vendredi 17 décembre 2010

Obama et ses promesses électorales

Ce n’est pas une sinécure d’être président des États-Unis d’Amérique. Un candidat à ce poste peut être de bonne foi et être sincère lorsqu’il fait ses promesses électorales, mais rien n’assure qu’il pourra, une fois élu, les réaliser. On le voit bien en suivant le déroulement de la politique américaine actuelle.

Barack Obama a été à ce jour un bon président. Il a travaillé fort sur des sujets de première importance. Durant ses deux premières années au pouvoir, alors qu’il avait un support majoritaire au Congrès, le président Obama a fait adopter des lois importantes pour stopper la crise économique, protéger les banques, le marché et assurer à presque tous les Américains une protection de soins de santé. Cette dernière loi que les Américains ont surnommée Obamacare assure à 35 millions d’individus, une protection vitale qu’ils n’avaient pas. Elle a été votée sans l’appui du parti Républicain. Nous, Canadiens et Européens, ne pouvons comprendre pourquoi un si grand parti politique s’oppose à une protection aussi élémentaire.

Mais, avec le temps, on se rend compte qu’Obama renie les promesses qui lui ont fait gagner son élection présidentielle.

Par exemple, l’Obamacare devait couvrir tous les Américains, or il en restera encore huit millions qui ne le seront pas, l’équivalent de la population du Québec.

Il y a le crédit de taxes temporaire pour dix ans accordé par GWBush. Obama n’a cessé de répéter qu’il l’abolirait. Alors que le 31 décembre prochain était le jour où le crédit devait s’éteindre de sa belle mort, Obama a décidé de l’allonger pour deux autres années dans un compromis politique avec les Républicains qui favorisent les riches du pays. C’est un manque à gagner de 70 milliards $ par année.

Et, il y a les projets particuliers des représentants et des sénateurs, les fameux earmarks, qu’Obama avait promis, dur comme fer, encore l’an dernier, d’éliminer complètement. Or le Congrès vote actuellement sur un projet qui en contient pour huit milliards $ et Obama ne dit rien.

Puis, il y a l’Afghanistan. Obama avait promis de mettre fin à la guerre. Non seulement il ne l’a pas fait, mais il a augmenté les forces militaires américaines de 35,000 à 95,000 soldats et parle maintenant d’un retrait possible de l’armée américaine dans deux à quatre ans. Le coût annuel se chiffre en centaines de milliards $.

Obama a promis de couper le déficit en deux. Le déficit de 2009, première année d’Obama, a été de 1,42 trillions $ soit le triple de l’année précédente. Il n’est pas surprenant que les Républicains aient des munitions pour blâmer Obama. Cependant, ces derniers oublient volontairement les masses d’argents qui ont dû être dépensées pour contrer la déferlante de la crise économique.

Depuis l’élection de mi-mandat où Obama a trébuché et perdu sa majorité, les Républicains et la droite américaine font la pluie et le beau temps. Avec l’appui des milliers de radiomen de droite et celui des commentateurs du réseau télévisé Fox News, les Républicains persuadent, à coups de démagogie évidente, une partie de plus en plus grande de la population qu’Obama est un dépensier qui ne fait qu’augmenter le déficit et la dette nationale. Malgré que ce soient eux qui avec GWBush et ses deux guerres aient fait doubler la dette nationale, ils réussissent à amener l’opinion publique à placer le blâme sur Obama. D’ailleurs, un récent sondage le démontre clairement puisqu’il place maintenant GWBush en avant d’Obama en rapport avec le taux de satisfaction comme président. C’est invraisemblable.

Au moment d’écrire ces lignes, la dette américaine est de $13,886,724,821,930.00. Soit plus de 44 000 $ par Américain. Elle a augmenté, depuis 2007, de 4,5 milliards par jour. C’est effarant et on se demande bien où vont les USA ? Avec l’Europe qui a de graves problèmes financiers, l’Occident s’approche-t-il d’un précipice ?

Heureusement que les taux d’intérêt sont actuellement bas. Mais cela ne durera pas éternellement. Avec l’accélération de la reprise économique mondiale, les investisseurs institutionnels chercheront à faire des placements plus rentables que ceux de la trésorerie américaine et voudront prendre plus de risques afin d’obtenir un meilleur retour sur leurs investissements. Les taux d’intérêts à long terme augmenteront en conséquence et cela se reflétera par des frais d’emprunts plus élevés qui ajouteront à la dette américaine. Le gouvernement doit donc couper dans les dépenses et augmenter les taxes pour balancer le budget d’ici quelques années, en espérant que le niveau de croissance soit présent.

Voilà pourquoi le président Barack Obama doit se tenir debout devant les Républicains et respecter ses promesses électorales. Il avait raison avec son programme politique. Il peut faire quelques concessions pour atteindre des compromis mais rien qui affecte sérieusement la santé financière de son pays. Il se doit d’être intraitable sur la question du déficit et de la dette et faire les choix qui s’imposent tout en s’assurant que les Américains travaillent, qu’ils sont socialement protégés et que son pays se donne les outils pour faire face aux défis de l’avenir, comme le transport en commun rapide.

Obama doit aussi soutenir l’expansion des investissements gouvernementaux et privés dans la science, la technologie, l’innovation et l’éducation afin que les USA soient toujours les meilleurs du monde dans ces domaines. Par contre, il peut couper radicalement, entre autres, dans les dépenses générées par le complexe militaro-industriel.

L’Asie est sur le point de devenir le plus grand marché de consommateurs de l’Histoire. Les exportateurs américains peuvent devenir les premiers bénéficiaires. Déjà Intel, GE, Proctor & Gamble annoncent que leur croissance vient de l’Asie. C’est au gouvernement américain de mettre en place les conditions, comme le libre-échange entre l’Asie et les USA, pour atteindre ce potentiel. C’est une vraie opportunité pour les USA d’exercer son énergie créatrice et entrepreneuriale et de créer des emplois de haute technicité pour les travailleurs américains. Une économie dynamique et florissante remplit vite les coffres de l’État. Obama le sait et il devra exercer son leadership pour montrer aux Américains que l'avenir peut être rose.

Les Américains aiment les chefs capables de défendre leurs vrais intérêts, de leur expliquer clairement la situation et la voie à suivre. L’ex-président Bill Clinton l’a bien démontré. Obama a-t-il les moyens de faire autrement ? S’il perd la prochaine élection à cause d’une telle attitude, eh bien tant pis, il aura agi dans l’intérêt à long terme de son pays. Mais les odds sont qu’il gagnera à nouveau, s’il en a le courage.

Claude Dupras

3 commentaires:

Mansour a dit…

A mon avis il y a tout une serie de sujets a debattre pour essayer de comprendre comment la plus grande puissance economique mondiale se trouve dans la situation ou elle se retrouve aujourd'hui et voire si cette societe americaine est vraiment capable de surmonter ses difficultes et retrouver sa position dominante a travers le monde entier.
Il ne fait pas de doute que les usa ont la possibilite de se ressesir et reprendre son baton de pelerin dans la direction a long terme de l'avenir de l'humanite. Mais franchement je n'arrive pas a croire que la societe americaine, avec son obsession des gains a court terme, est capable de redresser le cap de son avenir.
Si on veut vraiment commencer un dialogue intelligent concernant la crise economique, sociale et morale des usa, nous devons tout d'abord revoir critiquement les valeurs globales americaines concernant le capitalisme en general et aussi le role de l'etat dans la gestion de l'economie nationale du pays.
Depuis pratiquement l'election du president americain Regan en 1980 l'amerique a accepte sans relache que l'amerique se doit de reduire le role de l'etat dans la vie economique du pays d'un cote et surtout tout faire pour reduire la pression fisacale sur les entreprises et surtout les amercains riches. Nous avons vu les consequences de la fameuse "tricle down" theorie de Ronald Regan ses dernieres 30 annees. Tout d'abord plutot que de reduire la taille de l'etat, comme le souhaitait Regan, l'amerique a vu une explosion des dimensions de cet etat, a cause des lois sociales qui etaient difficiles a remettre en cause meme sous le leadership des republicains au congres americain. Ensuite la fameuse proposition de tricle down theory nous a demontre que l'avenir immediat des entreprises americaines avait en fait accelere la fuite des capitaux des usa vers le reste du monde et la chine en particulier.
En dehors de toutes les mesures prises, aussi bien par les administrations republicaines que democratiques durant les 30 dernieres annees, pour subventionner tous les secteurs economiques americains, les administrations americaines de tous bords ont completement refuse de revoir toutes les lois sociales, qui au depart, devaient aider uniquement les americains les moins demunis et qui aujourd'hui place les plus pauvres au meme niveau que les plus riches de ce pays.

Mansour a dit…

Et aujourd'hui nous nous retrouvons face a une situation vraiment burlesque si elle n'etait pas tragique.La dette publique federale a explose les dernieres annees et le deficit budgetaire en 2010 depasse le niveau de toute la dette publique heritee par le president Carter.
Comment sortir de ce dillemne economique et financier que l'amerique doit gerer.
A mon avis je pense que la nation americaine se doit une fois de plus retrouver son sens nationaliste, base sur une solidarite nationale puissante. Mais cette solidarite nationale appelle a des sacrifices que ni les consommateurs ni les investisseur sont aujourd'hui prets a accepter.
Pource qui concerne l'assurance sociale et l'assurance dedicaire, je ne vois comment les americains seront subitement en faveur le leurs destruction totale comme le propose le parti republicain. Mais il faut aussi realiser que ces programmes sont intenables a long terme financierement a cause de la demographie en particulier. Je pense que l'amerique sera peut etre capable d'instituer des reformes pour tout d'abord introduire un systeme progressif pour empecher les plus riches de profiter de ce systeme qui etait prevu pour aider les populations les plus demunies de cette societe. Je crois aussi que les democrates doivent tout de meme reconnaitre l'evolution de la demographie americaine et surtout la progression positive de l'esperance de vie de cette societe. Je serais personnellement pour la fixation de l'eligibilite a l'assurance sociale a 67 ou meme 69, mais a condition a ce que les employes ne seront pas obliges de prendre leur retraites a l'age de 60 ou 65 ans comme c'est le cas aujourd'hui en grande partie.
La barriere la plus difficile a surmonter pour la societe americaine est de reformer de fond en comble tout le systeme fiscal americain. A mon avis le systreme fiscal americain est le plus regressif du monde industrialise et meme du monde sous developpe.Tout le systeme fiscal americain est bati sur la base d'un transfer miraculeux de ressources publiques aux entreprises americaines, petites et grandes. Quand je vois que j'ai paye plus d'impots federaux que les entreprises comme Xon-Mobil ou meme la banque americaine qui ont accumule en 2010 plus de 40 milliards de dollars de profits et n'ont pas paye un seul dime a l'etat federal. Comment peut on retrouver un equilibre fiscal au niveau de l'etat federal avec un tel systeme d'imposition fiscale.

J.Al. a dit…

Excellente analyse.
Cependant, je pense qu'il a voulu beaucoup trop faire et tout trop vite et cela lui a joué des tours. Il lui faudra beaucoup, mais alors beaucoup de chance pour pouvoir briguer un deuxième mandat et je n'y crois pas