La société Aéroports de Montréal (ADM), propriétaire de l’aéroport internationale Pierre-Elliot Trudeau de Montréal, refuse de payer ses taxes foncières à la Ville de Montréal. Elle veut être traitée comme le gouvernement fédéral qui est exempté de taxes foncières. Elle oublie que le gouvernement fédéral compense la ville pour les montants de taxes qu’ils ne paient pas.
Aéroports de Montréal n’est pas le gouvernement fédéral mais une société autonome et indépendante à qui le gouvernement canadien a transféré ses actifs dans les aéroports de Mirabel et de Dorval (maintenant PET). L’ADM en assume la direction et la gestion.
Depuis, Aéroports de Montréal a décidé de changer la vocation des aéroports, de fermer l’aéroport de Mirabel, de moderniser l’ex-aéroport domestique de Dorval (maintenant un arrondissement de Montréal) et d’y ajouter la nouvelle jetée internationale et le complexe des arrivées internationales.
C’est cette société qui a retenu tous les planificateurs et professionnels nécessaires à la réalisation de ce projet important, qui a engagé les entrepreneurs et financé le projet, qui gère tout le complexe aéroportuaire, qui négocie toutes les ententes avec les compagnies aériennes, etc. En un mot, depuis 1986, ADM est entièrement responsable de nos aéroports.
Mirabel fut inauguré en 1975. Ce nouvel aéroport international de Montréal utilisait une superficie de 7 000 hectares pour son opération entourée d’une « zone tampon » de 29,000 hectares de terrain. Il était situé à 48 km du centre-ville de Montréal. Il était devenu le plus vaste site aéroportuaire du monde. Il desservait tous les vols internationaux, de même que certains vols de correspondance à destination des grands centres urbains du Canada. Le gouvernement canadien qui l’a construit voyait alors grand et loin et avait tenu compte des restrictions normales pour le développement d’un aéroport en milieu urbain.
Le bâtiment de l’aéroport de Mirabel était moderne, beau, bien pensé et fonctionnel. Un vrai succès architectural reconnu par les plus grands experts. Les passagers avaient peu de distance à couvrir pour se rendre ou revenir du quai d’embarquement. Dans une surface restreinte, les passagers étaient bien servis et en grand nombre. J’aimais bien voyager par cet aéroport.
Mais un groupe de pisses-vinaigres d’une pseudo-élite montréalaise appuyé par la Chambre de Commerce de Montréal, qui pensait plus à ses membres qu’à l’intérêt général des Québécois, estimait que le site de Mirabel était trop éloigné de Montréal (ils n’avaient sûrement pas été à Paris, à Rome…) et se mit à le discréditer et à combattre pour obtenir sa fermeture et sa relocalisation à proximité de l’aéroport domestique à Dorval, situé sur l’île de Montréal. À ce moment-là, en 1986, j’étais candidat à la mairie de Montréal en tant que chef du Parti civique de Montréal. Je m’opposai au changement proposé pour les raisons suivantes : Mirabel était un aéroport exceptionnel ; le territoire pour son expansion future assurait que personne ne serait gêné, à moyen et à long terme du bruit généré par l’arrivée et le départ des avions ; l’aéroport pouvait fonctionner 24h sur 24 et accepter toutes les possibilités d’arrivée et de départ ; les possibilités d’écrasement d’un avion en milieu urbain étaient minimes ; le transfert de l’aéroport domestique de Dorval vers Mirabel était nécessaire (bruit et danger) et ses vastes terrains pouvaient être re-zonés pour fins domiciliaires et générer d’importantes taxes foncières à la ville ; si cette dernière solution n’était pas acceptée, un train rapide construit à prix raisonnable, aurait pu relié les deux aéroports puisque l’emprise de terrain d’un ancien train était disponible.
Mon adversaire, Jean Doré qui ne pensait pas plus loin que son nez, traita ma position de farfelue, expression reproduite, à la légère, à la une du journal La Presse. Ce n’est pas très bon pour une campagne électorale… Pourtant, 65% des Montréalais et Montréalaises s’opposaient, dans un sondage scientifique, à la relocalisation de Mirabel. Depuis le temps m’a donné raison.
Aujourd’hui, à tous les jours, après les 2 milliards $ dépensés pour la relocalisation des aéroports à Dorval, des centaines d’avions traversent la ville de Montréal, en mode d’atterrissement, d’est en ouest et créent des bruits qui affectent la paix, surtout la nuit, de centaines de milliers de citoyens et citoyennes de Montréal qui vivent dans l’empreinte de cette trajectoire. Et cela, malgré la promesse des autorités d’Aéroports de Montréal, qui pour répondre à l’argument du bruit, avaient promis qu’aucun avion ne partirait avant 7h et ne serait autorisé à arriver après onze heures. La réalité d’aujourd’hui est que les avions quittent à 5h30 et arrivent jusqu’à minuit et demi, et même plus tard.
Ma position tenait compte aussi du fait qu’une menace d’écrasement d’un de ces appareils dans le milieu urbain de la métropole devenait possible. Imaginons un tel accident aujourd’hui. Nous crierions tous notre désespoir, notre peine et nous aurions raison de pointer du doigt ceux qui ont contribué au déménagement de Mirabel car ils seraient les vrais responsables de ce drame humain.
Je n’aimerais pas vivre dans ce secteur.
Il y a quelques jours, je suis arrivé d’Atlanta à l’aéroport Trudeau à bord d’un petit avion régional (les compagnies américaines qui desservent Montréal, nous traitent malheureusement maintenant ainsi). On débarqua tous les passagers sur le tarmac, via l’escalier escamotable de l’avion, d’où nous rentrâmes à pied dans l’aéroport. Pourtant, en arrivant nous avions constaté que peu d’avions étaient à l’aéroport et la disponibilité de plusieurs quais de débarquement (j’ai vécu la même expérience en plein hiver à – 25°C). Je comprends que cela peut être acceptable dans les Caraïbes où il fait chaud ou en Afrique où il fait encore plus chaud, mais à Montréal, une grande ville où il fait normalement frais ou froid, je n’accepte pas que les voyageurs soient ainsi traités. Et pour ajouter à cette frustration, le plan du nouvel aéroport oblige les passagers à marcher un bon vingt minutes (dans sa partie la plus longue) avant d’atteindre le centre de contrôle des passeports. Le nouvel aéroport P. E. Trudeau est un assemblage d’espaces incohérents. Lorsqu’on le compare avec celui de Mirabel où avec les nouveaux aérodromes du monde, c’est à rendre triste.
Montréal devait, avec Mirabel, renforcer sa position comme point d’entrée aéroportuaire de l’Amérique pour les voyageurs provenant de l’Europe, des pays scandinaves, de la Russie, de l’Afrique et de l’Arabie. Les « chialâges » et les querelles de nos « élites » d’affaires et politiques ont donné une excuse parfaite à nos gouvernements pour retarder la construction des liens autoroutiers et ferroviaires prévus pour Mirabel. Toronto a alors profité de nos hésitations pour nous ravir ce titre de « point d’entrée » que Montréal détenait depuis de longues années. Il faut souligner qu’aujourd’hui, même avec la centralisation des aéroports à Montréal, nous n’avons pas encore les liens précités. C’est une vraie honte !
La société Aéroports de Montréal ne veut pas payer ses taxes prétextant qu’elle doit être traitée comme un gouvernement et que son endettement l’en empêche. C’est ridicule et insultant pour les Montréalais et les Montréalaises qui ont subi cette gigantesque tromperie et pour leur ville qui pourrait récolter les taxes foncières d’habitations construites sur le site de Dorval si l’ensemble des installations aéroportuaires avait été centralisé à Mirabel. Que les taxes soient payées ! Et vite, car assez c’est assez !
Claude Dupras
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