Cette année est le 250ième anniversaire de la bataille des plaines d’Abraham. Ce site est le plus historique du Canada et de l’Amérique du Nord et d’une grande partie du monde.
C’est le 13 septembre 1759, alors que l’Empire anglais domine l’empire français dans sa quête pour la suprématie mondiale, qu’il décide de tenter, pour une quatrième fois, le siège de Québec où se trouve le gouvernement de la Nouvelle-France qui a 225 ans d’existence. Déjà, cette dernière a perdu de grands morceaux de son territoire aux dépens de l’Angleterre, soient : les Grands Lacs, la vallée du Richelieu, celle du lac Champlain, l’Acadie continentale et le territoire de la Baie d’Hudson.
Ces gains sont la conséquence de la guerre en Europe et dans le monde qui perdure entre l’Angleterre et la France qui se battent pour des monopoles très lucratifs : le sucre des Antilles, les esclaves d’Afrique, les soieries et les épices des Indes, les fourrures de la Nouvelle France et le poisson d’Amérique. Les hostilités évoluent en une série de guerres mondiales, chacune des deux puissances européennes s’efforçant d’agrandir son empire aux dépens de l’autre. Ce sont des guerres navales dont l’issue est scellée par la puissance des marines nationales. C’est là, la force de l’Angleterre.
En 1759, les Anglais avec leurs navires et 22,000 hommes sont devant Québec depuis 2 mois à chercher un point d’accostage. C’est le général James Wolfe qui les dirige. Le Marquis de Montcalm est le chef de l’armée française et il n’a pas les forces navales capables de vaincre la flotte anglaise. Mais Québec et les environs sont fortifiés et difficiles d’accès et il a 13,000 soldats pour la protéger.
Finalement, Wolfe trouve un passage à l’anse au Foulon où la falaise a 53 mètres d’hauteur. Montcalm ne l’attend pas à cet endroit. Les soldats anglais débarquent et montent vers la plaine où Wolfe en rassemble 5,100. Montcalm a le choix de les attaquer ou de rester dans la ville fortifiée à attendre un moment plus propice. Il décide l’assaut avec la moitié de son armée. Dès la première charge, Wolfe est tué. Les soldats anglais, bien expérimentés et disciplinés, attaquent sans merci et Montcalm ordonne la retraite vers la ville. Il est alors mortellement blessé et décède le lendemain. Cinq jours plus tard, Québec capitule. L’année suivante, c’est Montréal qui tombe.
L’immense territoire de la Nouvelle France devient alors sous contrôle britannique. Ce fut le point tournant de l’Amérique que l’on connaît aujourd’hui. Alors qu’une très grande partie de l’Amérique aurait pu être française, elle sera anglaise. Les conquérants d’alors imposèrent leur administration, leurs marchands, leur culture, leur langue et leur loi. Les bourgeois français quittèrent avec leurs valeurs pour la France et laissèrent un groupe de 60,000 français pauvres et sans trop d’instruction, qui ne pouvaient aller nulle part, sous la domination anglaise.
Le blâme de cette débâcle revient à mon avis à la France et à ses rois, surtout Louis XIV, qui entreprirent beaucoup de guerres et négligèrent la Nouvelle-France en n’assurant pas l’accroissement de sa population et sa défense. Les chercheurs de l’Université de Montréal confirment ce fait : « L'immigration de l'Ancienne à la Nouvelle-France n'est pas reconnue pour avoir fourni, sous l'Ancien Régime, un grand nombre d'émigrants à ses colonies d'outre-Atlantique. Ainsi, à peine 15 000 Français et Françaises ont fait voile en direction du Canada au XVIIe siècle, et les deux tiers d'entre eux n'ont fait qu'un séjour temporaire dans la colonie avant de retourner définitivement en France ou de mourir au Canada à l'état de célibataire. C'est très peu. Avec une population dépassant à peine le tiers de celle de la France, les îles britanniques auraient envoyé au Nouveau Monde près de 380 000 immigrants durant la même période ». Voilà pourquoi le territoire de la Nouvelle France a été finalement conquis par l’Angleterre. Si ce n’avait pas été en 1759, ce serait arrivé une autre année de toute façon.
Pour marquer cette date historique, le gouvernement canadien veut reconstituer la bataille des Plaine d’Abraham. Il ne semble pas comprendre la sensibilité des Québécois francophones en rapport avec ce jour fatidique de leur histoire. Il tourne le fer dans la plaie en voulant rejouer la confrontation qui a forcé leurs ancêtres à batailler constamment pour survivre et maintenir leur religion, leur culture et leur langue contre des conquérants qui cherchaient à les assimiler. Ce n’est pas seulement la défaite de Montcalm qui a blessé les Québécois mais aussi et surtout le traitement que l’empire anglais leur a fait subir par la suite. Je ne comprends pas pourquoi le gouvernement du Canada ne sait pas cela. Le PM Harper blâme les séparatistes pour l’opposition qui s’élève contre la reprise de la bataille. Il ne saisit pas que ce sont les Québécois de toute tendance qui s’opposent à cette idée. Il n’est vraiment pas connecté sur le Québec.
J’apprends en écrivant ces lignes que la rumeur publique veut que le projet soit annulé. Si c’est vrai, bravo ! Mais je vais le croire lorsque le PM le confirmera. Cependant, le jour est historique et il serait utile d’organiser un grand forum public sur cet évènement afin que tous ses éléments soient bien connus et permettent à notre jeunesse d’apprendre la vraie histoire de leur pays.
Claude Dupras
1 commentaire:
Un beau récit, héroïque et tragique. "Je meurs content, je ne verrais pas les Anglais dans Québec".
La France a effectivement sa part de responsabilité dans la perte de l'Amérique. Je crois pour ma part qu'elle incombe surtout à Louis XV, qui a choisi de défendre la France en Europe plutôt que la France en Amérique: "quand le feu est au château, on ne s'occupe pas de l'écurie".
Il faut également blâmer cette génération de philosophes qui ironisaient sur les arpents de neige du Canada et se sentaient anglais de cœur.
Il reste la gloire, et les souvenirs.
Enregistrer un commentaire