lundi 30 décembre 2013

...de 2013 à 2014

L’année 2013 se termine et c’est le temps où les médias nous rappellent les évènements qui ont absorbé nos esprits durant cette période.

J’ai revu les blogues que j’ai écrit durant cette année et j’été surpris de la variété des sujets touchés : les Amérindiens, Lance Armstrong, les oléoducs et le sable bitumineux, la mairie de Montréal, la commission Charbonneau, le Québec et le Canada, un nouveau pape, Hugo Chavez et sa succession, le parti libéral du Canada, la Chine et l’Afrique, la constitution canadienne, les géants d’affaires, le génie conseil, le président français, la tragédie du Lac Mégantic, Stephen Harper, la charte des valeurs québécoises, le pont Champlain, et autres.

Voilà, à la suite, mes commentaires de fin d’année sur ces sujets.

Le monde et particulièrement l’Europe se soulèvent depuis toujours contre le Canada pour les supposés mauvais traitements que le Canada fait subir aux Amérindiens. La grève de la faim de la chef de bande Theresa Spence a fait beaucoup de bruit et a attisé ces sentiments négatifs, de façon injuste. Le Canada fait déjà beaucoup. Le PM canadien Stephen Harper qui a toujours montré beaucoup de sympathie pour les peuples autochtones, a rejeté pour des raisons de budget, dit-il, l’important Accord de Kelowna voté par le gouvernement de son prédécesseur visant à aider davantage les populations des Premières Nations. Il doit se raviser.

Le mensonge ne paie pas. Lance Armstrong l’a finalement compris. Incroyable champion cycliste, unique athlète, vénéré par les foules, il a déboulé en quelques jours et on lui a enlevé tous ses trophées, ses records et ses mérites. Il a été humilié pour avoir menti pendant des décennies. Ce fut une leçon magistrale pour tous les jeunes du monde entier.

Pour vendre son pétrole, le Canada a exprimé le désir de construire des oléoducs afin d’augmenter la capacité de livraison de la production venant des sables bitumineux afin de pouvoir en diminuer le prix de revient. S’il réussit, ce sera économiquement bon pour tous les Canadiens. De nouveaux oléoducs vers l’ouest, le sud, l’est et de là au monde ont été proposés : le XL qui traversera les USA du nord au sud est retardé par le président Obama mais les probabilités sont qu’il sera approuvé avec conditions en 2014; l’Enbridge Northern Gateway (transmontages-rocheuses), vient d’être approuvé en fin d’année par le “Joint Review Panel” qui affirme que sa construction est dans l’intérêt des Canadiens si 209 conditions sont respectées, ce que le gouvernement accepte; l’Énergie-est qui s’étendra sur 4 000 km en direction du Nouveau Brunswick semble prêt à recevoir les approbations des gouvernement provinciaux, incluant le Québec; de même pour le Montreal-Sarnia qui sera inversé pour alimenter les raffineries de l’est de Montréal. Le Canada pourra ainsi produire 6 000 000 b/jour de pétrole, en 2030, qui rapporteront $200 billions aux Canadiens.

Les Montréalaises et les Montréalais ont été bousculés par le dévoilement du niveau de corruption installé dans l’administration municipale. Le maire Gérald Tremblay a quitté son poste et le maire Applebaum a dû démissionner. Le parti Union-Montréal s’est évaporé. Après une chaude lutte à la mairie entre quatre bons candidats, Denis Coderre a été élu en début novembre. Il connait bien la politique et sait se réclamer du peuple, de ses aspirations profondes et de sa défense contre les divers torts qui lui ont été faits. Il est ce dont Montréal a besoin à ce moment de son histoire : un nouveau Camilien Houde qui sait écouter, se faire entendre, agir et se faire aimer.

Le commissaire de l'Unité Permanente anticorruption (UPAC), Robert Lafrenière a été critiqué pour n’avoir pas été favorable à la tenue d'une enquête publique sur l'industrie de la construction. Les partis d’opposition l’ont critiqué sévèrement. Je lui donnais alors raison. Depuis, la Commission Charbonneau dévoile des scandales spectaculaires, mais le gros du travail de recherches, d’écoutes électroniques et d’enquêtes a été fait par l’UPAC qui fait des arrestations. L’analyse du dossier de la ville de Laval l’a bien démontré. Le coût total de la Commission a été établi à 45 millions $ mais elle a le mérite d’être un bon « show » télévisé pour sensibiliser rapidement les Québécois à la corruption qui s’est installée. Nous comprenons maintenant le niveau de pénétration de la mafia dans les affaires municipales et le système de contributions illégales des professionnels et des entreprises aux hommes et partis politiques.

Les relations Québec-Canada ne se sont pas améliorées depuis l’élection du gouvernement du Parti Québécois. Selon ses élus, c’est toujours la faute d’Ottawa qui n’écoute pas, ne le favorise pas et œuvre volontairement contre le Québec. Le but est simple : discréditer le Canada pour favoriser la séparation du Québec. Sur plusieurs dossiers, tel le contrôle des armes, je leur donne raison mais on ne rejette pas un pays tel que le Canada sur la base de tels exemples. C’est le PM Harper et son gouvernement de droite qu’il faut blâmer, pas le système, pas l’institution.

Dès son premier « bonsoir » à la galerie centrale de St-Pierre-de-Rome, j’ai été touché par le pape François. Depuis, il n’a cessé de surprendre et d’impressionner par sa simplicité et ses sentiments réels de charité, au point que les sondages de fin d’année, dans le monde, démontrent qu’il est le pape le plus populaire de tous les temps, dépassant même le bien-aimé Jean Paul II. Quelle sagesse les cardinaux ont montrée le jour où ils l’ont élu ! J’en étais surpris, j’en suis émerveillé. Ce bon pape va changer beaucoup de choses même si nous vivons dans un monde de plus en plus matérialiste.

À sa mort, Hugo Chavez a été applaudi par les Vénézuéliens. Ils le considéraient l’« homme des pauvres » et il les charmait. La pauvreté située à 49% à son arrivée, était de 29% à son décès. Il se servit de son pétrole pour monter un front anti-influence-américaine et organiser des marchés de biens et de services inter-états du sud. Plusieurs partis de gauche furent élus dans ces pays à cause de ses actions. Son disciple et successeur, Nicola Maduro, n’a ni l’autorité ni le talent de Chavez pour diriger le pays et plusieurs observateurs entrevoient, après neuf mois de pouvoir, sa descente aux enfers. Il vient de leur répondre en remportant la majorité des élections municipales mais a perdu les grandes villes telle Caracas. Cette victoire qui vient des derniers soubresauts du Chavezisme ne règle pas les problèmes grandissants du pays qui n’a ni infrastructure de classe mondiale ni un bon système d’aide sociale pour permettre au peuple de sortir de l’abime où il se trouve. Comment croire au futur de Maduro, alors que l’opposition continue à gagner du terrain.

Le parti libéral du Canada a des problèmes depuis l’élection des conservateurs. Il comptait beaucoup sur son congrès de leadership pour se donner un nouveau chef capable de le relancer dans l’opinion publique. Justin Trudeau, fils d’un des plus importants PM que le Canada ait connus, Pierre-Elliot Trudeau, a gagné la course et depuis avril 2013 est le chef du parti. À ce jour, sa cote de popularité est forte et le parti libéral est revenu dans la course pour diriger le pays. Justin est jeune, a du charisme et est Québécois, ce qui est important électoralement car pour gagner l’élection de 2015, le parti libéral doit gagner partout au pays mais c’est le Québec qui peut lui donner le pouvoir national. Justin maintiendra-t-il son image gagnante ? Si oui, son parti revivifié ne viendra-t-il pas simplement diviser les votes opposés au PM Harper, permettant à celui-ci de se faufiler à nouveau au pouvoir ?

L’année qui se termine a confirmé la décélération de la croissance de la Chine après 30 ans à deux chiffres. Elle se contentera en 2014 de 7 à 7,5%, selon les plus pessimistes. Après avoir utilisé près de la moitié des matières premières de la planète, voilà qu’elle semble vouloir digérer et ralentir. Cette situation touchera ses fournisseurs asiatiques et autres mais heureusement pour ces derniers la reprise américaine viendra combler le trou chinois et leur permettra de se rééquilibrer par rapport au grand dragon. Par contre, la Chine après avoir accentué en 2013 sa puissance dans le monde, particulièrement en Afrique et à l’ONU, a mis en place une stratégie visionnaire et politique qui en fera une force de plus en plus redoutable. Dorénavant, pour assurer une croissance durable, elle vise à satisfaire les besoins de consommation de sa population, assainir son système bancaire et se désendetter car elle a trop vécu à crédit. L’euphorie chinoise passera à un autre stage plus pratique, certains disent plus puissant.

Deux géants d’affaires ont fait parler d’eux en 2013. Paul Desmarais et Pierre-Karl Péladeau. Le décès de Paul Desmarais nous a rappelé la grandeur de ce franco-ontarien devenu québécois. Il a été unique en son genre. Parti de rien, il est devenu un des hommes les plus riches et les plus influents du pays. Ah, si seulement le Québec avait un centaine de gars comme lui ! De con côté, Pierre-Karl Péladeau qui avait pris la succession de son père, a réorienté la stratégie de son empire et a transformé, entre autres, Videotron en une des meilleures compagnies de télécommunications au Canada. Elle compte plus de clients satisfaits que toutes les autres. Il a laissé la direction de son entreprise à un subalterne pour devenir président du CA d’Hydro-Québec. On n’a pas fini d’entendre parler de lui.

Au début de 2013, les ingénieurs avaient une très bonne réputation. À la fin de l’année, ce bon sentiment s’est évaporé au point que plusieurs jeunes hésitent maintenant à entrer à Polytechnique pour faire une carrière dans le génie. C’est malheureux, car notre pays a un grand besoin d’ingénieurs. Ça, pour une bande d’ingénieurs véreux, fonctionnaires et à leur compte, qui ont créé et participé à des systèmes mafieux et de corruption. Depuis, le nettoyage des grandes firmes de génie-conseil se fait et il est à espérer qu’elles retomberont sur leurs pieds le plus vite possible, durant la prochaine année, après avoir éliminé la crasse qui les a entachés.

Le président français, François Hollande, a de gros problèmes de popularité. Il les mérite. Après son élection en 2012, il a implanté plusieurs lois tout en imposant, pour réduire le déficit et la dette, des taxes de toutes sortes, dans tous les domaines et qui se sont additionnées à toutes les taxes existantes. Le résultat : les Français sont parmi les plus taxés du monde. Il a fait le contraire de ce qui s’est fait aux USA, au Canada et au Québec, où l’économie a repris du poil de la bête. Au lieu de taxer, Hollande n’a pas eu le courage de couper dans les dépenses afin de laisser le plus d’argent possible dans les poches des Français. Aujourd’hui, ces derniers sont appauvris, se sentent pris au piège et dénoncent leur président. Si les choses ne changent pas rapidement dans les prochains mois, Hollande ne sera que le président d’un mandat manqué.

L’impensable tragédie du Lac Mégantic a révélé le manque de contrôle du gouvernement fédéral sur les transports ferroviaires au Canada. Nous avons été témoins de la force de caractère de ces Québécois touchés par ce sinistre et de la solidarité des Québécois et des Canadiens face à cette population sinistrée et blessée. Le Canada a changé plusieurs lois depuis et devra continuer à le faire afin d’assurer à tous les villages et les villes du pays, traversés par des convois de trains, qu'ils seront le plus protégés possible.

Le PM Harper a agi pour protéger l’économie du pays mais il a aussi continué à « droitiser » le pays au point que cela devient intolérable. Le Canada que nous connaissons ne se ressemblera plus si ce chef politique continue dans le sens où il va. Il est à espérer que les partis d’oppositions le surveillent et le dénoncent au moment opportun afin que la pression publique le fasse reculer.

Enfin, il y a le projet de la charte des valeurs québécoises proposé par le gouvernement du PQ. Jamais, une loi n’a divisé autant les Québécois. Certains péquistes proposent que le ministre Drainville, le responsable de la loi, soit nommé l’homme politique de l’année. Comment un ministre qui propose une loi inutile, qui parle de laïcité et d’égalité des sexes alors qu’elles existent déjà, qui propose le non-respect des droits de la personne et de la religion, peut-il être considéré comme un bon homme politique. Il est à espérer que le prochain comité parlementaire, qui recevra les doléances et les mémoires des Québécois, soit bien organisé et que les opinions de chaque intervenant soient bien pesées et tenues en compte par les membres du comité et éventuellement par le cabinet des ministres.

L’année s’est terminée par le désordre public découlant des problèmes structurels du Pont Champlain enjambant le fleuve St-Laurent et la voie Maritime. Enfin, le gouvernement canadien, qui a réalisé il y a plus de trois ans qu’un nouveau Pont Champlain devait être construit, a proposé en fin d’année sa construction pour 2018. J’espère que le gouvernement analysera la possibilité de ne pas démolir le pont actuel mais de le réparer afin de distribuer tout le trafic sur les deux ponts : les automobilistes sur le nouveau, le transport public et le camionnage sur l’existant. Ainsi Montréal et la Rive-Sud seront bien servis pour longtemps.

De tous ces évènements, quel est l’évènement ou la personne de l’année? Le magazine TIME de New York a fixé son choix sur le pape François. C’est une bonne analyse et je suis entièrement en accord.

Bonne année 2014.

Claude Dupras

lundi 9 décembre 2013

Stephen Harper ne partira pas

Stephen Harper est premier ministre du Canada depuis 9 ans. C’est beaucoup pour un chef conservateur. Surtout durant les années que nous vivons où les politiques conservatrices ne sont pas toujours au goût de la majorité des électeurs. Depuis un certain temps, plusieurs observateurs s’amusent à prédire son départ. Qu’en est-il vraiment ?

Issu de la fusion entre les réformateurs modérés du Bas-Canada et du Haut-Canada en 1854, le Parti Conservateur (PC) devint, de 1942 à 2003, le Parti Progressiste-Conservateur (PPC) en intégrant un parti de l’Ouest. Sa politique était centriste. Puis, suite au regroupement avec le parti Alliance Canadienne (AC), en 2003, le nom redevint Parti Conservateur. Cette union n’en fut pas une d’idées mais de noms seulement et revêtait un caractère opportuniste.

Le Reform Party était un parti populiste créé par Preston Manning dans l’Ouest Canadien. Après ses insuccès lors d’élections fédérales, le Reform voyant son incapacité à gagner des appuis dans l’est du pays changea son nom pour Alliance Canadienne (AC), pensant que son impopularité n’était qu’une question de cosmétique. Suite à d’autres défaites électorales, Stephen Harper devint chef de l’Alliance. Il proposa la fusion avec le PPC du chef Peter Mackay. Plusieurs ex-ministres du PPC telle, Flora Macdonald, et des sénateurs PPC tel, Lowell Murray (il siège encore aujourd’hui comme sénateur progressiste-conservateur), s’opposèrent à cette union dont ils prévoyaient l’issue politique. Mais leurs oppositions furent renversées. Le Parti Conservateur renaquit de ses cendres et Harper le campa carrément à droite.

La conjoncture politique servit bien Harper puisque le parti libéral, alors dirigé par le PM Paul Martin, au pouvoir depuis trop longtemps, fut pris dans un scandale d’envergure nationale, « les commandites ». De plus, Harper promit de baisser la TPS (TVA) de 2%. Le bruit qui en résulta fit en sorte qu’Harper et son parti PC prirent le pouvoir. Harper obtint sa victoire grâce à l’appui de l’Ouest et de certaines régions conservatrices de l’Ontario. Le Québec ne lui donna que 10 députés sur 75.

Les Canadiens ne sont pas majoritairement de droite, si on en juge par les partis de centre ou de centre-gauche qui dirigent les gouvernements des provinces. Et cela, même en Alberta où se trouve la base nationale du PC. Les séparatistes québécois aiment affirmer que les Québécois ne sont pas semblables aux autres Canadiens qui, disent-il, sont conservateurs. Or, cela ne correspond pas à la réalité. Harper est de droite, mais la grande majorité des Canadiens ne l’est pas.

Le Canada n’est pas la France. Là-bas on vote à gauche, à droite, au centre, à l’extrême droite ou à l’extrême gauche. Les Français votent pour les politiques et non les politiciens. Par exemple, lorsqu’on est de gauche, on vote pour le candidat de gauche aux élections nationales, aux départementales, aux cantonales, aux municipales. Les Canadiennes et Canadiens, plus pragmatiques, ne décident pas ainsi de leurs votes. Ils optent pour le parti, son chef et le candidat de leur comté sur la base du programme électoral en tenant compte des problèmes de l’heure. La valeur des candidats compte. Au Québec, il y a en plus d’autres considérations puisque les agissements d’un lointain passé des conservateurs demeurent dans le subconscient des francophones, telles la pendaison du métis Louis Riel ou les deux crises de conscription obligatoire lors des guerres mondiales. Québec se souvient !

Il faut se rappeler qu’Harper a démissionné comme député réformiste pour promouvoir son programme de droite. Il espère, depuis ce temps, que la droite écrase le centre et la gauche comme ce fut le cas en Grande-Bretagne, aux USA et en Nouvelle-Zélande. C’est comme chef de l’opposition qu’il dévoila sa politique étrangère, lors du débat sur la guerre en Irak et le refus du Canada d’y participer : « Ce gouvernement nous a, pour la première fois dans notre histoire, tenu à l’écart de nos alliés britanniques et américains au moment où ils avaient besoin de nous ».

La politique étrangère du PM Harper surprend : boycottage récent de réunions aux Nations-Unis et au Commonwealth, rejet de l’accord de Kyoto déjà signé par son prédécesseur, etc. Il refuse à chaque occasion de faire la part des choses. Alors que le Canada s’est toujours rangé du côté des plus faibles et de la liberté, le Canada d’aujourd’hui appuie inconditionnellement le gouvernement d’Israël dans la lutte palestino-israélienne. Pour lui, le Canada n’est grand que s’il accepte la coalition impérialiste anglo-saxonne, qu’elle soit sous la dominance de Washington ou de Londres.

Quelle différence avec la politique du Parti Progressiste-Conservateur du PM Brian Mulroney que nous rappelle la mort récente de Nelson Mandela. À ce moment-là, le PM et son ministre des affaires étrangère Joe Clark prirent solidement position à l’ONU en faveur de la position de Nelson Mandela et des noirs sud-africains dans leur bataille contre l’apartheid et les Afrikaners, malgré les appuis des conservateurs anglais et des républicains américains aux blancs. C’est Mulroney qui convaincra Margaret Thatcher et Ronald Reagan de mettre la pédale douce et de modifier leurs points de vue. Je crois que l’on peut affirmer clairement aujourd’hui que si Harper avait été alors PM, il aurait ouvertement appuyé les Afrikaners au nom de la coalition impérialiste anglo-saxonne contre Nelson Mandela.

Harper a vertement critiqué le gouvernement Chrétien de n’avoir pas voulu joindre le Canada à la guerre d’Irak. Par contre, il a engagé le pays dans celle d’Afghanistan, sous commandement américain. Il a ainsi ramené l’identité canadienne à la case de départ en modifiant les pouvoirs du gouvernement canadien principalement : la politique étrangère, la défense et l’armée.

En politique domestique, Harper estime que le vrai problème canadien se situe entre les secteurs privé et public. Il n’aime pas le concept de l’État-providence qui, dit-il, a créé une « classe politique » qui ne fait que réclamer davantage de ressources que le secteur privé peut en fournir. La gauche veut des prêts, des subventions, de meilleures pensions, des subsides… La droite veut des réductions d’impôts. Pour Harper, cela se traduit par moins de gouvernement, donc plus de liberté.

Pour lui, l’obstacle principal est le Québec où il ne voit que étatisme, dirigisme, socialisme et « patronage ». Il s’est opposé à l’entente du Lac Meech et à l’Accord de Charlottetown parce que les deux prévoyaient une forme de statut particulier pour le Québec. Il s’est opposé à la « société distincte » car pour lui ce n’était qu’un chèque en blanc pour davantage d’étatisme. Il était et demeure partisan de la ligne dure à l’égard du Québec et refuse de céder à ce qu’il appelle « le chantage du Québec » sur ces questions.

Le PM Harper débute toujours ses discours en français et cela est apprécié par les Québécois qui comprennent néanmoins qu’il est motivé pour ce faire par des aspects politiques. Le malheur, c’est que ses actions politiques envers le Québec ne suivent pas.

Harper s’oppose à la promotion du bilinguisme au Canada. Il se justifie par le fait que le Québec soit officiellement unilingue français. Il ne tient pas compte du fait que plus de 75% des Québécois sont bilingues. Même s’il dit accepter que le français et le l’anglais ont un statut égal dans toutes les institutions du Parlement et du gouvernement du Canada, il fait tout pour contrevenir indirectement à ces lois, en nommant trop souvent, comme on a vu récemment, des « mandarins » unilingues à des postes qui requièrent la connaissance de la langue française. Même au Parti Conservateur, cette semaine, il n’a pas osé nommer un francophone comme directeur général, alors que le poste était ouvert.

Je reconnais qu’il a changé plusieurs de ses positions rigides de son temps de député. Pour lui, même s’il pense que la langue française n’est pas menacée au Québec, il accepte aujourd’hui que les provinces puissent légiférer sur la langue et la culture. Cependant, il ajoute un bémol. Leurs décisions doivent respecter la charte pour la défense des droits à la liberté d’expression et au choix de la langue.

En rapport avec la séparation du Québec, Harper n’accepte pas qu’elle puisse se faire suite à une déclaration unilatérale d’indépendance du Québec. Pour lui, la sécession requiert un amendement constitutionnel et le consentement unanime des provinces. Il affirme « si le Canada est divisible, le Québec l’est aussi » et exige une question référendaire claire. Je rappelle qu’il s’est opposé à la « Déclaration de Calgary » qui reconnaissait le « caractère unique » de la société québécoise et l’intégration de cette caractéristique dans la constitution canadienne. Il a souventes fois affirmé « qu’il ne fallait pas céder au « bluff » du Québec ».

Harper a toujours œuvré pour que les valeurs de la droite économique, sociale et religieuse deviennent les valeurs dominantes du Canada. Il calque son travail sur les expériences conservatrices de ses héros, Ronald Reagan et Margaret Thatcher. Il veut déréglementer, privatiser, baisser des impôts, réduire la dette et diminuer le rôle de l’État. Il refuse de faire des concessions économiques et sociales aux provinces. Il continue de favoriser le libéralisme économique classique et le conservatisme social. Pour lui, le véritable problème est le relativisme moral et la neutralité morale.

En bon politicien, Harper sait choisir ses batailles afin de ne pas trop diviser les rangs de son parti. Il a dévoilé sa stratégie, il y a plusieurs années : « L’important c’est d’aller dans la bonne direction, même si c’est lentement ».

Tout ça me fait conclure qu’Harper n’est pas prêt à démissionner et à risquer que les rênes du Parti Conservateur tombent dans les mains d’un successeur qui ne poursuivra pas avec persévérance la réalisation du projet de droite qu'il s'est fixé pour le Canada.

Il ne partira pas car il craint de voir détruire en un jour l’œuvre de sa vie politique, comme dirait Kipling.

Claude Dupras

mardi 3 décembre 2013

Un nouveau pont Champlain, pourquoi pas deux ?

L’annonce de la construction d’un nouveau pont Champlain reliant Montréal à la rive-sud, en enjambant le fleuve et la voie maritime du St-Laurent, est une bonne nouvelle. Le pont existant, construit il y a à peine 50 ans, sera démoli. C’est incompréhensible et scandaleux. Comment accepter qu’une œuvre de génie si importante ait été si mal conçue et bâtie. Quelles en sont les raisons et qui est responsable? Allons-nous simplement laisser passer sans savoir où a été l’erreur ? J’espère que non.

Les études de circulation actuelles du ministère du transport démontrent clairement que l’augmentation exponentielle du nombre d’automobiles a créé une congestion quasi-permanente sur le pont Champlain actuel, et les projections futures ne font qu’empirer le problème. Il est clair depuis longtemps qu’il faut un nouveau pont avec une capacité plus grande et que ce n’est pas seulement les poutres décadentes du pont actuel et les réparations qu’elles exigent qui le rendent désuet mais aussi la congestion automobile croissante qui le rend de jour en jour de plus en plus inaccessible.

Nous voulons un nouveau pont solide et efficace. Nous le voulons beau parce qu’il est l’entrée de Montréal où passent les Américains qui viennent visiter le Québec et l’est du Canada. Le gouvernement canadien a compris et c’est pourquoi, il a choisi, pour ce faire, l’architecte danois Poul Ove Jensen, 76 ans, de réputation internationale en construction de ponts. Ce dernier a été le designer, entre autres, de l’imposant pont Stonecutters à Hong Kong. Il travaillera avec le groupe d’ingénieurs britanniques en construction ARUP, 19e au monde, spécialiste de projets en Partenariat-Privé-Public. Cette firme a réalisé dans les années récentes l’autoroute A30 et le pont sur le canal Beauharnois. Je suis surpris que ces architectes et ingénieurs aient obtenu, sans soumission, le contrat de cet important projet sous le nez des firmes québécoises d’ingénierie qui comptent parmi les plus importantes du monde, dont Lavalin, 9e au monde, Genivar, 16e au monde et le groupe américain Aecom, installé à Montréal, 4e au monde.

Les seuls professionnels canadiens de construction impliqués dans le design du projet, seront les architectes de la firme montréalaise Provencher Roy, qui assistera l’architecte Jensen. Même si une très bonne équipe a été rassemblée et qu’elle a réalisé dans le passé d’importants projets, elle n’est pas la seule au monde capable de rendre de tels services. Cette méthodologie de nomination directe par le fédéral est, de nos temps, surprenante et frise l’inacceptable. Le ministre Lebel la justifie par le manque de temps, le pont devant être terminé pour 2018. Pourtant, le ministre fédéral des Transports Strahl disait en 2011 qu’il fallait remplacer le pont Champlain dans 10 ans. Qu’a fait le gouvernement depuis ? Alors que normalement on cherche à élargir la recherche de solutions possibles en mettant en compétition des bureaux d’études et d’architectes et que l’on sait que cette période est longue pourquoi n’a-t-il pas lancé alors un appel international d’offres ? Le fait que le fédéral ait « by-passé » cette étape importante fait en sorte que les architectes, ingénieurs et constructeurs québécois et canadiens n’auront pas eu l’opportunité de présenter leurs propositions et leurs équipes. Pourquoi ?

Ce qui exige beaucoup de temps dans la construction d’un nouveau pont, c’est la décision gouvernementale, le choix du projet, l’accord du public et les approbations des plans et devis par les organismes de règlements et de surveillance environnementale. Ce ne sera pas le cas pour le nouveau pont Champlain puisque nous sommes tous embarqués dans le même bateau ! On n’a pas le choix ! Tout le monde doit mettre l’épaule à la roue et l’urgence dictera la vitesse du design, des approbations et de la construction.

Quant aux difficultés techniques, elles ne sont pas extraordinaires puisqu’on connait bien le fleuve, le courant d’eau, les exigences de la canalisation du Saint-Laurent, les vents, les glaces, les propriétés du sol et les conditions climatiques et sismiques. Même si le projet est important, ce n’est pas un ouvrage de dimensions exceptionnelles qui soulève de nombreuses difficultés de réalisation, si on le compare à d’autres. La détermination du tracé sera vite faite. Les besoins des municipalités riveraines de la rive-sud sont bien connus et celles-ci seront desservies de façon satisfaisante sans qu’il y ait un fort impact sur leur milieu bâti ou projeté. Les options seront peu nombreuses. Tout ça, pour dire que les conditions locales et les contraintes connues ne seront pas des embûches aux architectes et ingénieurs pour déterminer les caractéristiques définitives du projet et leur permettre de produire rapidement les rapports et esquisses d’une proposition finale.

Le gouvernement du Canada n’est propriétaire au pays que de 5 ponts, soient le Jacques-Cartier, le Champlain, la partie fédérale de l’Honoré-Mercier, l’international de Cornwall et l’international de Sault-Ste-Marie. C’est la raison pour laquelle il défend sa décision de rendre payant le passage sur le nouveau pont Champlain, car il dit vouloir être juste envers les autres provinces qui n’ont pas de telles infrastructures. Oui, le Québec et l’Ontario ont le fleuve, mais l’Ouest a le blé qu’Ottawa finance en partie. Les maires de Montréal et de la Rive-Sud ainsi que la PM Pauline Marois ont réclamé, en unisson, un passage gratuit pour les automobilistes. Ils prétextent qu’un péage sur un pont entraînera le péage sur tous les ponts du fleuve. Je ne crois pas que cet argument soit suffisamment fort pour convaincre le PM Harper puisque le péage sur le nouveau pont de l’autoroute 125 n’a pas entraîné le péage sur tous les ponts de la rive nord. Je crains que la bataille soit perdue d’avance, mais j’encourage les élus à continuer leur campagne de persuasion du PM canadien en utilisant de nouveaux arguments, tel le blé de l’Ouest.

Quant aux estimés de coûts, le ministre Lebel a assuré qu’ils seront respectés. Cela veut dire quoi ? Sur quelle base déterminera-t-il qu’ils le seront ? Si on se fie à l’ordre de grandeur des coûts à ce jour, évalués 3 à 5 milliards, il y aura sûrement des économies car ces chiffres n’ont aucun sens et sont exagérément élevés si on les compare aux coûts de projets similaires dans le monde. Le budget qui fera partie des études préliminaires nous permettra de suivre l’évolution des coûts du projet pour nous assurer qu’ils ne dépasseront pas ceux estimés par les professionnels et acceptés par les ingénieurs du gouvernement.

Le nouveau pont Champlain est un projet d’utilité publique et sa réalisation doit être menée rondement et bien.

Qu’arrivera-t-il du vieux pont Champlain lorsque le nouveau sera ouvert à la circulation? On parle de le démolir. Est-ce une bonne solution ? Nous savons tous que le problème du pont actuel vient des poutres qui sont appuyées sur les piliers profondément ancrés dans le sol du fleuve. Il semble que les piliers soient bon, tout comme la superstructure d’acier au-dessus de la voie maritime. En réalité, si toutes les poutres étaient remplacées, le pont Champlain réparé pourrait être utilisé encore de nombreuses années. Évidemment, si on exécute de tels travaux, le pont sera fermé à la circulation durant une année ou deux. Ce qui est impensable et inacceptable si on n’a pas un nouveau pont. De plus, la capacité-automobile du pont réparé sera toujours insuffisante et le problème de la congestion croissante ne serait pas réglé.

Selon ce qu’on nous dit, le nouveau pont règlera tous les problèmes de circulation pour tous les automobilistes, les camionneurs, le transport en commun. Elle sera fluide. Il sera plus gros, aura plus de voies de circulation dans les deux sens, des voies réservées aux autobus, au covoiturage, une ligne de train léger sur rails dans les deux sens. Tout ça en fera un pont qui coûtera cher.

Mais si on faisait deux ponts. Un pour les automobilistes. Un autre pour le transport en commun, les camions et le métro. Et cela en réparant le pont actuel. Voici un scénario imaginable : On maintient le pont actuel en bonne condition pour la circulation. On bâtit un nouveau pont Champlain plus petit que celui imaginé par le gouvernement et qui sera dédié éventuellement exclusivement aux automobilistes. Une fois terminé et ouvert à la circulation, on ferme le pont existant et on entreprend de le transformer rapidement en un pont dédié éventuellement exclusivement aux autobus, au camionnage et au métro. En remplaçant toutes les poutres et le tablier actuel par de nouveaux éléments qui tiennent compte de la nouvelle utilisation, il deviendra moins large, moins lourd et pourra être assis sur les piliers existants capables de tenir beaucoup plus de poids. Cette transformation pourrait se faire en moins d’un an puisque tout pourra être fabriqué et préparé pour installation pendant la période de construction du nouveau pont.

Je me rappelle le pont Champlain à ses débuts lors de l’expo 67. On y circulait facilement, rapidement. Même le péage manuel ne nous ralentissait pas vraiment. Cinquante ans plus tard, on voit le résultat du « boom » qui a éclaté depuis. Il y a des autos partout. On ne cesse de moderniser les autoroutes, bâtir des ronds points géants, etc.. La Rive sud a explosé. Brossard, Candiac, Laprairie et toutes les autres villes et villages autour ont été développés et on y trouve une quantité inimaginable, depuis quelques années, de maisons de grande qualité, d’édifices à condos, de centres commerciaux, et ça n’arrête pas. On peine même à s’y retrouver. Si le nouveau pont Champlain doit durer 100 ans, comme dit le ministre, que seront la Rive sud et Montréal dans 25, 50 et même 100 ans. Aujourd’hui, par exemple, à Montréal se construisent au moins quatre tours de 40 à 50 étages pour condos au centre-ville. Montréal explose dans toutes les directions.

Il me semble clair qu’ajouter une ou deux voies dans les deux directions pour le pont Champlain ne sera pas suffisant dans 50 ans et encore moins dans 100 ans. La population de la Rive-sud croîtra exceptionnellement rapidement à cause de toutes les familles qui s’y installent.

Un éventuel métro rapide, souterrain et en surface, pourrait permettre aux gens de ce grand territoire d’y circuler rapidement et aussi d’entrer à Montréal. Le métro de Montréal et celui de la Rive-sud pourraient être reliés et le passage serait sur le vieux pont Champlain rénové. Dans un premier temps, une première station reliée au métro de Montréal pourrait être installée à Brossard. Et si on se fie à ce que l’on constate à la station-Longueuil, on comprendra qu’une station-Brossard deviendra très populaire et qu’elle éliminera un très grand nombre d’autos sur le pont nouveau.

Depuis ma jeunesse, j’ai été témoin du développement de Montréal et de ses couronnes nord et sud et c’est pourquoi je pense que le design du nouveau pont Champlain doit tenir compte des études de l’évolution démographique de la région montréalaise et des services à rendre aux citoyens et citoyennes dans le futur.


Claude Dupras