lundi 28 février 2011

Hommage à l’ingénieur Jean-Pierre Ledoux, mon associé depuis 40 ans, inhumé ce matin

Le 17 février 2011, l’ingénieur Jean-Pierre Ledoux est décédé à l’hôpital Général de Montréal.

Diplômé en génie de l’université McGill, Jean-Pierre Ledoux eut une belle et longue carrière professionnelle. Il participa à la création de la firme d’ingénieurs-conseils Dupras Ledoux Ingénieurs, en 1971, et devint président de la filiale Ginter Inc. une entreprise pionnière de la gérance de construction par les ingénieurs conseils au Québec.

Parmi les projets auxquels il participa, on retrouve le Musée Canadien des Civilisations à Hull, l’Hôpital Ste-Eustache, l’Hôtel de ville de Ste-Thérèse, les pavillons de l’Ontario et du Canada à l’Expo67, le village olympique de la 21e olympiade de Montréal, le Grand théâtre de Québec, le complexe G du gouvernement québécois à Québec, le palais de Justice de Montréal, le siège social du Journal de Montréal, l’édifice administratif de Bell Canada (rue Jean Talon), le siège social de Bell Canada, la rénovation complète du siège social de l’Hydro-Québec, le siège social de Télévision Quatre-Saisons, celui de CFCF canal 12 et de CF cableTV, l’hôpital Champlain de Verdun, la maison-mère des Soeurs grises de Montréal et plusieurs autres.

La qualité du travail de sa firme fut reconnue par les hautes instances canadiennes et québécoises du génie-conseil et par le Gouverneur général du Canada. Jean-Pierre Ledoux et ses associés reçurent des mains du Gouverneur un premier prix d’excellence en génie conseil pour un projet de récupération d’énergie à l’usine de production d’électricité des Iles-de-la-Madeleine et, quelques années plus tard, le grand prix Ed Schreyer pour le meilleur projet de génie au Canada.

Ingénieur dans l’âme et entièrement dédié à sa profession, Jean Pierre Ledoux était animé du désir de bien servir ses clients qui le lui rendaient bien en lui renouvelant leur confiance. Il a toujours agi avec dévouement, respect et éthique en conformité avec les règles morales du code de déontologie de l’Ordre des ingénieurs du Québec. Fier du personnel de la firme et de son travail, il n’hésitait jamais à lui donner les crédits qu’il méritait.

Amateur invétéré de football, il a agi, jadis, dans ses temps libres et avant la venue de la télévision, pour les Alouettes de Montréal comme analyste du jeu défensif des deux clubs lors des matchs.

Jean-Pierre Ledoux était un gentilhomme, intelligent, jovial, généreux, juste, ouvert et d’une probité absolue. Il savait faire la part des choses. Ses associés, ses clients, ses nombreux amis et les entrepreneurs en construction avec qui il a œuvré l’ont toujours grandement apprécié.

Claude Dupras

samedi 26 février 2011

Lucien Bouchard, bon ou pas bon ?

L’ex-premier ministre du Québec, l’avocat Lucien Bouchard, a accepté le poste de président de l’Association pétrolière et gazière du Québec au moment où les Québécois et Québécoises ont vraiment peur des conséquences de l’exploitation du gaz de schiste et s’y opposent majoritairement.

Bouchard a été avocat en droit du travail pendant 22 ans avant d’entreprendre une carrière politique. Il a été le principal penseur qui a mis dans la bouche de Brian Mulroney, son grand ami d’université, les mots qui ont permis à ce dernier de remporter la presque totalité des comtés au Québec et d’être propulsé au poste de PM du Canada, avec son Parti Progressiste-Conservateur (PPC).

Devenu ministre à Ottawa, Bouchard jugea que les principes et les objectifs de l’Accord du Lac Meech (pour réintégrer le Québec dans la constitution canadienne) devenaient trop dilués. Il quitta son poste pour créer le Bloc Québécois (BQ), un parti politique fédéral dédié à la séparation du Québec. À l’élection qui suivit, le BQ gagna suffisamment de sièges pour permettre à Bouchard de devenir chef de l’opposition à la Chambre des communes devant le nouveau PM Jean Chrétien. Du jamais vu !

En 1995, la campagne référendaire au Québec dirigée par le PM Jacques Parizeau, n’allait nulle part. Bouchard en prit le contrôle et devint, en un rien de temps, le vrai leader séparatiste (le mot est de lui). Tribun extraordinaire, il remplissait salle après salle grâce à son discours d’une logique implacable. À son grand désappointement et à ceux de ses fidèles, au soir du vote, l’option séparatiste du OUI ne perdit que par quelques centiles. Devant cette performance magistrale et l’admiration passionnée que lui témoignaient les Québécois, Parizeau se retira et Bouchard devint chef du Parti Québécois et fut assermenté premier ministre et dûment élu à l’élection qui suivit.

Il a gouverné le Québec d’une main de fer. Son projet de fusion des municipalités au Québec a créé un brouhaha indescriptible. La presque totalité des municipalités visées tinrent des référendums et le NON l’emportait partout par des majorités dépassant les 90%. Nonobstant cette expression démocratique, Bouchard imposa quand même la fusion. Par la suite, son successeur Jean Charest se senti obligé de permettre la dé-fusion, ce qui ajouta à la confusion. Une autre erreur!

Par ailleurs, afin de répondre aux exigences des financiers de Wall street, Bouchard décida de forcer à la retraite des milliers de professionnels des hôpitaux (chirurgiens, spécialistes, médecins et infirmières) afin de diminuer les dépenses de l’État. Les plus expérimentés quittèrent leurs taches. Depuis, les patients sont moins bien traités et les hôpitaux peinent à répondre adéquatement à la demande des citoyens malades. Un vrai scandale !

Lucien Bouchard vient d’expliquer sa position sur l’exploration et l’exploitation des gaz de schiste. Évidemment, il n’est pas favorable à l’idée d’un moratoire puisqu’il représente l’industrie qui veut développer cette ressource. Plusieurs de ses arguments sont bons, logiques mais incomplets. Il affirme que le Québec doit se baser sur les conclusions du prochain rapport du Bureau d’Audience Publique sur l’Environnement (BAPE). Or le mandat du BAPE n’était pas suffisamment large pour vraiment étudier cette question difficile. Il n’a pas fait « une véritable évaluation environnementale stratégique (EES), visant à intégrer les facteurs environnementaux à l’élaboration de politiques, de plans et de programmes publics » comme le proposa l’Ordre des Ingénieurs du Québec.

Bouchard se trompe face à la vive réaction des Québécois. Ce ne sont pas des mots qui viendront à bout de leur perception négative du projet. Un arrêt de l’exploration est justifié pour calmer les esprits et permettre à tout le monde de reprendre son souffle. Je crois qu’un moratoire d’une année pourrait suffire pour permettre à Bouchard et cie de revenir expliquer le projet afin qu’ensemble nous réexaminions cette question qui peut s’avérer très importante pour l’avenir économique du Québec.

Puis, il y a la question de la mise sur pied d’une commission d’enquête sur la construction. Bouchard a une bonne expérience dans le domaine puisqu’il était procureur de la dernière commission d’enquête tenue il y a près de 40 ans. Après avoir dit qu’il s’opposait à une telle enquête parce que « les témoins deviennent coupables dès lors qu’ils sont vus à la télévision en train de témoigner à une telle commission d’enquête » voilà maintenant qu’il affirme « Moi, aujourd’hui, je la ferais parce que le gouvernement paie un prix énorme pour ne pas la faire et qu’il faut assainir les perceptions ». En somme, il accepte que le Québec dépenses des centaines de millions de dollars pour salir des gens innocents, pour assainir les perceptions, sauver le gouvernement… Non, cet argument n’est pas sérieux, d’autant plus qu’une nouvelle escouade permanente anticorruption vient d’être mise sur pied par le gouvernement et qu’elle pourra faire le travail plus efficacement. Ce n’est que de la petite politique et Bouchard le sait, car il affirme, en conclusion, « …malgré qu’il n’est pas certain que les coupables seront dénichés avec une commission d’enquête ».

J’ai été souventes fois en désaccord avec Lucien Bouchard. Tout particulièrement en rapport avec ses prétextes pour quitter le PPC, ses arguments pour créer un parti séparatiste à Ottawa (Bloc Québécois) qui a enlevé aux Québécois le pouvoir qu’ils avaient sur la scène fédérale, la fusion des municipalités qui a créé la désorganisation qui règne aujourd’hui à Montréal, la mise à pied du personnel professionnel des hôpitaux qui nuit encore à la qualité des soins aux Québécois. Et aujourd’hui, je m’oppose à son refus d’un moratoire sur la question du gaz de schiste et à son accord, que je qualifierais d’opportuniste, à la tenue d’une commission d’enquête sur la construction.

Malgré ces différents, j’admire Lucien Bouchard. C’est un Québécois hors de l’ordinaire. C’est un homme de conviction, sérieux, intelligent, convaincant, engagé, honnête qui aime le Québec et qui sait l’expliquer à ses compatriotes. Il est un homme qui a survécu à une maladie grave et qui a su relever la tête et continuer comme si rien n’était. Il a été un vrai homme politique qui garde ses convictions. C’est un bon homme.

Claude Dupras

Ps. Aujourd’hui, les « purs et durs » séparatistes le dénigrent à qui mieux mieux. Ils l’accusent d’avoir « botché » le référendum de 1995, donc d’être le responsable de la défaite. Ils ne l’aiment pas parce que comme d’autres personnages sérieux qui connaissent bien la situation politique québécoise, tel l’ex-ministre péquiste François Legault, Lucien Bouchard affirme qu’un nouveau référendum n’est pas gagnable à ce moment-ci. Ces « purs et durs » irréalistes seraient mieux de se regarder dans le miroir avant de critiquer les autres. N’est-ce pas eux qui viennent d’organiser, le 19 février dernier, une manifestation devant le parlement de Québec pour exiger le départ de Jean Charest ? Elle devait être extraordinaire et répercutante mais elle n’a attiré que 45 personnes. Cette manifestation manquée est devenue le plus grand « flop » organisé par des séparatistes, indépendantistes ou souverainistes depuis que l’on parle de séparation au Québec.

lundi 21 février 2011

Ça fera, la mauvaise information par les artistes….

Roy Dupuis est un acteur québécois qui joue dans des films internationaux. Il a un talent unique et est parmi les meilleurs comédiens que nous avons au Québec.

Bel homme, simple, humble, à la voix grave, il sait enchanter et convaincre. Et les écologistes le savent et le recrutent pour être leur porte-parole. À la dernière émission télévisée de la très populaire « tout le monde en parle », Dupuis a abordé le sujet de la construction des centrales hydroélectriques sur la rivière « La Romaine » dont la réalisation par Hydro-Québec se terminera en 2020.

C’est un immense projet qui générera 1 550 mégawatts (MW) qui viendront s’ajouter au 36 810 MW actuels. Avec ses 60 centrales hydroélectriques et une centrale nucléaire, Hydro Québec est le quatrième plus grand producteur mondial d'hydroélectricité. Cette production d’une énergie propre, fiable et renouvelable fait l’envie du monde. L’Hydro Québec est une société remarquable et la fierté des Québécois et Québécoises.

Or Dupuis est venu avec conviction raconter des conneries pour dénigrer ce projet et la compagnie Hydro Québec. Il parlait au nom d’un groupe qui se veut protecteur des rivières du Québec. Il n’a fait qu’affirmer des faussetés pour chercher à faire croire que le projet de « la Romaine » est indéfendable. Il n’en sait rien et il l’a admis lui-même lorsqu’il n’a pu répondre à une question précise. En fait, il a appris son rôle des gens qui l’ont engagé et répète par cœur leurs rengaines contre l’Hydro Québec.

Ce que je n’ai surtout pas apprécié parmi les déclarations inopportunes de Roy Dupuis, c’est celle avec laquelle il a affirmé que ce projet n’a pas été décidé dans l’intérêt des Québécois mais simplement pour satisfaire les entrepreneurs de construction, amis du régime. À l’écouter, on se penserait en vraie république de bananes. Le PM Charest aurait engagé 9,5 milliards $ pour n’aider que ses amis… quand même !

De plus, Roy Dupuis est l’animateur du film « Chercher le courant » sur « la Romaine ». Les applaudissements debout à la fin de chaque représentation, en font un succès assuré. L’animateur Guy A. Lepage, a prédit que les cinéphiles en sortiront avec une bien mauvaise opinion du projet et de l’Hydro. Le scénario s’axe sur cette grande et magnifique rivière sauvage du Québec, mais, à mon avis, les arguments pour convaincre les Québécois, que le projet de « la Romaine » est mauvais, ne tiennent pas la route.

Actuellement, le taux d’électricité est de 6,88¢ le kWh partout au Québec, le plus bas des pays industrialisés.

Suite à l’opportunité qu’a eue l’Hydro Québec d’obtenir pour le financement du projet, des taux d’intérêt plus bas qu’originalement prévus, le coût de l’électricité qui produira « la Romaine » a été revu et est maintenant fixé à 6,4¢ le KWh (en $ de 2015), et non 9,8¢ comme l’affirment toujours les opposants du projet.

L’électricité générée par les quatre centrales qui ont une vie de près de 100 ans est dédiée aux marchés américains qui sont actuellement de gros clients du Québec. Le prix de départ de la récente entente avec le Vermont est de 5,8 le kWh. Il évoluera en fonction du marché. Il est donc inexact d’affirmer, comme le font les opposants, que le prix est fixe pour 25 ans. De toute évidence, il dépassera éventuellement et rapidement celui du coût de production.

L’Hydro Québec favorise aussi la production d’électricité par d’autres sources, mais elle est coûteuse. Ainsi, l’éolien, une production intermittente d’électricité, coûte 13,3¢ le kWh, incluant le transport. Le solaire, aussi intermittent, coûte au moins 25¢ le kWh. La biomasse et le biogaz au Québec s’obtiennent aujourd’hui à 11,2 ¢ le kWh, incluant le transport, mais les projets sont petits.

Lorsque les adversaires du projet « La Romaine » proposent l’éolien ou une autre méthode de production d’électricité pour le remplacer, ils se moquent de l’intelligence des québécois.

Je suggère que Roy Dupuis et les artistes du Québec se concentrent sur leur métier d’acteur. Ainsi les vaches seront bien gardées…

Claude Dupras

vendredi 18 février 2011

Oui, à l’escouade permanente de lutte anticorruption !

Le gouvernement du Québec vient de proposer la structure d’une nouvelle « escouade permanente de lutte anticorruption ». C’est une très bonne idée. Une fois mise en place, j’ai la conviction que ce sera un moyen efficace pour arrêter la gangrène mafieuse qui ronge le milieu de la construction au Québec et qui coûte si cher aux contribuables.

Le 14 mai 2009, j’écrivais dans mon blog intitulé : Rien ne va plus, ce qui suit :

« Rien ne va plus dans les coûts de construction à Montréal. Les dépassements des estimés prévus pour les grands projets d’infrastructures et de bâtiments importants sont incompréhensibles. Tout passe du simple au double quand ce n’est pas au triple….

… Que se passe-t-il ? Sommes-nous victimes de fraudeurs ? Les estimateurs sont-ils de complets ignorants ? Y-a-t-il une mafia qui s’est installée dans le domaine de la construction avec comme but de souffler les prix et les profits ? Ce ne sont pas les questions qui manquent…

Une vraie solution serait la mise sur pied par le gouvernement du Québec d’une commission d’enquête sur les coûts de construction. Il est urgent de bien comprendre ce qui se passe afin de faire les corrections nécessaires car le Québec va entreprendre dans les cinq prochaines années plus de 45 milliards $ de travaux d’infrastructures
».

Par après, devant le refus du PM Jean Charest de déclencher une telle commission d’enquête, je l’ai réclamée, comme tant d’autres par la suite, encore et plusieurs fois.

Aujourd’hui, enfin, nous sommes devant une proposition concrète inspirée de ce qui se fait à New York pour combattre efficacement la pègre, avec l’exception que cette escouade permanente ne sera pas sous la direction d’un commissaire autonome comme là-bas.

À mon avis, la commission d’enquête sur la construction tant réclamée au Québec n’est plus nécessaire. Elle aurait coûté au moins 200 millions de $ (la petite commission Bastarache n’a-t-elle pas coûté 5 millions $ ?), et aurait duré plusieurs années sans que nous soyons certains que les vrais coupables soient démasqués.

La nouvelle escouade permanente assimilera les effectifs de l’escouade policière ponctuelle « Marteau » qui agit actuellement et sera dirigée par un commissaire qui relèvera du ministre de la Sécurité publique et qui devra faire rapport à la population, aux trois mois, de l’évolution de ses dossiers. Son personnel sera composé en partie de fonctionnaires de plusieurs ministères reliés à la sécurité publique et au domaine de la construction.

Si en 2008-2009, lorsque les coûts des travaux de construction se sont enflammés, cette escouade avait existé, j’ai la conviction qu’aujourd’hui le problème serait réglé.

Il reste maintenant à l’opposition parlementaire de reconnaître le potentiel réel de la nouvelle escouade et de collaborer avec le gouvernement afin que la loi à être votée soit la meilleure possible. Par exemple, elle pourrait réclamer que le commissaire soit autonome au lieu de devoir répondre au ministre. Il me semble que le travail de cet Elliot Ness québécois serait ainsi plus efficace.

L’opposition devrait prendre le crédit de la formation de la nouvelle escouade car sans sa pression constante à exiger une commission d’enquête, la nouvelle escouade permanente de lutte anticorruption n’aurait pas été formée.

Si, par contre, l’opposition continue sa rengaine pour obtenir une commission d’enquête et dénigre les mérites de la formation de la nouvelle escouade, je crois que l’on pourra conclure qu’elle est de mauvaise foi et n’œuvre pas dans l’intérêt du Québec.

Claude Dupras

samedi 12 février 2011

Allez, allez, jeunes Algériens, c’est à votre tour…

Quelle journée inoubliable que ce 11 février 2011 pour l’Égypte! Quelle journée, belle à vivre! Quelles journées que celles des révoltes tunisienne et égyptienne ! Enfin, enfin les arabes réagissent ! Du jamais vu.

Lorsqu’on visite les pays arabes, on s’interroge sur la raison de la soumission des arabes envers leur gouvernement. On les sait pris dans l’engrenage d’un pouvoir corrompu, armé et sans pitié qui utilise la peur pour les contenir. Mais on ne peux comprendre pourquoi ces peuples intelligents, d’une grande humanité, pratiquent la politique du laisser-faire comme s’ils n’avaient pas d’autres choix. Pourquoi acceptent-ils la pauvreté du peuple, la privation des libertés, la corruption des élites, l’État répressif ? Pourtant, ils connaissent par la télé et les médias, la qualité de vie des peuples occidentaux. Ils en rêvent au point qu’un très grand nombre d’entre eux ont réussi à émigrer avec leurs familles vers les pays démocratiques afin de vivre mieux et de s’échapper de leur enfer.

Mais cela ne durera pas éternellement car « il n’y a pas de fatalité de la dictature arabe ». Pas plus qu’en Amérique du sud, comme on a vu. L’évolution technologique, la télévision avec la chaîne arabe Al-Jazeerra et le développement de réseaux sociaux d’internet leur permettent, enfin, de se renseigner, de se rallier et de réagir. Les Tunisiens leur ont montré comment faire. Les Égyptiens viennent de leur démontrer que tout est possible. Les citoyens des autres pays arabes comprennent maintenant que la révolte n’est pas nécessairement un saut dans un inconnu périlleux.

Ces journées de révolte nous ont fait comprendre, à nous Occidentaux, que les arabes sont des gens comme nous. Je crois que nous ne les regarderons plus de la même manière que par le passé.

La révolte doit continuer ailleurs jusqu’à ce que tous les pays arabes aient un gouvernement démocratique. Le prochain éclatement peut être l’Algérie. Et c’est pourquoi, je fais appel à tous les Algériens, et particulièrement aux jeunes, pour qu’ils se lèvent et contestent leur gouvernement afin de le faire fuir, comme les autres. Le président algérien Abdelaziz Bouteflika, élu par des élections truquées, dirige son pays, de 35 millions d’individus, d’une main de fer grâce à l’armée et aux services de sécurité. En fait, ce sont les indélogeables généraux sans légitimité qui sont au pouvoir. Ils se partagent le butin et sont corrompus jusqu’à la moelle. Ils ont des intérêts dans toutes les grandes compagnies qui fournissent des services ou du matériel au pays. C’est le contraire de l’armée Égyptienne.

L’Algérie a beaucoup souffert de son passé. La guerre de libération a duré huit ans et s’est terminée en 1962 par l’indépendance, suite à des centaines de milliers de morts. Puis, ce fut l’échec total du socialisme totalitaire à la soviet choisi comme modèle de développement par Boumediene et le FLN. Ensuite, en 1991, l’armée annula les résultats de l’élection après que le Front Islamiste du Salut (FIS) l’eut gagnée démocratiquement, à cause de la pauvreté envahissante qui existait au pays à ce moment-là. La majorité des dirigeants du FIS ont été mis en prison. Les islamistes-vengeurs assassinèrent plus de 200,000 innocents algériens : hommes, femmes et enfants. Les services de sécurité ont été créés et la loi des mesures d’urgence a été appliquée. Vingt ans plus tard, ces derniers et l’armée gardent toujours une main de fer sur la vie des Algériens et Algériennes et la loi d’urgence est encore en force.

Il y a cinq ans, j’ai été victime de ce contrôle sécuritaire, lors d’un voyage en Algérie. Alors que je captais des photos de ce très pittoresque pays, une voiture non identifiée, arriva à pleine vitesse, s’arrêta à angle devant la nôtre et quatre individus en civil ouvrèrent rapidement les portes pour se lancer vers moi en courant et en exigeant mon permis de photographier. J’ignorais que cela était obligatoire. Ce n’est que grâce à l’intervention des Algériens qui étaient avec moi et à leur statut dans la société, que je m’en suis sorti. Et cela persiste toujours On comprend pourquoi il n’y a pas de touristes dans ce pays alors que les pays voisins, le Maroc et la Tunisie, en débordent même si l’Algérie est de beaucoup plus intéressante et spectaculaire.

Le 22 janvier dernier, une première manifestation contre le gouvernement eut lieu alors que 300 jeunes descendirent au centre d’Alger. Elle fut vite contrôlée sous prétexte qu’ils n’avaient pas de permis. Le bilan : sept morts, 32 personnes blessées, sept arrêtées. Ailleurs, deux Algériens s’immolèrent. Hier, lors du succès des Égyptiens, il fut défendu aux Algériens de manifester publiquement leur joie.

Aujourd’hui, le 12 février 2011, alors que j’écris ces lignes, une nouvelle manifestation est en marche dans la capitale malgré que le despote Bouteflika ait défendu toute manifestation à Alger (il dit permettre les manifestations dans les autres villes). Les premiers rapports de presse indiquent qu’ils sont seulement 200 à protester alors que 30 000 policiers sont déployés dans toute la ville avec leurs équipements, camions, canon-d’eau, etc. De toute évidence, les gens ont peur de l’armée et de la prison.

Si les Algériens veulent avoir leur place au soleil, ils devront sortir plus nombreux sur la place publique pour la réclamer. Surtout la jeunesse innombrable, pauvre, moins religieuse, mieux éduquée, plus nationaliste, sans emploi, désespérée quant à son avenir qui ne supporte pas la corruption et qui refuse l’autorité en place. Pour se faire, elle doit se mobiliser et se politiser. Avec internet, elle sait mieux que ses aînés comment s’informer et traduire les sentiments de chacun en un effort collectif. Cela exigera beaucoup de leadership et de courage.

J’espère aussi que la diaspora algérienne manifestera partout dans le monde pour faire pression sur les gouvernements comme le Canada et les encourager à dire à Bouteflika et ses comparses : « Dégagez ».

Claude Dupras

jeudi 10 février 2011

L'amphithéâtre pour Québec : Un rêve irréaliste

Le premier ministre du Québec et le maire de Québec viennent d’annoncer conjointement la construction d’un amphithéâtre multifonctionnel au coût de 400 millions $ à Québec payé par les taxes : 50% par l’ensemble des Québecois et 50% par les citoyens de la ville de Québec.

Après que le gouvernement fédéral et les entreprises privées eurent refusé de se joindre à la réalisation de ce projet, le maire a imaginé un semblant de montage financier public « initial et final » pour le réaliser d’ici 2015. Pour lui c’est facile : ce sont ses payeurs de taxes qui vont payer la contribution de 200 de millions $. Il a vite oublié sa promesse, faite lors de la dernière campagne électorale qui l’a réélu, de limiter à 50 millions $ la part de sa ville. Il croit que ses concitoyens accepteront avec satisfaction ces nouvelles charges puisque, dit-il, « ils veulent à tout prix un nouvel amphithéâtre ». Je crains qu’il soit désagréablement surpris de leurs réactions.

Ce qui me surprend et me désappointe c’est la décision du PM québécois Jean Charest d’accorder 200 millions pour ce rêve irréaliste. Alors que la dette du Québec augmente; que le déficit croît; que le gouvernement serre la ceinture à tous les ministères; que le système de santé, déjà saturé, devient de plus sollicité par la population; que les procureurs publics sont en grève; etc….voilà que le PM choisit de faire de la petite politique afin que sa cote de popularité remonte dans la région de Québec où elle est décroissante depuis un bon moment. Ce n’est pas à son honneur, mais il faut dire, en même temps, que la chef de l’opposition, Madame Marois, est aussi favorable au projet car elle n’a pas les moyens politiques de l’opposer, étant donné qu’elle veut battre les députés libéraux de la région de la ville de Québec, aux prochaines élections. En somme, nos politiciens sont tous pareils, ils n’ont pas de couilles !

Charest et Labeaume ont employé tous les arguments et qualificatifs pour justifier leur projet : Québec est une ville modèle; le futur moteur économique de la province; un projet qui deviendra une source de fierté pour la capitale nationale; il faut avoir confiance dans l’avenir; ce sera un appareil urbain catalyseur pour le développement de la ville; une action de courage politique; sans augmentation de taxes; un projet à la hauteur des ambitions des citoyens de l’Est du Québec; etc.. comme si c’était suffisant pour le faire accepter.

Le maire prétend pouvoir baisser les dépenses de la ville de 20% durant les prochaines années pour trouver l’argent nécessaire à la construction de l’amphithéâtre. Si c’est possible, cela voudra dire que les citoyens de Québec ont été mal administrés et ont payé trop de taxes dans le passé. Sinon, cela veut dire que le maire devra couper dans les services aux citoyens. On verra bien, ce jour là, la réaction de ces derniers. En réalité, il est clair que le maire Labeaume dit n’importe quoi !

D’ailleurs le maire a admis lui-même durant la conférence de presse, qu’un tel édifice n’est pas rentable sans une équipe de hockey sur glace, et il le propose quand même ! Même si la ville de Québec a connu un développement économique satisfaisant depuis quelques années, ce n’est pas une ville où il y a beaucoup de richesses. C’est une ville de fonctionnaires. La population du bassin régional est petite, même si on y ajoute celui du Bas-Saint-Laurent. Cela n’a rien à voir avec Montréal. D'ailleurs, il faut se rappeler que la ville de Québec a déjà eu une équipe professionnelle d'hockey sur glace "Les Nordiques de Québec" et l'a perdue car ce n'était pas rentable pour les propriétaires.

Un tel amphithéâtre est rentable si les loges dédiées aux compagnies privées sont toutes vendues. Or le nombre de grosses compagnies à Québec est limitée et ce ne sont sûrement pas les ministères ou les agences gouvernementales qui achèteront ces loges qui coûtent entre 100M$ et 200M$ par an. Quant à l’obtention d’un club de hockey professionnel, rien n’est certain de ce côté-là d’autant plus que le président de la LNH a dit et répété que Québec ne peut s’attendre à obtenir une équipe dans la ligue. Sans hockey, c’est 55 jours de location perdue. Le centre Bell de Montréal, serait-il rentable sans l’apport du club d’hockey « Les Canadiens »?

Quant aux spectacles comme ceux de Céline Dion, y aura-t-il suffisamment de personnes prêtes à payer les prix exorbitants demandés pour assister à ces représentations, comme à Montréal où la population régionale dépasse les trois millions d’habitants ! Et les individus qui dépenseront une partie de leur budget « spectacles » pour aller au nouvel amphithéâtre de Québec, auront-t-ils suffisamment de fonds pour continuer à assister au même nombre de représentations théâtrales auxquelles ils assistent aujourd’hui ?

Une ville américaine Kansas city a suivi le trajet que Québec entend suivre. Elle a construit son amphithéâtre de rêve mais n’a pas obtenu l’équipe professionnelle qu’elle espérait. Depuis, c’est un éléphant blanc.

Le cirque médiatique d’aujourd’hui n’est pas à l’honneur de ceux qui l’ont organisé, d’autant plus que suite à l’annonce du projet, les journalistes qui posaient des questions pointues ont été vitement rabroués par le maire, comme s’ils étaient de purs ignorants. Ce dernier s’est même moqué du gouvernement fédéral qui exigeait, comme il se doit, une étude technique et économique sur l’ensemble du projet avant de décider s’il devait y contribuer. L’arrogance du maire est inacceptable. Elle démontre que le projet est bâclé et qu’il y a dans tout cela un manque d’éthique et de morale.

Claude Dupras

dimanche 6 février 2011

Que penser des Frères musulmans égyptiens ?

La révolte égyptienne met de plus en plus en évidence les Frères musulmans. Qui sont-ils ? Un groupe islamiste militantiste et politique comme le Hamas de Palestine, le Hezbollah du Liban ou l’ex-FIS d’Algérie ? Un groupe relié à Al-Qaïda ? Un groupe de purs et durs musulmans qui ne voient que dans l’Islam la solution aux nombreux problèmes des arabes et veulent un État islamiste ? Un groupe qui a comme objectif d’amener la religion musulmane à l’heure du monde ? C’est à ces questions que je vais tenter de répondre dans ce billet.

Aujourd’hui, un délégué des Frères musulmans rencontre, pour la première fois, le nouveau vice-président Égyptien pour discuter de l’évolution de la révolte et des solutions possibles. Tout de suite, cette nouvelle a soulevé une clameur chez les médias qui à ce jour amenuisaient l’importance des Frères musulmans dans le pays et dans la révolution et qui maintenant les discréditent et les représentent comme un grand danger pour Israël et pour les USA. Qui mousse ces affirmations ?

L’histoire nous enseigne que ce mouvement a été créé par des érudits musulmans égyptiens pour sortir des mosquées les idées moyenâgeuses et moderniser leur religion. Un but qui ressemble étrangement à celui des protestants d’Europe. Parmi leurs premiers objectifs a été l’éducation des femmes musulmanes.

Les Frères musulmans ont été à la base de la résurgence du nationalisme égyptien et ils n’ont jamais défendu l’idée d’un régime politique calqué sur les lois musulmanes du passé. Au contraire, le mouvement a fait la promotion des droits et de la liberté de tous les citoyens égyptiens incluant les Coptes chrétiens. Par hasard, ce matin nous avons un bel exemple de ce qui précède, dans le parc Tahrir au Caire où se rassemblent les protestataires révolutionnaires, puisque les Coptes ont célébré publiquement la messe, entourés par les musulmans qui les protégeaient. C’est une pertinente image de ce que proposent les Frères musulmans.

Politiquement, les Frères musulmans défendent les droits des individus et la pluralité politique. D’ailleurs, c’est la vraie raison qui a motivé le régime Moubarak à les combattre sans cesse et à les disqualifier politiquement. Le prétexte de ce dernier à l’effet que les partis politiques confessionnels ne pouvaient contester une élection, n’était en fait qu’une manœuvre pour conserver le pouvoir.

De plus, avec la montée des islamistes fondamentalistes en Arabie et la catastrophe du World Trade Center, Moubarak profita habilement de cette situation pour effrayer les USA et les Européens avec la perspective d’une Égypte dirigée par les Frères musulmans. Il les jugeait forts et capables de changer le statut géopolitique du pays ainsi que la forme du régime (pour le rendre démocratique). Ce qui a permis au gouvernement Moubarak de brandir la carte de la menace islamiste à l’étranger.

Depuis toujours, les Frères musulmans ont défendu les mêmes valeurs morales et universelles que l’Occident, alors que les échos qui sont venus jusqu’à nous les décrivaient comme un mouvement populaire anti-démocratique qui ne contemplait que son nombril.

Les Frères musulmans n’ont pas commencé la révolution égyptienne d’aujourd’hui. Ils n’ont pas réagi, le 6 avril, lors de la première démonstration de jeunes. Ils n’étaient pas là, il y a à peine 15 jours, lorsque le peuple, motivé par la révolution tunisienne du jasmin, a décidé de faire de même et d’aller sur la place publique exiger un changement de régime et la démocratie. Ils expliquent qu’ils ne croyaient pas possible que cette révolution devienne ce qu’elle est devenue et qu’ils ne voulaient pas mettre en péril tous leurs réseaux de services sociaux par lesquels ils aident les plus pauvres de la société égyptienne. Ils affirment avoir agi par prudence pour éviter les foudres de Moubarak et le démantèlement de leurs activités.

Mais aujourd’hui, comme les autres Égyptiens, les Frères musulmans croient possible de renverser le Rais et se sont joint activement à la révolte. À cause de leurs actions humanitaires dans la population, les Frères musulmans ont de 25 à 30% d’appuis chez le peuple égyptien. C’est beaucoup. Leur parti est le seul en opposition à Moubarak qui est bien organisé. Il est donc normal qu’ils soient au premier rang pour discuter du changement de régime puisqu’ils sont incontournables. Le mouvement a affirmé, il y a quelques jours, qu’il ne présentera pas de candidat à une future élection présidentielle mais veut faire partie du gouvernement pour assurer que celui-ci interviendra pour aider socialement les Égyptiens.

Les Frères musulmans ne doivent pas être l’unique invité à la table des négociations, car cette révolution n’est pas la leur mais celle des jeunes et de tout le monde.

L’Égypte pourrait se doter d’un système démocratique laïc semblable à celui de Turquie, qui est aussi un pays musulman. Avec une telle constitution, des structures de programmes d’aide aux citoyens seront mis en place et le besoin des services sociaux que donnent les Frères musulmans ira en diminuant. Cela sera la démonstration que le fléau islamiste peut disparaître si des gouvernements démocratiques offrent les mêmes services ou mieux.

Claude Dupras

vendredi 4 février 2011

Laïcisation ou islamisme

La révolution dans le monde arabe, commencée en Tunisie, l’appelle à décider de son avenir. Veut-il continuer à accentuer davantage la spirale ascendante de l’islamisme ou veut-il choisir la route de la laïcité ?

Nous, démocrates, nous réjouissons de la chute des gouvernements bâtards et dictatoriaux qui s’annonce, du Maghreb au Moyen-Orient. Il est temps que chutent ces régimes qui règnent dans la terreur et la corruption, manquent à leurs devoirs et imposent la force pour se tenir en place. Il est temps que tous les arabes puissent bénéficier de liberté, de transparence politique, d’élections ouvertes et libres et d’institutions qui les respectent, les consultent et leur donnent des mesures économiques et sociales justes et équitables.

Le nouvel espoir du monde arabe fait craindre ses dirigeants. La police secrète de Moubarak sème la terreur, la police de Bouteflika n’arrive pas à éteindre la flambée contestataire des Algériens, les Jordaniens s’élèvent contre leur roi même s’il a limogé son premier ministre, la Syrie bougeotte, le gouvernement du Yémen est en danger. Partout, ailleurs, les remous se font sentir. On peut penser que si l’Égypte tombe, le reste suivra vite.

Malgré ces changements inespérés et tant attendus, plusieurs dirigeants occidentaux craignent les renversements de ces systèmes politiques. Par exemple, le PM Harper du Canada d’Harper est partagé entre la politique américaine et celle d’Israël, à qui il est vendu, qui veut maintenir Moubarak. D’autres, qui ne voient que les islamistes fondamentaux dans leur soupe, croient en la possibilité d’une prise de pouvoir de ces derniers. Ils identifient les Frères musulmans égyptiens au Hamas et à l’Hezbollah. Ils se rappellent l’élection libre de 1990 en Algérie où le Front Islamique du Salut (FIS) a été élu (il a été empêché de gouverner et ses dirigeants ont été emprisonnés par l’armée).

Pour eux, qu’importe si les 85 millions d’Égyptiens et Égyptiennes vivent dans la dèche et que 40% n’aient pas d’éducation, qu’importe si les 300 millions d’arabes de cette partie du monde subissent des dictatures qui minent leur vie. Ce qui compte, c’est de combattre une poignée d’islamistes.

Il me semble clair, et un très grand nombre d’observateurs le disent, que les révolutions tunisienne et égyptienne ne sont pas le fruit des islamistes mais celui du peuple tout entier, et particulièrement des jeunes. Ce sont ces derniers qui empêcheront les islamistes fondamentalistes de venir gâter le changement vers la démocratie dont ils rêvent et ont besoin.

J’ai travaillé durant sept ans en Algérie et j’ai connu un très grand nombre d’Algériens dont beaucoup de jeunes. Je n’ai presque jamais constaté chez ces derniers des sentiments antioccidentaux, de la violence, du dogmatisme, de la haine de l’autre, du non-respect des femmes... Pourtant, je les ai trouvés souvent frustrés devant la condition dans laquelle ils se retrouvaient, choqués, blessés et désespérés de ne pouvoir rien faire de leur vie. Je les voyais grandir debout aux coins des rues, sans argent, sans emploi et sans espoir, d’année en année. Plusieurs, mais pas tous, trouvaient dans la prière un refuge, dans l’Islam la solution. Mais elle n’est pas venue.

Par contre, la télévision, l’internet, les communications, les développements technologiques leur ont fait connaître la qualité de vie, la liberté et le potentiel d’un développement personnel qui existent de l’autre côté de leurs frontières, du côté de l’Occident où est la démocratie. Ils en avaient le goût et espéraient un miracle, et voilà que les Tunisiens leur ont montré le chemin. Ils sont maintenant encouragés, motivés et prêts à tout faire pour enfin se sortir des méandres interminables où ils se trouvent et obtenir leur part de cette qualité de vie. Ils ne laisseront pas les fanatiques religieux de leur pays leurs enlever cette opportunité.

Le cœur et la raison dictent aux arabes que la démocratie est la solution. Ils sont prêts à y accéder, à moderniser à leur façon leur pays et même à participer, comme leurs ancêtres, au développement universel.

Ils savent que leur prochain gouvernement ne peut être islamiste car ce serait limiter « la tolérance mutuelle entre majorités et minorités d’origines différentes, la liberté de conscience de chaque citoyenne et chaque citoyen, l’égalité des droits, notamment entre hommes et femmes ». Ils comprennent que la laïcité permettra d’atteindre ces objectifs.

Nous sommes témoins actuellement d’une révolution tsunamienne du monde arabe. Cela est aussi important que le fut le renversement du communisme en Russie et en Europe de l’Est des années ‘90. Ce sont des moments qui libèrent les peuples et changent profondément le monde.

Claude Dupras