jeudi 5 février 2009

Sarkozy et le Québec : Bien faire et laisser braire

Jean Charest, le PM du Québec, vient de recevoir la décoration de commandeur de la Légion d’Honneur française. C’est le président Nicolas Sarkozy qui a décidé de lui accorder ce grand honneur. On se rappellera que l’ex-PM québécois Lucien Bouchard avait reçu la même décoration des mains de Jacques Chirac. L’honneur fait à Charest est mérité et rejaillit sur tous les Québécois.

Jusque-là tout allait bien. Mais le président Sarkozy aime parler et prêcher. Il n’a pu se retenir et a fait un discours sur la politique canadienne et québécoise. Il a fait, sans les mentionner, le procès des souverainistes-séparatistes du Québec et a laissé entendre qu’il les classait dans la même catégorie que des mouvements séparatistes du monde qui utilisent la peur, la division et la violence pour atteindre leur but.

Avec l’expérience que nous avons vécue au Québec suite aux deux référendums sur l’indépendance, on peut affirmer, hautement et clairement, que les indépendantistes québécois n’utilisent pas ces méthodes pour atteindre leur objectif. Au contraire, ils sont de vrais démocrates et c’est par des arguments sérieux qu’ils ont voulu persuader leurs compatriotes du bien-fondé de leur option politique. De plus, ils ont démontré leur sens démocratique en acceptant, sans mot dire, le vote majoritaire des deux référendums. Au deuxième, il fut particulièrement difficile pour eux de se soumettre puisqu’ils l’ont perdu par moins de 70,000 votes obtenant 49,5% des votes. On ne peut que reconnaître le respect de la démocratie des séparatistes québécois. Il les honore.

Lorsque Sarkozy les attaque indirectement, il ne dépeint pas la réalité.

Je regrette ces sorties du président français sur le Québec et le Canada. Même si je le respecte beaucoup et admire son travail en France et sur la scène mondiale, je reconnais qu’il erre lorsqu’il traite de la situation politique chez nous.

Autant je n’ai pas aimé le président Charles De Gaule, venu au Québec se mêler d’affaires qui ne le regardait pas en clamant « Vive le Québec libre », autant je regrette la déclaration du président Sarkozy qui a défendu le fédéralisme chez nous à partir de son palais de l’Élysée.

Je suis fédéraliste et j’ai oeuvré ardemment dans les deux référendums pour le NON, mais je suis avant tout un Québécois et un Canadien et je défendrai toujours le principe que les Québécois et les Canadiens des autres provinces ont le droit de décider de leur sort dans le calme et la sérénité sans l’intervention de forces extérieures. Nous sommes un peuple fier, démocrate et intelligent. Nous connaissons bien l’histoire passée de notre coin du monde et la situation politique actuelle. Nous avons une vision réaliste du potentiel de notre avenir et c’est à nous de décider ce qu’il sera.

Les péquistes, avec l’ex-ministre Louise Beaudoin et les bloquistes, avec leur chef fédéral Gilles Duceppe en tête, se sont révoltés publiquement contre les déclarations de Sarkozy. Pourtant ce sont les mêmes individus qui, avec leurs prédécesseurs, applaudissaient le général de Gaulle lors de sa déclaration à l’hôtel de ville de Montréal en 1967 et les premiers ministres et ministres français tels, Pierre Messner, Michel Rocard, Philippe Séguin et Ségolène Royal qui, lors de passage au Québec, tenaient des propos similaires à ceux de Sarkozy mais favorables à la cause séparatiste. Ces personnages politiques, malgré la consigne de leur gouvernement de « ni indifférence, ni ingérence… », trouvaient toujours moyen de signifier leur sympathie à l’indépendance du Québec en jouant avec les mots pour « bipasser » la consigne de leur pays.

Quand les remarques extérieures favorisent leur option, pas de problème, mais si elles sont contre, eh bien là, alors, c’est un scandale. On peut être pour ou contre l’ingérence d’étrangers dans nos affaires mais on ne pas être pour quand ça aide la cause, ou contre si cela nuit à la cause. Cela ne fait ni sérieux ni honnête.

De même, les insultes et l’agressivité envers le président français sont inutiles et désobligeantes. Le traiter d’« ignorant », de « pas de classe », d’« indigne » et d’autres insinuations malveillantes, c’est s’abaisser et prolonger inutilement le débat. Aussi, les attaques contre Paul Desmarais, comme quoi Sarkozy ne fait que répéter ce qu’il lui souffle à l’oreille, sont de la pure invention et dénigrent le plus grand homme d’affaires francophone que notre pays ait produit. Nous devrions tous être très fiers de ses succès. J’aimerais bien qu’il y en ait des centaines comme lui.

Ceux qui attaquent Sarkozy sont les mêmes qui ont interféré dans la dernière élection présidentielle en France en prenant ouvertement parti pour Ségolène Royal. On voit bien, aujourd’hui, combien ils se sont trompés puisque même son parti, le parti socialiste, la rejette. Si elle avait été présidente, on peut s’imaginer ce qui serait advenu pour remplacer toutes les actions vigoureuses, intelligentes, réalistes, innovatrices et spectaculaires de Sarkozy, en France, en Europe et dans le monde.

La meilleure position dans un tel cas est de réaffirmer que ce sont les Québécois seuls qui décideront de leur avenir et concernant les personnages de l’extérieur qui prennent positions sur le sujet, il faut simplement continuer à bien faire et à les laisser braire.

Claude Dupras

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