samedi 30 octobre 2010

Le vide politique du Québec

Rien ne va plus en politique au Québec.

Le premier ministre libéral Jean Charest et son parti s’accrochent les pieds dans les fleurs du tapis. Depuis que le PM a refusé, à tort, de mettre sur pied une commission d’enquête sur les coûts de la construction, la foudre lui tombe sur la tête. L’opposition parlementaire et les journalistes ne cessent de rendre publiques des décisions et des transactions gouvernementales de toutes sortes dans lesquelles amis, supporteurs ou financiers du parti libéral du Québec ont été favorisés. Ces nombreux scandales qui pour la plupart n’en sont pas, ont un air de vérité. Et c’est çà le problème du PM car, en politique, l’apparence a autant d’importance que la réalité et par conséquent sa popularité en subit le contrecoup et fond dans les sondages.

Pendant ce temps, les dirigeants et députés du parti Québécois, l’opposition officielle, jubilent. Voyant le pouvoir possible de si près, ils ne peuvent s’empêcher de se lécher les babines. Les sites internet dédiés à l’indépendance du Québec font le plein d’articles optimistes, ce qui démontrent bien que la fièvre se répand. Mais il y a un problème. Le parti Québécois et son chef Pauline Marois ne figurent pas bien, eux non plus, dans les sondages. Les Québécois et les Québécoises ne sont pas satisfaits du parti Québécois ni du parti Libéral.

Le parti Libéral et le parti Québécois sont des partis de centre-gauche. Les libéraux flirtent par moment avec la droite. Les péquistes agissent de même avec la gauche. Cette dernière est représentée par le parti Québec-Solidaire qui n’a qu’un député. La droite est le parti Action Démocratique du Québec (ADQ) qui est venu à quelques députés près de prendre le pouvoir à l’avant-dernière élection générale. Après 21 mois comme opposition officielle, où il a fait mauvaise figure, il est retombé à seulement quelques députés et ne pèse plus politiquement. Pourtant, la droite est au pouvoir à Ottawa et croît rapidement aux USA où les élections législatives « mid-term » sont imminentes et pour lesquelles les sondages indiquent que le parti Républicain, parti de droite, fait une remontée impressionnante et enlèvera aux Démocrates la majorité à la Chambre des représentants et possiblement au Sénat. La droite a le vent dans les voiles en Amérique du Nord.

Plusieurs anciens membres du parti Québécois, dont l’ex-ministre démissionnaire François Legault, estiment que l’option indépendance n’est pas dans l’air. Ils rêvent de créer un nouveau parti, Force-Québec, avec des gens d’autres formations politiques pour s’attaquer efficacement aux vrais problèmes. Il y a quelques semaines, les medias ont rapporté que le parti se formait et qu’une annonce était imminente. Le sondage qui suivit, incluait ce nouveau parti comme option et l’a placé à 39% par rapport au parti Québécois qui chutait de 18% pour se retrouver à 22% (les purs et durs), le parti libéral à 21% et l’ADQ 6%. Ensemble, les trois partis traditionnels n’ont obtenu que 49% face à un parti qui n’existe pas. Ce qui démontre bien que les Québécois sont insatisfaits et ont une grande faim de changement.

À Québec, Il y a une semaine, un nouveau groupement, le Réseau-Liberté-Québec, a réuni durant un weekend plus de 450 individus de toutes les régions du Québec autour de chercheurs, de penseurs et d’activistes de droite pour parler politique. La rencontre a eu un impact positif dans les médias. Le Réseau-Liberté-Québec n’est pas et ne sera pas un parti politique. C’est un genre de « think-thank » en devenir, à tendance conservatrice, qui regroupe hommes et femmes politiques, chercheurs, universitaires, syndicalistes, gens d’affaires qui voient des solutions dans la philosophie de Droite. Ces individus veulent influencer les partis politiques en place pour qu’ils adoptent leurs suggestions. Dès l’annonce de la création de Réseau-Liberté-Québec, certains politiciens se sont empressés d’élever l’épouvantail à corneilles pour effrayer sans raison les Québécois et les Québécoises contre la droite qu’ils ont même associée à l’extrême-droite (idéologie contre-révolutionnaire voire fasciste). Cela n’a rien à voir avec le Réseau-Liberté-Québec qui est une bouffée d’air frais pour la politique québécoise.

Je n’aime pas la droite à la GWBush ou à la Stephen Harper : trop d’idéologie, pas suffisamment de sensibilité dans les solutions pour les grands problèmes. J’espère que la droite québécoise ne prendra pas les politiques de ces hommes comme modèles. D’ailleurs, aujourd’hui, le Canada en souffre puisque les Nations Unies viennent de nous refuser un siège au conseil de sécurité parce qu’elles ne digèrent pas les politiques de notre PM Harper : environnement, unilatéralisme pour Israël, etc… (Par contre, sur plusieurs points, il a fait un excellent travail, comme vient justement de l’affirmer la vérificatrice générale du Canada en rapport avec l’important programme de 45 milliards de projets d’infrastructure lancés pour contrer les effets négatifs de la crise économique. Ce fut bien géré et de façon honnête. Bravo).

À cause de l’impopularité grandissante du PM Charest, les séparatistes « purs et durs » du parti Québécois croient que la victoire électorale est, par défaut, inévitable et certaine. Ils réclament un nouveau référendum sur la séparation du Québec du Canada, lors du premier mandat que le parti gagnera. Quant à elle, Mme Marois s’en tient à l’article 1 de la constitution du parti qui stipule «au moment jugé approprié». Elle est une fine politicienne et ne veut pas faire peur à ceux qui ne sont pas indépendantistes et qui auraient le goût de changer de gouvernement, à cause des circonstances, et voter PQ. Électoralement, elle a raison. Dans un premier temps, elle veut être élue premier ministre et gouverner. Ensuite, dans un deuxième temps, suite à une autre élection générale, tenir un référendum. C’est ce qu’elle appelle « le temps opportun ».

Mais c’est un peu d’hypocrisie car le Parti Québécois ne cesse d’affirmer qu’il existe pour faire l’indépendance du Québec. Je suis d’accord avec ceux qui veulent le tenir dans un premier mandat. L’électeur a droit de se prononcer sur la question nationale le plus tôt possible et cette question doit être réglé une fois pour toutes. Ce sera le troisième référendum et probablement le dernier, quelque soit le résultat. S’il n’a pas lieu dans le premier mandat et le parti non réélu, il n’y aura pas de référendum et la discorde sera toujours là.

Les « purs et durs » ont une autre crainte. Ils s’inquiètent de la performance de Mme Marois. Ils croient qu’elle sera un handicap qui pourra les empêcher de gagner la prochaine élection. Malgré qu’elle en ait vu d’autres et ait une longue expérience, elle subira un vote de confiance au congrès du PQ, le 15 avril prochain, qui risque de faire mal !

Jean Charest et Pauline Marois sont en mauvaise position dans l’opinion publique et dans l’esprit des membres de leur parti. Le parti Libéral est entaché de suppositions de mauvaise gouvernance et le parti Québécois dispute les qualités de son chef et la stratégie en vue d’un nouveau référendum. L’ADQ est faible mais est bien placé pour progresser étant donné sa position à droite de l’échiquier politique québécois. La gauche maintiendra-t-elle son ascendance sur la politique québécoise ? Force-Québec naîtra-t-il et sa popularité sera-t-elle éphémère ? Quelle sera l’influence de Réseau-Liberté-Québec sur l’évolution vers la droite des politiques des partis ? En fait, nous sommes dans un vrai « free for all » où tout peut arriver.

Dans le vide politique actuel du Québec, dans quelle case s’arrêtera la bille sur le panneau tournant de la roulette politique québécoise ? Voilà la question !

Claude Dupras

3 commentaires:

F. Boiteau a dit…

Très bon article, mais je voudrais noter que l'ADQ n'a pas passé 4 ans à l'opposition officielle, mais plutôt formait l'opposition officielle lors du premier gouvernement minoritaire du Québec depuis le gouvernement de Sir Henri-Gustave Joly de Lotbinière en 1878

L'ADQ a détenu le statut d'Opposition officielle du 26 Mars 2007 au 8 Décembre 2008.

Si l'ADQ avait détenu l'Opposition pendant 4 ans, nous serions donc toujours sous le 2e mandat de Jean Charest et il y aurait élection au printemps prochain.

Anonyme a dit…

Le Canada n'a pas eu de siège sur le Conseil de sécurité parce que son gouvernement était minoritaire et qu'il pouvait se faire renverser à tout moment, et en plus avec l'aide d'un parti séparatiste.

Rien de rassurant pour l'ONU !

Claude Dupras a dit…

J'ai fait la correction en rapport avec le nombre de mois que l'ADQ a été l'opposition officielle. Merci

Quant a conseil de sécurité c'est aussi un point important. Mais ce n'est pas les partis qui y gagnent un siège mais les pays. Le Canada est reconnu comme ayant un système politique très stable.

CD