dimanche 9 décembre 2012

USA, l’heure de vérité

2012 marque la fin de l’importante réduction générale des impôts, accordée par l’ex président américain GWBush, en 2001 et 2003, pour relancer l’économie de son pays. Cette loi de finance devait se terminer en décembre 2010. À ce moment-là, le président Obama, suite à un dur débat a dû accepter une extension de deux ans. Elle se termine donc le 31 décembre prochain.

Les réductions de taxes ont non seulement bénéficié aux riches mais aussi aux payeurs de taxes de la classe moyenne. Bush a toujours affirmé qu’il pensait nécessaire de stimuler davantage la reprise de l’économie et la création d’emplois pour générer plus de revenus. Se fiant au succès obtenu par son mentor Ronald Reagan, qui avait lancé un tel programme, il assurait le peuple américain que ces réductions se paieraient d’elles même. Mais Bush a lancé deux guerres qu’il a dû financer et a engagé des dépenses croissantes malgré une dette qui grossissait à vue d’œil.

Dès les premiers jours, les opposants ont engagé un vigoureux débat sur les coûts et bénéfices de ces décisions surtout sur celles qui favorisaient les riches. Ils ont souligné, entre autres, que ces derniers étaient vraiment gâtés puisqu’en plus ils bénéficiaient de nouvelles mesures diminuant la taxe sur les gains capitaux. Ils ont démontré que ces décisions augmenteraient appréciablement l’inégalité entre les Américains et iraient à l’encontre du principe de la distribution des richesses par un gouvernement. Ils ont même évoqué un danger possible à la sécurité nationale.

Quelques années plus tard, GWBush et son vice-président Dick Cheney ont affirmé qu’effectivement les diminutions des taux d’impôts s’étaient payées d’elles-mêmes. Ces affirmations gratuites ont été contredites par le Département du trésor américain qui a déclaré n’avoir pas de preuves concrètes démontrant leur véracité puisque les revenus d’impôt depuis 2001, sauf en 2007, ont été inférieurs à la moyenne de 8,4 % du PIB des trente dernières années.

Par ailleurs, la dette américaine a littéralement explosée. Les coupures de taxes de Bush y ont ajouté 1,6 trillions de $, sans compter les intérêts. Mais elles ne sont pas le plus grand contributeur à cette augmentation de la dette puisque l’accroissement des dépenses les surpasse. L’incapacité ou le non-vouloir des présidents Bush et Obama à réduire les dépenses est donc aussi à blâmer.

Aujourd’hui, la dette américaine est de 16 359 000 000 000 $. Elle était de 5,94 trillions $ lorsque GWBush devint président et avait atteint 12,3 trillions $ à la venue d’Obama. Selon les économistes et experts financiers, cet accroissement rapide devient intolérable car il est un danger non seulement pour l’économie des USA mais pour celle du monde.

Depuis la crise bancaire, les mesures temporaires d’injection de capitaux dans les banques et la diminution des taux d’intérêts ont eu des effets positifs aux USA. Le taux de chômage a diminué de 9,8 % à 7,7 % durant le deux dernières années. En novembre 2012, l’emploi a grimpé de 147 000 emplois (pour un 15ième mois consécutif). Il y a aussi le fait que des compagnies américaines comme Apple viennent tout juste de décider de rapatrier une partie de la fabrication de leurs produits sur le sol américain. Cela va dans le bon sens.

Malgré ces indications, plusieurs experts craignent cependant le pire puisque l’économie mondiale dépend du consommateur américain comme une source importante de sa demande. Ils s’inquiètent du faible taux de croissance des USA et de la diminution de celle de la zone euro, du Japon et d’ailleurs qui ajoutent au problème. Même les pays en développement qui profitaient d’une économie de plus en plus forte pour se développer sont aujourd’hui affectés par des ralentissements de production. L’emploi et la qualité de vie en souffrent un peu partout.

Voilà pourquoi, le gouvernement américain qui est au cœur de cette tourmente doit prendre les bonnes décisions afin d’assurer la stabilisation financière des USA. Et l’heure de vérité approche, puisqu’elle est fixée au 31 décembre 2012 à minuit. Les Américains la surnomment « the fiscal cliff », qui est devenu au Québec, avec notre bonne habitude de tout traduire en français, la falaise fiscale.

À ce jour, les deux partis politiques américains, Démocrate et Républicain, ont des vues opposées pour la solution. Lors de la récente élection présidentielle, le candidat républicain Romney a proposé la politique « aucune augmentation de taxes pour personnes ». Obama, qualifiant cette approche d’irresponsable, a répliqué en promettant de ne pas toucher aux taux d’imposition de la classe moyenne mais d’augmenter ceux des riches au niveau qu’ils étaient en 2001.

La victoire électorale d’Obama fut décisive et surprenante par son envergure. Aujourd’hui, les démocrates d’Obama maintiennent sa position électorale et les républicains marient celle de Romney. Ces derniers veulent surtout éviter toutes augmentations aux riches qui les appuient et les financent.

De plus, chacun est favorable à des coupures importantes des dépenses gouvernementales. Les républicains en proposent de plus radicales puisqu’ils devront compenser pour le manque de revenus qu’une augmentation de la taxe apporterait au trésor américain. Ils voulaient mettre la hache dans le nouveau régime de santé pour tous « Obamacare », mais le résultat de l’élection les en empêche. Ils veulent donc sabrer ailleurs et profondément, où ça fait mal !

À cause de l’écrasante majorité républicaine à la Chambre des représentants, une entente est nécessaire entre les partis si le président veut atteindre son objectif. Déjà, il a proposé l’adoption immédiate d’une loi spéciale pour garantir que les taux touchant la classe moyenne ne soient pas modifiés. Les républicains l’ont refusée et réclament un compromis, qu’Obama rejette.

Je crois qu’à la fin, les républicains cèderont. Ils ne peuvent faire autrement suite à l’humiliante défaite de leur parti à la dernière élection, malgré qu’ils aient dépensé des centaines de millions $ de plus qu’Obama. Ils se sont finalement rendu compte que l’argent n’assure pas toujours les victoires électorales. Se croyant gagnants, ils ont négligé les besoins et les opinions de larges franges de la population comme les moins nantis, les femmes et les latinos. Dorénavant, ils doivent penser à l’avenir pour gagner la présidence et le Sénat. Cela veut dire pour eux, chercher à récupérer le plus grand nombre possible de ces électeurs pour la prochaine élection. Emprunter la voie politique d’Obama pourrait les aider dans l’opinion publique.

Un autre problème pour les républicains est le fait que plusieurs de leurs actuels élus se pensent prisonniers d’un document qu’ils ont signé par lequel ils s’engageaient à ne jamais voter pour une augmentation de taxes. Ce serment « Taxpayer protection pledge "TPP" » a été signé par 236 des 242 républicains élus actuels de la Chambre des représentants et par sept des 47 sénateurs républicains. À mon avis, il allait contre le fondement du serment d’office de chacun de ces élus par lequel il s’engage à servir ses commettants le mieux possible nonobstant toute influence extérieure. C’est la peur de ne pas être réélus qui les a forcés à signer ce document véreux. Chacun d’entre-eux se sentait politiquement menacé par les groupes de droite, comme le Tea Party, qui, advenant une non-signature, déploieraient tous les efforts d’organisation et financiers contre lui.

Heureusement, depuis quelques semaines, certains représentants républicains, parmi les principaux, ont affirmé publiquement qu’ils ne respecteraient plus le TPP et supporteraient des augmentations de taxes. À ce jour, le nombre n’est pas suffisant pour assurer Obama que son projet pourra être voté par la Chambre des représentants. Mais à lire tout ce que je lis sur la question, j’ai bon espoir qu’il réussira.

Claude Dupras



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