jeudi 6 janvier 2011

Une opportunité en or pour les socialistes français

Le parti socialiste français (PS) tiendra sa «primaire» à l’automne 2011 en vue de la désignation par ses membres de son candidat à l’élection présidentielle. Les mises en candidatures se tiennent en juin et sont ouvertes à toute personne de gauche, une première, si celle-ci rencontre les conditions établies par le parti socialiste.

C’est une chance unique pour la gauche française de prendre toute la place médiatique de juin à novembre 2011 car une telle compétition peut devenir fort intéressante et capter l’imagination de tous les Français. Ce résultat est inévitable, si on en juge par les dernières «primaires» américaines qui ont été suivies par des millions de personnes, non seulement aux USA mais dans le monde entier.

Le PS est le seul grand parti politique français qui tiendra une «primaire» en vue de la prochaine élection présidentielle. Le président Sarkozy étant éligible pour un second mandat, son parti, l’UMP, n’aura pas de «primaire». Sur le plan médiatique, le PS sera donc seul. C’est un avantage important.

Déjà, six candidatures sont déclarées, dont celles du député Arnaud Montebourg qui a présidé le comité du PS pour la mise en forme de cette élection «primaire», Ségolène Royal qui a recueilli plus de 18 millions de votes lors de la dernière élection présidentielle contre Nicolas Sarkozy et le député-maire Manuel Valls. D’autres viendront, dont les plus attendues sont celles de Martine Aubry, premier secrétaire du PS et de Daniel Strauss-Kahn (DSK), président du FMI et défait à la «primaire» de 2006 par Ségolène Royal. À ce jour, le grand favori est DSK.

Les médias français traitent de plus en plus de cette élection «primaire» et dès qu’un candidat fait une déclaration pour le moins sensationnelle, cette dernière capte sur-le-champ la « Une » des médias et son propos est discuté en fond et en large.

Il en est ainsi, actuellement, pour la récente position de Manuel Valls sur la question des 35 heures. Cette loi fut proposée par Martine Aubry et adoptée par l’ex-gouvernement socialiste Jospin pour réduire la semaine de travail des Français à 35 heures. La loi fut opposée férocement par la droite et, dès sa prise de pouvoir, le président Sarkozy la modifia pour permettre aux Français de « travailler plus longtemps pour gagner plus ». Que le socialiste Valls propose aujourd’hui de « déverrouiller les 35 h pour permettre aux entreprises d’augmenter les salaires » devient une grosse nouvelle et tous les médias s’en emparent, même si certains la qualifient de « politiquement inepte ».
Je comprends Valls de chercher à faire du bruit pour se faire remarquer et il réussit. À la guerre comme à la guerre !

Mais le plus révélateur est la position du parti socialiste de Mme Aubry, face à cette proposition de Valls. Pour elle, il est inacceptable qu’un candidat au «primaire» propose des changements aux lois qui ont été adoptées dans le passé par un gouvernement socialiste et surtout sa loi des 35 heures. Elle menace d’expulser Valls du PS et le somme de se conformer à la « ligne officielle » sinon... Au lieu d’argumenter, elle fait peur ! On se penserait en Russie de Staline.

Il y a aussi cette rumeur, bien fondée, d’une entente entre DSK, Royal et Aubry. Si DSK est candidat, elles se désisteraient en sa faveur. Quelle idée farfelue, injuste et indigne pour les membres du parti socialiste ! Au Québec, on appelle cela du « paquetage de convention ». Si une telle chose se produit, tout le suspense qui devait être généré par une vraie compétition pour le choix du candidat présidentiel socialiste disparaîtra ipso facto. La presse ne fera plus qu’une couverture minimale de cet exercice démocratique puisqu’il aura été méprisé par ses dirigeants principaux. Ce sera un mauvais calcul de la part de ces derniers puisqu’il ne tiendra pas compte que la bataille électorale est en réalité un commerce d’images et d’illusions.

Pour l’organisation de sa primaire, le PS s’est inspiré de celle du parti démocrate qui a choisi Barack Obama. Il semble qu’il n’ait rien compris. À cette «primaire» américaine, aucun candidat ne s’est désisté en faveur d’un autre. Au contraire, ils se sont livrés jusqu’à la dernière minute une bataille de titans. Ce sont les délégués de tous les états américains qui ont analysé, décidé et choisi leur candidat à la présidence américaine. La confrontation entre les candidats fut dure et intense et ce n’est qu’après l’annonce du vote que les candidats défaits se sont ralliés à Obama. Le parti démocrate sur lequel toute l’attention du monde entier s’était concentrée est sorti gagnant à cause de toute la publicité médiatique que la rivalité entre ses candidats a générée. Les démocrates ont réussi non seulement à faire élire Obama lors de l’élection générale mais aussi une majorité de représentants à la Chambre et une majorité de sénateurs au Sénat. Ces résultats démontrent bien que ce n’est pas uniquement le candidat à la présidence qui bénéficie des retombées médiatiques d’une telle «primaire» mais tous les candidats de son parti.

On me dit souvent que l’approche électorale en France n’est pas comme celle des USA ou du Canada. J’ai toujours montré mon désaccord devant une telle affirmation. Un électeur est un électeur et, où qu’il soit, il suit d’un œil distrait l’évolution de la politique qui le concerne. Mais lorsque son attention est attirée par des ondes positives ou négatives qui sont émises par un incident ou un personnage politique, il réagit en conséquence.

La finale de la «primaire» socialiste française doit être l’aboutissement d’un affrontement sain et réel entre tous ses candidats qui aspirent à devenir président de la France. Ils ont plus de six mois pour se faire valoir. Ce faisant, ils attireront à la longue l’attention de plus en plus de futurs électeurs et les influenceront. Si cette «primaire» est sabotée par des stratèges de cuisine ou par l’intérêt personnel des dirigeants du parti, le PS manquera la marque et cette belle opportunité qui s’offre à lui s’envolera en fumée.

Claude Dupras

5 commentaires:

jcbel0 a dit…

Les "primaire" socialistes souffrent de 3 handicaps au moins pour les rendre intéressantes aux yeux de l'opinion (quoi qu'en pense ou dit la Presse):
1) Elles sont stérilisées parce que suspendues, de façon surprenante, à la décision de DSK, rendant ainsi les gesticulations des uns et des autres candidats inopérantes (et même contre-productives) jusqu'à son prononcé.
2) Il semble que cette décision soit trop tardive pour permettre à l'intéressé de mener une campagne efficace.
3) Faute d'un leader-candidat élu, elles rendent l'adoption dun programme de gouvernement impossible jusqu'à cette élection.
Ainsi, le parti se trouve pour trop longtemps,englué dans une espèce de marais dont il lui sera bien difficile de sortir à temps pour retrouver un minimum de crédibilité pour se présenter comme un challenger de la droite.

Claude Dupras a dit…

Il est vrai que tout est en suspend attendant la décision de DSK. Mon billet traite de la période entre la mise en nomination des candidats et le jour du vote. A ce moment la tous les candidats seront connus. 

Si DSK embarque je crois qu'il aura amplement le temps de faire une bonne campagne. Il ne faut pas croire que son camp n'est pas a organiser son arrivée et cette campagne.

Le peu de support public qu'a Sarkozy aide DSK qui est le seul, je crois, qui peut le battre. 

Liane a dit…

Imaginons que cela  advienne  au Québec et que le PQ  est le PS. Qui seront du côté du PQ?  Les  péquistes bien sûr et peut-être  quelques autres fatigués des « rouges et des bleus ». Aujourd’hui, chez nous, nous votons en partie contre quelqu’un et non pour quelqu’un. Est-ce la même chose en France? Il faudrait que j’en parle à ma fille Anne qui vit en France depuis 25 ans. Elle doit bien avoir son idée. Je crois qu’elle n’aimait pas beaucoup  Sarkovy

Si on veut changer le pouvoir, que fait-on? À tort ou à raison on vote en conséquence.  Une fois installé dans son bureau, l’Honorable élu aura  beau essayer de satisfaire tout le monde, il n’y arrivera pas, ce sera laborieux. Cependant, le terme fini, espérons qu’il aura eu le temps d’implanter quelques uns  de ses projets.   

J. Al. a dit…

Très bien (comme d'habitude) ton analyse mais, avec la Ségolène Royal qui ne fait que gaffe sur gaffe cela risque à nouveau de tourner à l'eau de vinaigre pour le PS et ce avant que cela ne commence !

Dany W. a dit…

Combien je suis d'accord avec vous..
Les 35 heures ont été une catastrophe sur le plan économique.. Plus d'augmentations des salaires,impossibilité pour les petites et moyennes entreprises de passer aux 35 heures, d'où un surcout en haures supplémentaires, peu de créations d'emplois (env. 150 000), et le chômage n'a cessé d'augmenter, et une très mauvaise mentalité qui s'est emparée des employés qui auparavant pouvaient faire quelques minutes de travail en plus sans problème et qui maintenant compte chaque minute.. y compris des infirmières qui vont chez des patients poser des perfusions pour des dyalises à domicile.. Il faut alors leur payer des minutes supplémentaires ! Quel gâchis !Sans compter que depuis c'est le bazare dans les hôpitaux où il y avait déjà un manque de personnel.. car aucun personnel de soin n'a été embauché pour compléter ces 35 heures.. Les gens n'ont plus que cela à la bouche : LEUR R.T.T... (réduction du temps de travail.) Revenir en arrière complètement n'est pas possible sans mettre une fois de plus les syndicats et les fonctionnaires dans la rue ! Mais il faut arriver à libéraliser ce temps de travail. Quant à Manuel Vals, il a raison mais au P.S il n'y a pas de place pour les idées individuelles.. On ne veux voir qu'une seule tête ! Quant à leurs primaires, ce n'est que pantalonnade ! Ils veulent donner l'illusion qu'ils s'entendent alors que c'est la bagarre perpétuelle.. De plus que penser comme vous le dîtes de primaire et ensuite des "petits arrangements entre amis".. Quant à Ségolène Royal n'a-t-elle pas eu le culot de déclarer après l'élection d'Obama :"Il a puisé dans MES idées !". Cette femme a un culot monstre et ne cesse de dire des bêtises.
En 2007, elle a profité du vide laissé au PS..
Les gens du PS n'hésitent pas à faire des arrangement aussi avec le Parti communiste, et tous les partis de gauche.. Comment peut-on être démocrates et travailler avec le PCF ?
Certes Sarkozy a fait quelques erreurs, mais espérons que le PS ne sera pas élu, car alors, où ira la France ?