samedi 12 octobre 2013

La Charte Islamique du Nouveau Monde

J’entretiens, depuis un certain temps, un dialogue politique sur les évènements du jour avec un ami internet, Antoine Théorêt, qui dans sa tendre jeunesse était Verdunois, comme moi. Nous sommes donc issus du même milieu. Il a eu une carrière exceptionnelle de scientiste.

Depuis un mois, nos échanges portent sur la charte des « valeurs québécoises », pour laquelle nous ne partageons pas tout-à-fait la même opinion.

Dans mon dernier message, je lui posais la question suivante : « Tu parles de liberté de la majorité. N’est-elle possible que s’il n’y a pas d’entrave à la liberté individuelle ? ». Voici son intéressante réponse que je publie dans l’espace de mon blog. Je vous invite à la commenter. Merci.

Claude Dupras

La Charte islamique du Nouveau Monde !

Le sujet des droits individuels versus les droits collectifs est complexe dans un pays de multiculturalisme. Malgré la multitude des points de vue, je suis convaincu que dans une discussion franche et sereine nous trouverions rapidement, en gens raisonnables que je crois que nous sommes, plus de points de convergence que de divergence sur la question de la charte des « valeurs québécoises ». Je vous soumets donc sommairement avec tous les risques que cela comporte mes réflexions sachant que vous y apporterez toutes les nuances requises compte tenu des raccourcis que j’emprunte pour présenter mon opinion sur un sujet délicat qui soulève toutes les passions.

La longue histoire des relations entre le monde chrétien et le monde islamique a toujours été dans l’ensemble trouble et difficile. Aujourd’hui, dans la grande majorité des pays chrétiens, les religions ont conservé leur influence morale mais perdu leur influence politique au nom du principe de la laïcité de l’état tandis que dans la plupart des pays islamiques, il est difficile de dissocier politique, culture et religion.

Or, l’Islam projette à tort ou à raison une image de violence et d’intolérance sans doute à cause de la voix dominante de ses éléments extrémistes, fondamentalistes et fanatiques; leur prosélytisme religieux jette un malaise certain dans nos sociétés occidentales avec leurs valeurs de charia, de lapidation, d’amputation, de tous ces signes de soumission de la femme, de crimes d’honneur, d’attentats suicides, de réseaux terroristes…

Je suis convaincu que les peuples islamiques sont honorables et pacifiques mais qu’ils ont hérité de conditions de vie économiques et politiques très difficiles dont nous sommes en partis responsables en raison de nos interventions colonialistes. Les gens ne viennent pas au monde violents. La violence provient de l’environnement dans lequel les gens évoluent et nait le plus souvent du désespoir, de l’injustice, du sentiment profond d’exclusion. Les pays islamiques vivent depuis des générations dans la tourmente des révolutions et des guerres civiles, religieuses et d’interventions étrangères; l’injustice appelle l’injustice, la violence répond à la violence.

Lorsque je lis ou regarde, soir après soir, des reportages sur la Syrie, l’Irak, l’Égypte, la Palestine…. je suis profondément choqué et sympathise sincèrement avec toutes ces gens qui doivent subir quotidiennement et injustement les terribles conflits de factions rivales. Je suis donc ouvert à l’accueil de tous ces immigrés, réfugiés ou exilés, qui viennent s’établir chez nous pour chercher un avenir meilleur et enrichir notre société. Ce ne sont pas les signes ostentatoires en soi qui sont dérangeants mais les symboles qu’ils véhiculent, même si la majorité de ceux qui les portent le font par conviction sans intention mauvaise ou en toute innocence; Jean-Louis Roux serait bien placé pour en témoigner ! Les croyances religieuses sont des choses personnelles qui relèvent du domaine spirituel et de l’irrationnel.

Cependant, contrairement aux immigrés européens, sud-américains ou asiatiques avec le Dalai Lama faisant figure de superstar internationale, les musulmans, les sikhs et les hindouistes sont plus revendicateurs, visibles et volubiles à manifester leur différence, ce qui rend leur intégration plus problématique. Un article récent du Vancouver Sun propose cette hypothèse et montre qu’il n’y a pas qu’au Québec, contrairement à ce que l’on pense et dit, qu’il existe un certain malaise. Au Canada aussi : http://blogs.vancouversun.com/2013/10/05/interfaith-marriage-in-canada-fewer-approve/

La démocratie et les valeurs de liberté sont fragiles. Je ne crois pas que la très grande majorité de ces immigrants soit foncièrement menaçante et présente un danger potentiel imminent; il n’y a pas de quoi être alarmiste. Toutefois, il y a des motifs raisonnables pour exercer une certaine vigilance, d’expliquer les règles, les limites et la surface de jeu de nos valeurs démocratiques à ces nouveaux québécois comme c’est le cas dans plusieurs pays étrangers; c’est comme les vaccins contre la grippe mieux vaut prévenir que guérir même si les risques d’attraper la grippe sont faibles! Comme le montre présentement la crise budgétaire américaine, il n’a fallu que de quelques fanatiques du Tea Party, comme Ted Cruz et Paul Ryan, pour paralyser l’appareil gouvernemental et fausser le jeu démocratique. La dernière élection en Égypte d’un islamiste issu des « frères musulmans » à la présidence a plongé ce pays au bord de la guerre civile. En Iran, le retour d’un seul homme, Khomeiny, a radicalement bouleversé les mœurs politiques et sociales de ce pays.

Nous avons nous aussi le droit d’affirmer nos valeurs, défendre nos coutumes, nos traditions et définir les limites de notre tolérance sans à avoir à se faire traiter de racisme, de xénophobie ou de féminisme enragé. Les Québécois ne forment pas une race puisque, fruit de notre métissage, il coule doucement dans nos veines une bonne dose de sang indien, irlandais, anglais, italien…. et je ne crois pas que nos traditions catholiques nous aient inculqué le germe de la xénophobie! Par contre, j’admettrais volontiers que nos esprits sont, malheureusement, fortement contaminés dans le présent débat par la partisannerie politique! Il n’est pas question d’ostraciser les musulmans mais plutôt d’ouvrir un dialogue intelligent et respectueux comme l’ont fait ces deux femmes musulmanes à l’émission TLMP et que d’autres voix sages et raisonnables comme celle de messieurs Parizeau, Bouchard et Landry se fassent entendre.

Antoine Théorêt

NB : Je pose à mon tour une question provocatrice. Comment se comparent les mesures proposées par la Charte par rapport aux moyens pris par Duplessis à l’époque pour contrer les communistes et les témoins de Jéhovah ?

4 commentaires:

André D. a dit…

Bonjour Claude, pour la première fois.

Brièvement je viens te dire quelques souvenirs de ma foi religieuse qui m’ont toujours soutenu.
1- Je suis âgé de 77 ans, je suis remarié et nous avons quatre enfants et six petits enfants.
2- Ma première épouse est décédée un mois après notre mariage, un accident, une tragédie.
3- …Quatre morts. J’ai survécu à un traumatisme crânien de trois mois, une année sans travailler.
4- Religion : Je suis un ancien religieux des frères des écoles chrétiennes .
5- J’ai enseigné quatre années religieux, trente-et-un ans laïc.
6- Ma formation religieuse. À 12 ans le frère professeur qui m’a inscrit au juvénat
m’a fait réussir ma sixième année que je recommençais et aimer la lecture.
Le hockey j’étais (un bon joueur) m’a soutenu à travers ma formation surtout religieuse.
Un exemple : Je connaissais les résultats des parties du Canadien par un compagnon
responsable du journal Montréal Matin. Il me les disait en allant communier à la messe.
7- Le crucifix ne m’a jamais impressionné. La sainte vierge vêtue de bleue probablement.
8- Je ne peux pas me défaire de l’oubli de sois, de la prière dans les difficultés de la vie.
9- (Ma première épouse âgée de 20 ans à son décès sans enfant)« aussi » fut pour moi une aide
que d’autres qualifieraient de maladive.

En complément à la Charte du nouveau monde des valeurs québécoises.
À chacune à chacun son chemin à sa réussite particulière dépendante
j’ose dire chance et malchance. LA FOI EST UN DON DE DIEU, de dieu DE…

Claude Dupras a dit…

Tout au long de son histoire canadienne, le Parti communiste du Canada a vécu longtemps dans la clandestinité à cause des règlements en rapport avec la défense du Canada de 1920 à 1943, jusqu’au moment où Fred Rose fut élu député communiste dans le comté de Cartier au centre-ville de Montréal. Il fut le premier communiste à siéger à la Chambre des communes. Ce sont les pauvres ouvriers, entre autres ceux et celles qui travaillaient dans le quartier de la « guenille » à des salaires de crève-faim et des conditions inacceptables qui ont votés pour lui. Son parti chercha alors à étendre son influence dans le mouvement ouvrier canadien et québécois. En 1945, Rose est réélu mais un an plus tard, il est arrêté par la RCMP pour espionnage en faveur de l’URSS suite à la défection d’un membre de l’ambassade soviétique d’Ottawa, Igor Gouzenko, qui révéla 190 documents prouvant l’existence de réseaux d’espionnages soviétiques dans notre pays. Québec est alors perçu comme un nid d’espions. Je me rappelle bien les réactions de mon père et de la crainte qu’il manifestait face aux communistes. J’avais été marqué par cela.

En 1937, lors de son premier mandat, Duplessis poussé par les autorités ecclésiastiques, qui ne voit dans les communistes que des athées, fait voter la « loi du cadenas ». Le gouvernement a alors le pouvoir de cadenasser toute maison, école ou bâtisse utilisée pour ou par des communistes ou « bolcheviques ». Les Canadiens-Français craignent la politique de ces derniers par laquelle tout est fait par l’État, tous les biens sont saisis par l’État afin d’être mieux répartis à tous. Les cultivateurs du Québec craignent que leur terre ancestrale leur soit enlevée si les communistes s’accaparent du pouvoir au Canada. Duplessis parle de ce qui se passe en Russie et décrit les prisons, le manque de liberté, la main mise du gouvernement sur tout, l’absence de démocratie, le parti unique, etc. Dans une campagne de 1948, il s’oppose à l’importation d’œufs « communistes » de la Pologne. « Pour aider les cultivateurs du Québec », dit-il, « mais surtout pour ne pas aider les pays communistes d’aucune façon ». Avait-il raison ? Une chose est certaine, Duplessis a agi avant tout autre gouvernement et avant l’élection de Rose. Le temps a démontré que l’URSS était en fait un monstre antidémocratique, anti liberté, cruel et meurtrier. A-t-il eu tort ? La réponse n’est pas facile si on se rappelle le contexte. Je crois qu’il a eu raison si je pense au principe « à la guerre comme à la guerre ».

Quant aux Témoins de Jéhovah, c’est une autre chose. En 1946, ces derniers publient un pamphlet intitulé : La haine ardente du Québec pour Dieu, pour le Christ et pour la liberté est un sujet de honte pour tout le Canada. On peut comprendre que dans le Québec catholique « jusqu’aux dents » que cela fait un scandale immense.

Des centaines de Témoins sont arrêtés. Un restaurateur montréalais Frank Roncarelli paye plusieurs cautionnements pour assurer leur liberté. Duplessis rétorque en lui enlevant son permis de vente d’alcool pour son grand restaurant de spaghetti de la rue Ste-Catherine près de la « main », comme on nommait le boulevard St-Laurent. De plus en 1947, pour combattre la distribution de pamphlets de propagande par les témoins de Jéhovah, Duplessis fait voter une loi permettant aux municipalités de réglementer la distribution de ces documents.

Frank Roncarelli poursuit Duplessis et lui réclame plus de 100M$. Ce sera long et ce n’est que 11 ans plus tard, en 1959, que la cour Suprême prend partie pour Roncarelli et somme Duplessis de verser personnellement les dommages et intérêts. Le 7 septembre de la même année, Maurice Duplessis meurt à Schefferville dans le grand-nord québécois.

A-t-il eu raison d’agir ainsi contre le Témoins de Jéhovah ? Je crois que la Cour Suprême a bien répondu à cette question. J’ai toujours crû que la liberté de religion de chaque individu se doit d’être respectée par l’État. C’est un droit individuel. C’est pourquoi je n’aime pas la charte des « valeurs québécoises ».


Claude

Marie-Paul F. a dit…

Je suis entièrement pour la charte. Comme plusieurs l’ont mentionné, nos religieuses ont enlevé leur voile, nos prêtres leur robe. Il n’y a plus d’enseignement religieux dans nos écoles. Nous avons fait beaucoup d’efforts, dites moi pourquoi eux n’en feront pas autant. Nous avons une histoire de plus de 300 ans au Québec et eux seulement quelques décennies. Je pense que s’ils ne veulent pas faire d’efforts se sont des extrémistes, il faut s’en méfier. Tous les pays musulmans ou l’on porte le voile, c’est la guerre. Notre laïcité j’y tiens énormément. On porte le voile dans le désert pour se protéger du sable, pas au Québec.
Merci

Mona B. a dit…

Bonjour
Bravo pour votre blog que je trouve fort intéressant.

Un peu déçu d’un passage du commentaire de M Théôret

N’est-il pas un peu xénophobe quand il dit que: “Les Québécois ne forment pas une race”. On est qui ou quoi, alors! C,est ce genre de commentaire qui encourage les musulmans a nous soumettre à leur loi.

Par contre je suis entièrement d’accord quand il dit: “Ce ne sont pas les signes ostentatoires en soi qui sont dérangeants mais les symboles qu’ils véhiculent”. Quand je vois un policier en uniforme je sais ce qu’il me donne comme message ! Alors pourquoi accepter les messages des musulmans!

Merci et bonne continuité dans votre blog