Jean
Charest fut défait de peu à l’élection de 2014 et le PQ devint le gouvernement
minoritaire de Pauline Marois. Un des jeunes leaders des manifestions fut élu
député péquiste. Moins de deux ans plus tard, les libéraux revinrent au pouvoir
en force avec une victoire mémorable qui écrasa littéralement le PQ et son
jeune député contestataire dont la popularité s’avéra éphémère. Ces derniers venaient
de comprendre que c’est le long terme qui est important pour les Québécois.
Aujourd’hui,
de nouvelles manifestations anti-gouvernement-libéral reprennent. Certains
chefs-étudiants actuels, (si on peut les appeler des chefs), plus à gauche, se
disent justifiés de réagir contre les coupures budgétaires imposées par le
gouvernement Couillard pour éliminer les déficits annuels qui augmentent
exagérément, sans cesse, la dette des Québécois.
Il
est clair que le Québec ne peut continuer ainsi et il est temps qu’il réévalue
et réoriente ses dépenses. Les coupures sont qualifiées par les contestataires
de « régime d’austérité » alors qu’elles n’en sont pas. Les chefs-étudiants
comprennent aussi qu’en définitive ce seront les générations futures qui
profiteront de ces serrements des dépenses et que la leur sera la première à en
profiter. Évidemment, ils évitent d’en parler car leur but premier est de manifester
contre le gouvernement. Pour réussir, ils ont bien compris que le sujet de
« l’austérité », seul, ne sera pas suffisant pour motiver un grand
nombre de personnes à se rallier à leur projet. Il fallait autre chose. Voilà
la raison pour laquelle ils ont ajouté un deuxième thème, les
hydrocarbures : de l’exploitation des sables bitumineux à la distribution
du pétrole par oléoducs au gaz de schiste. Et oups ! Encore hier, ils viennent
d’ajouter le racisme dans leur cahier de doléances, comme quoi ils ont des
difficultés à rassembler tout le monde qu’ils espéraient et que c’est bien le
gouvernement qu’il conteste.
Manifester
est un geste démocratique. La liberté de se regrouper est un droit qui se doit
d’être respecté. Les règlements municipaux aussi doivent être obéis. En 2012, ils
existaient à peine. Depuis, le conseil de la ville a réagi. Pour être légale,
toute manifestation doit répondre aux règlements afin que les autorités
municipales puissent la justifier, l’autoriser et la céduler. Le modèle a été
la ville de Paris, capitale des manifestations, qui va encore plus loin. Là-bas,
elles sont le sujet d’une déclaration au préalable indiquant le but, le lieu,
la date, l’heure du rassemblement et l’itinéraire projeté qui est remise aux
autorités qui peuvent demander aux organisateurs des modifications de parcours
ou d’horaire ou encore d’interdire si elles la jugent de nature à troubler
l’ordre public. Là, une manifestation interdite est un délit punissable par la
loi. Il est temps que Montréal fasse de même, que la maturité politique
s’installe dans notre société, que les organisateurs démontrent un esprit
civique et que ça change. Ainsi tout le monde sera heureux.
Les
récentes manifestations étudiantes ont débuté il y a deux semaines et depuis
elles ont toutes été déclarées illégales par la police de Montréal. Les chefs-étudiants
refusent de se soumettre aux règlements et se justifient en disant que tout est
affiché sur Facebook, ne démontrant ainsi aucun respect aux autorités
municipales. Pour l’instant, celles-ci tolèrent et cherchent à guider les
manifestants sur certain parcours. Les affrontements éclatent. Vivement provoqué,
un policier a tiré à bout portant sur une étudiante, un autre a utilisé le
poivre de Cayenne pour repousser des manifestants devenus trop agressifs. C’est
grave, c’est choquant. Cela ne peut continuer. C’est à se demander s’il y a des
casseurs parmi les contestataires ? La conséquence de ces incidents majeurs est
que public et la presse ne discutent pas des buts visés par les manifestants. Tout
devient un cafouillage.
L’anarchie
ne peut prendre place dans notre métropole. Les droits et les besoins de chaque
Montréalais doivent être respectés. Nous nous devons de dénoncer le non-respect
des lois et des règlements. Les dirigeants des maisons d’enseignements se doivent
aussi d’assurer que leurs étudiants respectent leur institution et d’imposer
des sanctions disciplinaires à ceux et à celles qui posent, à l’intérieur de
leurs murs, des actes politiques, de vandalisme ou illégaux en préparation de
manifestations, car c’est là que tout commence. De plus, le
droit démocratique de ceux et celles qui refusent de participer se doit d'être reconnu.
Il
est aussi important que les journalistes, les commentateurs, les chroniqueurs,
les blogueurs et autres n’attisent pas davantage la tension en se prononçant
indûment pour une partie ou pour l’autre. Les reportages se doivent d’être objectifs
si nous voulons tous pouvoir juger vraiment du déroulement de la situation,
justifier ou s’opposer à cet acte collectif particulier car c’est la démocratie
qui s’exprime. Il nous faut protéger les manifestants, mais il nous faut aussi
protéger le public, notre ville et sa réputation.
« De
nos temps, l’ampleur des manifestations nécessite des méthodes d’organisation
élaborées et des techniques d’informations avancées pour éviter les écueils. Si
elles sont bien réussies, elles atteindront leur but d’influer sur l’opinion,
influenceront le pouvoir politique et contribueront ainsi à la naissance ou à
la révision de politiques rencontrant les visées des revendicateurs ». Sinon,
elles deviendront un élément de division dans notre société.
Claude
Dupras