas eu de problème avec la loi Chrétien car durant le règne du chef Robert Stanfield, il avait instauré, durant les années ’70, un système de sollicitation de fonds par la poste qui s’avéra à la longue des plus payants. J’ai été nommé par le chef qui suivit, Joe Clark, vice-président du Fonds PC du Canada qui avait la responsabilité des finances du parti PPC et j’ai donc pu apprécier de près l’efficacité de ce système de collecte de fonds. Les débuts ont été difficiles car il s’agissait de dresser une longue liste de donateurs prêts à contribuer régulièrement, sur demande, de petits montants pour aider le parti.

Le Fonds PC achetait alors constamment des listes d’adresses de Canadiens venant de toutes sortes d’organisations nationales, provinciales ou locales et sollicitait par la poste toutes les personnes dont les noms figuraient sur ces listes. On parle de centaines de milliers de noms. Une petite fraction de ces gens répondaient, contribuaient et chacun d’eux devenait automatiquement membre de la liste des donateurs au parti. Aujourd’hui, des milliers de personnes figurent sur cette liste et répondent positivement aux appels du parti. D’autant plus qu’une loi permet qu’une partie des contributions soit déductible des impôts. C’est très efficace et fort rémunérateur. Le PC d’aujourd’hui a cet avantage sur le parti libéral car il a commencé dans les années ’70 à établir son système tandis que les libéraux débutent à peine suite à la loi Chrétien. Lorsque le réformiste Stephen Harper a fusionné son parti avec le PPC pour devenir le parti Conservateur du Canada, il a mis la main sur le système de sollicitation par la poste (devenue aussi par internet) du PPC. Ajouté au système de financement populaire de l'ex-Reform Party, le PC a depuis tout l’argent qu’il veut.

La décision du PM Harper de couper les fonds aux partis politiques est un geste antidémocratique car il sait très bien que ses adversaires auront des difficultés immenses à survivre, d’autant plus qu’il est reconnu que les partis d’opposition reçoivent beaucoup moins d’argent des contributeurs que le parti au pouvoir. C’est justement la raison d’être des lois de financement de partis qui visent à égaliser les chances de chacun. Le PM Harper profite de la situation avantageuse de son parti pour nuire considérablement aux autres partis tout en implantant son idéologie de droite. C’est malhonnête. Sa décision va à l’encontre de ce qui est recherché aujourd’hui : elle ajoute au chômage car les partis devront couper du personnel alors que les nouvelles mesures politiques doivent injecter des fonds pour créer des emplois.

Le PM Harper croit que les partis d’opposition sont coincés car il estime qu’ils ne voudront pas le renverser et imposer une nouvelle élection générale aux Canadiens. C’est vrai que nous ne voulons plus d’élection pour un bon bout de temps. Mais il y a une autre solution. Si le gouvernement est battu en Chambre et démissionne, la Gouverneur Général peut choisir un autre parti pour former un gouvernement. Vu les circonstances de la crise économique qui s’aggrave, les progressistes (le parti libéral et le NDP) pourraient s’unir pour former une coalition et la Gouverneur Général faire appel à cette nouvelle entité pour diriger le pays. Même plus, pourquoi le Bloc Québécois n’en ferait-il pas partie? Ce sont tous des députés du Québec et ils peuvent sûrement suspendre leur idéologie séparatiste, pour une période de temps, à cause des effets de l’économie mondiale sur les Québécois et entrer dans cette coalition où ils trouveraient sûrement place pour leurs idées.

Ce n’est pas facile d’être conservateur ces jours-ci.
Claude Dupras

jeudi 27 novembre 2008

L’erreur de Pauline Marois

La chef du Parti Québécois, Pauline Marois, vient de prendre une décision qu’elle regrettera sûrement. Dès le début de la présente élection, elle et ses stratèges avaient décidé de ne pas parler de souveraineté durant la campagne électorale parce que le sujet n’était pas populaire et que la question économique dépassait de beaucoup toutes les autres. Mais, surprise, voilà qu’au « débat des chefs » Pauline Marois a décidé d’aborder soudainement le sujet, en affirmant que la séparation du Québec du Canada était le remède à tous les maux actuels et futurs des Québécoises et Québécois.

Au lendemain du débat, en réponse aux questions des journalistes, elle a nié avoir relégué aux oubliettes le sujet de la séparation du Québec et omis volontairement d’en parler depuis le début de la campagne électorale. Cela n’est pas exact et tout le monde le sait. Pourquoi a-t-elle changé de stratégie ? Est-ce parce qu’elle traîne de 10-13 points dans les sondages derrière le PM Jean Charest ? Est-ce parce que le parti libéral se dirige vers une majorité de députés à la prochaine assemblée nationale du Québec ? La réponse est évidente : sa stratégie originale ne fonctionnant pas, elle la change pour une nouvelle.

Pauline Marois revient donc au sujet qui est la raison d’être du Parti Québécois : la séparation du Québec de l’ensemble canadien afin que notre province devienne un pays et puisse exercer une souveraineté totale sur son territoire. Elle se sentira mieux ainsi car elle y croit sincèrement. Elle fera une meilleure campagne électorale, sera plus naturelle et plus efficace. Elle revigorera ses troupes qui n’aimaient pas l’allure de sa campagne à ce jour. Elle rassemblera les « purs et durs » qui la critiquaient. Pour les séparatistes, c’est enivrant. Et dire qu’elle a créé un précédent dans l’histoire du Parti Québécois en refusant d’accepter, pour cette élection, la candidature d’un ancien député à la mise en nomination de son comté parce qu’il voulait à tout prix parler de séparatisme.

Le malheur pour elle c’est que 70% des Québécois ne veulent pas de la séparation. Face au tsunami mondial qui engloutira l’économie québécoise durant au moins les deux prochaines années, ils savent que le temps n’est pas au changement radical que propose Pauline Marois. Au contraire, ils veulent que les gouvernements fédéral et provinciaux du pays s’unissent pour les aider à traverser la tempête. Ils veulent travailler et maintenir leur mode de vie.

En rouvrant le débat constitutionnel, Pauline Marois trouvera un Jean Charest redynamisé sur son chemin. Alors que ce dernier était dans la position d’un PM sortant-de-charge sur la défensive pour refuter les accusations et les insinuations venant de toutes parts, voilà que Pauline Marois et le parti Québécois lui offrent une belle opportunité. Il expliquera que ceux-ci ne comprennent rien aux problèmes réels de leurs compatriotes québécois puisque qu’ils proposent une solution radicale et irréaliste au moment le moins opportun économiquement de l’histoire moderne du Québec.

Lors du débat, au lieu d’expliquer clairement son programme politique et de critiquer objectivement le gouvernement Charest, elle a passé son temps à lancer des phrases chocs qui ne voulaient, en fait, rien dire : « Moi, je respecte mes promesses », répétait-elle à outrance, « Il (en parlant de Charest) dit n’importe quoi » lorsqu’elle ne pouvait le contredire. En plus, elle a ouvert toute grande la porte au débat constitutionnel et à la séparation du Québec et démontré qu’elle ne comprend pas l’envergure de la crise économique mondiale qui aura pour effet de réduire appréciablement la qualité de vie des Québécois et Québécoises. Elle vient de mettre fin à tous ses espoirs de gagner la présente élection.

Claude Dupras

lundi 24 novembre 2008

L’enjeu réel

Les Québécois pensent que l’enjeu de l’élection générale du 8 décembre prochain est la santé et les services médicaux du Québec. Il est vrai que depuis plusieurs décennies ça va mal de ce côté-là. Attentes de 6-8 heures dans les salles d’urgence des hôpitaux, difficultés pour plusieurs d’avoir un médecin de famille ou de consulter un spécialiste, salles d’opération fermées… Certes, il y a eu des améliorations, mais le problème demeure entier.

La diminution radicale du nombre d’infirmières et de médecins, la fermeture de classes des écoles infirmières et l’imposition de quotas à la baisse imposés aux facultés de médecine, au début des années 2000, se fait encore sentir. Ce ne sont pas les facilités hospitalières qui sont inadéquates, c’est le manque de personnel médical compétent pour prendre soin de nous qui fait que le Québec souffre toujours du manque de services normaux.

Cependant, ce que les Québécois doivent réaliser, c’est que l’enjeu réel de cette élection n’est pas le problème de la santé, mais, et de beaucoup, la crise économique qui est arrivée. Oui, elle est là ! Je le répète car je suis abasourdi de constater que tant de Québécois et Québécoises ne réalisent pas que la situation est grave même si un très grand nombre d’entre eux ont vu fondre l’argent de leur régime de retraite à cause de la baisse des Bourses.

Contrairement à ce qui se passe aux USA ou dans d’autres provinces canadiennes, j’ai l’impression qu’ici les consommateurs se sentent immunisés au danger et à la menace du tsunami économique qui s’élève à l’horizon. En effet, peu d’habitudes changent malgré que tout commence à s’écrouler autour de nous : les loyers augmentent encore, le prix des maisons se maintient, augmente même à certains endroits car il y a encore des acheteurs; les ventes d’autos neuves ont augmenté; l’emploi a même crû légèrement en octobre, le prix des aliments croît, etc. Nous vivons dans une bulle qui de toute évidence est irréelle et qui nous éclatera en plein visage. Il est temps que nous enlevions nos lunettes fumées.

Malgré que le dollar canadien ait été déprécié par rapport à l’US dollar, que le prix du pétrole ait diminué de la moitié et que le taux d’inflation ait baissé, nos manufacturiers dans presque tous les domaines voient leur carnet de commande s’assécher car les Américains n’achètent plus à cause de la grave crise économique qui les frappe de plein fouet. L’effet se ressent à Montréal mais il s’est surtout fortement accentué en région. Des mises à pieds sont de plus en plus annoncées. Aux 130,000 jobs déjà perdus dans le domaine manufacturier au Québec s’en ajoutent tous les jours de nouvelles centaines. De plus, un nombre important de commerçants qui desservaient les familles de ces travailleurs remercient un gros pourcentage de leur personnel et envisagent sérieusement de fermer leur entreprise.

La chute des prix de nos ressources naturelles, minerais et bois, est étourdissante et c’est à se demander si quelques compagnies exploitantes ne feront pas simplement faillite. En tout cas, l’effondrement de la valeur de leurs titres à la bourse n’est pas rassurant. Et si l’inflation continue sa descente, les économistes nous annoncent une diminution de la production qui se traduirait par davantage de mise-à-pieds. Il semble que nous soyons coincés de tous les côtés.

Le PM Charest a justifié le déclenchement de cette élection en invoquant les menaces de la crise économique et l’importance d’avoir les bonnes personnes à la tête de notre gouvernement pour y faire face. Malheureusement, depuis le début de la campagne électorale, Charest et surtout les autres chefs, parlent peu de cet important objectif initial. Profitant de l’indifférence des électeurs, ils se plaisent, tour à tour, à nous embêter avec des détails de petite politique mesquine. Cela doit cesser car cette élection, dans les circonstances mondiales actuelles, devient très importante pour nous. Il est temps que nous nous réveillions tous et réalisions vers quoi nous nous dirigeons.

Même le PM canadien Harper vient de se réveiller. Après nous avoir endormis durant la dernière campagne électorale fédérale en nous berçant pour nous faire croire que le Canada n’était pas en danger malgré le déferlement de la crise économique américaine, voilà qu’hier il a admis que le pays se dirige directement et rapidement vers une récession, qu’elle durera longtemps et que s’il n’agit pas vite, il est possible qu’elle se transforme en dépression. Et çà, ce n’est pas drôle pour personne !

Alors, Québécois et Québécoises, ressaisissons-nous et réfléchissons au réel enjeu de la présente campagne électorale. Oui, la qualité des soins de santé est importante, mais la survie économique de notre milieu est primordiale à ce moment-ci.

La vraie question que nous nous devons de nous poser pour l’élection du 8 décembre prochain est « qui est le meilleur timonier pour faire naviguer le Québec dans les eaux troubles de la crise économique que nous traverserons ? » Et en corollaire, « quelle est la meilleure équipe pour remplir toutes les tâches ministérielles et faire les efforts nécessaires pour bien appuyer notre capitaine ? » Ce n’est pas le temps des considérations partisanes ou idéologiques. Ce qui compte, c’est que nous mettions tous la main à la pâte et que nous soyons bien gouvernés. Comme dans les grands moments de l’histoire du Québec, notre solidarité devient capitale car les prochaines années ne seront pas faciles pour nos familles, nos ainés, et l’avenir de nos enfants dépend de ce que nous ferons aujourd’hui.

Claude Dupras
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