Éric
Zemmour, essayiste, journaliste et polémiste français, a écrit un livre qui
connaît actuellement un succès extraordinaire en France, « Le suicide
français ». Je viens tout juste d’en terminer la lecture et il m’a appris pourquoi
la France d’aujourd’hui n’est pas la France d’hier. Il raconte l’histoire
totale d’une déconstruction joyeuse, savante et obstinée des moindres rouages
qui avaient édifié la France. Je le recommande fortement.
J’ai pensé traiter,
à ma façon, d’un de ces rouages concernant la venue des maghrébins en France et
ce qui en a découlé depuis leur immigration massive. J’y vois une situation similaire
au Québec.
En 1905, la
loi sur la laïcité est adoptée en France. Elle affirme que la République
assure la liberté de conscience. Elle garantit le libre exercice des cultes.
Elle établit
les règles sur la séparation des Églises et de l’État. Dans les écoles, entre
autres, elle ne s’adresse pas aux élèves mais aux professeurs qui doivent maintenir
la neutralité religieuse.
En 1958, la
nouvelle constitution française précise la laïcité : La France est une République indivisible,
laïque, démocratique et sociale. Elle assure l'égalité devant la loi de tous
les citoyens sans distinction d'origine, de race ou de religion. Elle respecte
toutes les croyances.
Jusqu’en
1970, les prénoms des enfants sont français conformément à un calendrier contrôlé
par le préfet, comme dans la Rome des romains. Ainsi Fatima pouvait être soit
Catherine, Nathalie ou Françoise mais pas Fatima. Yehudi pouvait être
Jean-Jacques, Charles ou Nicolas mais pas Yehudi. Et cela s’appliquait aussi
aux enfants des nouveaux venus, arabes ou juifs maghrébins.
En septembre
1989, il y a à peine 26 ans, les Français sont sidérés. Ils ne savent pas
comment appeler le voile : un tchador, un foulard, un morceau de tissu, un
fichu… Deux étudiantes de 13 ans et 14 ans viennent d’être renvoyées d’un collège
pour avoir refusé de l’ôter pendant les cours. L’évènement prend une ampleur
nationale puis internationale. La gauche prend la défense des gamines. Une
manifestation a lieu à Paris contre l’interdiction. Le PM Rocard et le ministre
de l’éducation Jospin ne tranchent pas. Le Conseil d’État élabore une doctrine
balancée qui concilie laïcité et liberté individuelle. Les juges du
Palais-Royal estiment que « le port du voile islamique est compatible avec
la laïcité s’il n’y a pas de menace pour l’ordre ou le fonctionnement
normal de l’enseignement. Le Ministre met ses pas dans ceux des juges et
publie une circulaire à cet effet.
Quelques années
plus tard, en 1993, François Bayrou, le centriste devenu ministre de l’éducation,
revoit la circulaire et fait la distinction entre signes religieux ostentatoires
interdits et les autres autorisés. De plus, la loi est changée et dorénavant, les
prénoms des enfants sont choisis par ses père et mère.
En 1996, la
Cour Européenne des droits de l’homme confirme
et décrète que : ..le prénom est un moyen d’identification… il revêt un
caractère intime et affectif pour les parents et relève de la sphère de la vie
privée. En fait, plusieurs y voient là, le passage de l’assimilation au multiculturalisme.
En 2004, après
15 ans de tergiversations, le président Chirac ose interdire le voile
islamique à l’école, faisant semblant d’inclure dans sa législation les croix
trop visibles et les calottes portées par les enfants juifs. Personne n’est
dupe ». Il croit que le pouvoir législatif ajouté à celui du judiciaire est
en mesure de régler la question. Mais ce ne sera que deux grand coups d’épée
dans l’eau car ces décisions ne respectent pas les règles de la loi sur
la laïcité.
Le débat porte
aussi sur le droit des femmes. Les grand-mères ont toujours eu dans le
passé des fichus pour cacher leurs cheveux, traces de la passion érotique des
méditerranéens. Pour plusieurs, la liberté et la dignité de la femme sont bien
plus méprisées par la pornographie, la publicité et le cinéma.
En réalité,
Chirac recherche l’assimilation. Par exemple, une règle non écrite mais
respectée fait en sorte que les jeunes juifs doivent ôter leur kipa de leur tête et ranger leur étoile
de David sous la chemise puisque toute manifestation de tout signe religieux
est interdite dans l’espace public.
En 1980,
cette pratique est abandonnée au bénéfice du Moi tout-puissant et de sa liberté
individuelle. Les musulmans s’engouffrent alors dans leur société pour utiliser
leur religion comme un manifeste identitaire leur permettant de retrouver une
certaine puissance et une autonomie politique.
Pendant
ce temps, la France ne se rend pas compte qu’elle perd la guerre du halal.
Dans les quartiers, où la population musulmane devient majoritaire, cette dernière impose sa culture
et son culte. Elle islamise tous les domaines de l’existence. Les boucheries halal se multiplient. Les mamans demandent
des viandes halal à la cantine
scolaire. Certaines matières de l’enseignement sont récusées comme le
darwinisme, les croisades, la Shoah, Voltaire, l’infidèle Mme Bovary.. Le
ramadan doit être respecté à l’école, les jeunes filles rabrouées par leur
grand frère même si elles sont décemment habillées, etc… C’est une islamisation
par le bas. Quelques décennies plus tard, après le regroupement familial, les
émeutes, les marches, la sortie forcée des Français de certains quartiers, l’affaire
des filles voilées, etc… la France en sort bouleversée. Plus elle s’oppose,
plus elle est accusée de manque de bonne volonté et de racisme par les jeunes
immigrés.
En fait, au
nom de la liberté, une société totalitaire s’est instaurée dans la société
française. Au nom des droits de l’homme, une nation dans une nation s’est érigée.
La France est devenue multiculturelle. Depuis, elle s’adapte difficilement,
veut, veut pas. Et tout ça, malgré sa loi sur la laïcité.
Aujourd’hui,
au Québec, nous sommes au point où était la France avant 1905 et en 1958. On
débat pour savoir si oui ou non notre Assemblée Nationale doit voter une loi de
la laïcité. Pour plusieurs, c’est la solution à leur peur démesurée face au nombre
croissant de musulmans dans notre société. D’autres affirment aussi qu’elle
assurera l’égalité homme et femme. Pour un bon nombre, ils veulent imposer leur
conviction athéiste. Tous donnent en exemple la loi de la laïcité de la France
sans vraiment connaître son impact réel, son efficacité et sans avoir une démonstration
concluante qu’elle a atteint ses objectifs.
Claude
Dupras