Il y a dans la démarche de Denis Coderre des choses qui me font penser à Camilien Houde, l’ex-maire de Montréal.
Et, il y a quelques jours, un autre ex-maire, Jean Doré élu en 1986, plus contemporain, est venu salir Coderre de façon simpliste en le dénigrant méchamment. Doré a dit : Coderre est « bon pour faire son auto-promotion mais comme maire de la ville de Montréal, ce n’est pas le genre de personne que ça prend! ».
Camilien Houde, fils d’ouvrier d’une famille de 10 enfants, perd son père à 9 ans et voit sa mère devenir couturière dans une usine de textiles pour subvenir aux besoins de la famille. Voulant l’aider, il travaille comme livreur pour une boucherie, tout en poursuivant difficilement ses études qui se terminent par le diplôme de cours commercial du collège Lasalle de Longueuil, dirigé par les Frères des écoles chrétiennes. Il a 16 ans et devient caissier de la banque d’Hochelaga et 10 ans plus tard en est le gérant. Il épouse la fille d’Urgel Bourgie, entrepreneur de pompes funèbres, qui décède après avoir mis-au-monde deux enfants. Il se remarie et quitte la banque pour tenter sa chance dans différents commerces, où il n’a pas de succès. Il devient représentant d’une biscuiterie, ça ne va pas et crée un commerce d’importation de charbon. Il échoue lamentablement. Il devient agent d’assurance et connaît encore des déceptions et lâche ce métier. Entretemps, il s’intéresse au parti conservateur du Québec. Son mentor et ancien patron de la biscuiterie, un de 5 députés conservateurs, l’enjoint à devenir candidat du parti dans le comté de Ste-Marie dont le député-sortant est appuyé par la forte machine électorale du maire de Montréal, Médéric Martin. C’est un difficile défi. Durant la campagne, il se dévoile comme un orateur flamboyant, un tribun hors de l’ordinaire qui électrise les foules. À la surprise générale, après plusieurs déboires, Camilien gagne et devient député conservateur. À 33 ans, le plus jeune député provincial est « le p’tit gars de Ste-Marie ». Jean Doré aurait sûrement dit du candidat Camilien Houde, « il n’a pas les qualités pour devenir député ».
Denis Coderre est un mordu de la politique depuis sa jeune enfance. Il est volontaire et travailleur pour le parti libéral du Canada. Il obtient avec grand succès son baccalauréat en science politique de l'Université de Montréal et, plus tard, une maitrise en administration des affaires pour cadres (Executive MBA) de l'Université d'Ottawa. Né à Joliette, il a 25 ans lorsqu’il convainc son parti et les Joliettains libéraux de le choisir candidat pour l’élection fédérale de 1988. Mais Brian Mulroney est au sommet de sa gloire et Joliette est progressiste-conservateur depuis toujours grâce à l’ex-Ministre Roch Lasalle. Qu’importe la difficulté, Denis y voit un premier pas vers un éventuel siège à la Chambre des Communes. Il perd. En 1990, il y a une élection partielle dans le comté Ste-Marie. Encore-là, la conjoncture n’est pas favorable. Coderre reçoit la bénédiction des libéraux du comté et devient leur candidat contre Gilles Duceppe qui fait sa rentrée en politique. Coderre se lance dans une élection à la Camilien. Il attire et enthousiasme les foules de tous les coins du comté avec des discours flamboyants, en chemise avec ses larges bretelles rouges. Mais ce n’est pas suffisant pour les nombreux séparatistes de ce comté qui endossent solidement Duceppe. Mais qu’importe, c’est l’expérience qui entre et Denis pense déjà à la prochaine élection générale. Elle arrive en 1993, et il choisit sa circonscription électorale de Bourassa pour briguer à nouveau les suffrages. Le Bloc a le vent dans les voiles et son candidat l’emporte sur Denis. Mais qu’à cela ne tienne, il sait maintenant que ce comté l’élira un jour député. Dès le lendemain de sa défaite, il s’attèle pour gagner la prochaine et en 1997, il récolte enfin les efforts des 10 dernières années et devient député fédéral de Bourassa devant le bloquiste tout surpris de sa défaite. Denis Coderre a 33 ans, comme Camilien Houde.
En 1927, quatre ans après avoir été élu, Camilien est battu lors de la nouvelle élection. Doré dirait « Ah, je vous l’avais bien dit ». Le parti conservateur voit sa députation coupée en deux. Mais Camilien sait que le libéral a volé l’élection. Il la conteste en cours. Elle est annulée par le juge et après plusieurs mois doit être reprise. Entretemps, une élection municipale doit se tenir en 1928 à Montréal. Le maire Martin occupe son siège de premier magistrat depuis 15 ans, mais Camilien qui le sait responsable de la fraude qui a occasionné sa défaite, décide de se porter candidat à la mairie et monte une équipe solide pour l’appuyer. Il accuse, entre autres, Martin d’avoir mal négocié l’achat du réseau d’aqueduc de la compagnie Montreal Water and Power. Camilien récolte 60% des suffrages et devient maire de Montréal. La charte de Montréal, à ce moment–là, donne le pouvoir à l’exécutif qui est composé d’amis de Martin. Il ne reste à Camilien que le prestige attaché au titre de maire. A l’élection partielle dans son comté, il décide d’être candidat à nouveau et regagne son siège de député. Il a donc deux tâches politiques et avec la renommée qu’elles lui rapportent, il devient un des politiciens les plus écoutés au Québec. Quelque temps plus tard, le chef du parti conservateur, Arthur Sauvé, démissionne et Camilien est élu nouveau chef. A l’élection municipale qui suit en 1930, l’équipe de Camilien obtient la majorité au conseil municipal et à l’exécutif. Le peuple lui fait de plus en plus confiance.
Denis Coderre arrive à Ottawa et s’initie aux travaux parlementaires et à son poste de député fédéral. Deux ans plus tard, le PM Jean Chrétien l’invite à siéger au conseil des ministres comme responsable du sport amateur et il contribue à l’implantation de l’agence internationale anti-dopage à Montréal. Et en 2003, le PM Paul Martin le nomme président du conseil privé et responsable de plusieurs dossiers, comme la création de l'Agence de gestion des ressources humaines de la fonction publique du Canada, interlocuteur fédéral auprès des Métis et ministre responsable de la Francophonie. Il est réélu député de Bourassa nonobstant les vagues bloquistes ou néo-démocrates en 2004, 2006, 2008, 2011 et toujours avec de grosses majorités. Il est un député qui travaille, qui connait bien les besoins des gens de son comté, qui sait écouter et agir pour le peuple. Et le peuple, comme jadis pour Camillien Houde, lui rend bien sa confiance puisqu’il est député de Bourassa depuis 16 ans.
Camilien Houde a été maire de Montréal pour un total de 18 ans, député provincial de Ste-Marie durant 12 ans et député fédéral de Papineau durant 4 ans. Il a eu le privilège d’obtenir la faveur de ses commettants pour la raison que ces derniers le voyaient comme un des leurs qui les comprenait bien. Certes, Camilien Houde est devenu une très grande idole à cause de sa peine en prison suite à son objection publique à la conscription obligatoire durant la deuxième guerre mondiale. Mais mis à part cet important fait, arrivé à la fin de sa carrière politique, le reste de sa vie politicienne à été remarquable et de longue durée.
Quant à Jean Doré, il aura été maire de Montréal durant 8 ans. Élu en 1986 grâce au Rassemblement des Citoyens et Citoyennes de Montréal (RCM) qui, à ce moment-là, comptait 25 000 membres actifs dédiés à remplacer le Parti Civique au pouvoir depuis 30 ans, il est réélu en 1990 mais le parti n’a plus que 5 000 membres. Par la suite, il renie le RCM qui l’a porté au pouvoir et s’engage dans une dernière campagne électorale en créant un nouveau parti, Équipe Montréal. C’est un désastre. Il est battu à plat de couture n’obtenant que 10,3 % du vote, dépassé même par Michel Prescott, chef du RCM, qui récolte 14,8 %. Il ne fait élire que deux conseillers très connus, Sammy Forcillo et Helen Fotopoulos, sur 51 et son parti finit la campagne avec des dettes de 300 000 $, selon les médias. Il s’est avéré être un piètre maire, loin du peuple et celui-ci l’a sanctionné durement ainsi que ceux qui le suivaient. Jamais un ancien maire n’a été ainsi châtié et humilié depuis Camilien Houde.
De toute évidence, Jean Doré n’a pas de leçon a donné aux Montréalais et Montréalaises en rapport avec les candidats à la prochaine élection municipale. Surtout pas en rapport à Denis Coderre, un gagnant en politique à laquelle il a dédié sa vie et qui fait un très bon travail de député. Il est un populiste comme Camilien Houde l’était et il n’y a rien de mal à ça, car de tels personnages sont près du peuple, le comprenne, le serve bien et la ville devient plus dynamique et mieux connue. Le maire La Beaume de Québec, est un autre bon exemple.
En politique municipale, comme ailleurs, le passé est garant de l’avenir.
Claude Dupras
Ps. Ce texte laisse peut être entendre que je supporterai Denis Coderre à la prochaine élection municipale. Ce n’est pas le cas car je réserve cette décision pour le jour où tous les candidats seront connus et c’est à ce moment-là que je ferai mon choix, comme tous les Montréalais et Montréalaises. Ma position actuelle n’est que pour faire valoir que la candidature de Denis Coderre est fort acceptable.
12 commentaires:
Je suis du …ième âge et il me semble que j'ai toujours entendu parler de Camilien Houde et voici qu'on en reparle encore aujourd'hui. Il faut croire qu'il a laissé sa marque. Il avait la corpulence pour monter les échelons et a réussi à atteindre son but. C'était un personnage qu'on ne peut oublier. Tant qu'à ceux qui déprécient les autres, on ne peut dire qu'ils ont gagné en sagesse en vieillissant. On n'y peut rien; il y aura toujours de ce genre de personnes un peu jalouses de ne plus être populaires. J'aime bien qu'on me rappelle le passé avec plein de détails.
Je ne suis pas un observateur de la scène politique aguerri comme vous mais je partage votre opinion que jusqu'à
preuve du contraire Denis Coderre est un candidat sérieux dont le nom doit figurer dans le peloton de tête d'une courte liste de prétendants au poste de maire de Montréal. Il est dynamique, articulé, crédible, expérimenté et ambitieux. J'ai un préjugé favorable pour sa candidature et lui souhaite bonne chance.
Bravo pour le cheminement comparatif de Coderre et de Camillien. On voit que la Chambre de Commerce des Jeunes a su inculquer aux âmes bien nées les valeurs politiques et le bon sens qui s'y rattache. J'y étais moi aussi en même temps que toi.
Incidemment, je publierai, en 2013, aux Éditions Hurtubise, un roman historique sur Camillien Houde.
Salut Claude, Merci pour avoir fait l’éloge du petit cousin de mon père, Camilien Houde.
J’ai bien aimé ton blog Pour Denis Coderre
Depuis le début je dis qui me fais penser à Camilien Houde, un gars du peuple comme Labeaume
Je ne comprends pas la démarche de Jean Doré
Salut mon cher,
Tu n’es pas obligé d’aimer Jean Doré. Tu ne dois pas le dénigrer parce qu’il s’est présenté contre Jean Drapeau.
Mais tu ne dois pas dans tes commentaires volontairement omettre des choses.
Je connais bien Jean Doré. J’ai fondé avec André Laurin de la CSN les ACEF. Jean Doré a été de dg pendant des années. C’est un homme intègre, travailleur set surtout un démocrate. (Ce qui n’était pas le cas de Jean Drapeau)
Sous son règne il a créé les bureaux Accès Montréal pour rapprocher l'administration municipale des citoyens, également responsable des Fêtes du 350e anniversaire de Montréal. De plus il a mis en place le Musée Pointe-à-Callière dans le Vieux-Montréal.
Enfin, il a non seulement le droit mais il est très bien placé pour savoir quelle personne faut-il comme maire de Montréal. Sous son règne il n’y avait pas eu de Fling flang. Ce n’était le cas pour Pierre Bourque et les autres qui suivent.
Pour ce qui est de Denis Coderre, on doit se méfier de ces populistes. C’est comme Labaume à Québec. Les gens qui sont seuls à avoir le pas, je m’en méfie.
Salutations et bonne fin de journée
Gérard
Gérard
Premièrement, je ne dénigre personne. Ce n’est pas ma façon de penser et de voir et c’est pourquoi je me suis élevé contre son affirmation gratuite à Dutrizac. Je me méfie plus des grands parleurs que des populistes, car l’histoire nous démontre que ces derniers ont aidé davantage les petites gens que les premiers.
Deuxièmement, Doré ne s’est pas présenté contre Jean Drapeau puisque c’est moi qui était chef du Parti Civique en 1986 et j’ai mangé une dégelée aux mains de Doré et du RCM à la mairie en ramassant moins de 35% des voix. Il y avait la conjoncture, les trente ans aux pouvoir du PC, et mon inexpérience politique municipale qui ne m’ont pas aidé. Mais je ne regrette rien puisque j’appris à connaître bien ma ville. Je n’ai aucune rancœur contre Doré.
Troisièmement, j’ai été chef de l’opposition même si je n’étai pas au conseil municipal durant 2,5 années avant que je démissionne pour des raisons professionnelles. J’ai vu là le manque de savoir-faire de Doré comme maire. Je suis convaincu qu’Il a désorganisé Montréal et je l’ai dénoncé multiples fois dans les médias. Il a mal géré la ville, même s’il l’a fait, je crois honnêtement (je lui donne le bénéfice du toute comme il aime à dire). J’ai écris de nombreuses lettre à la Presse à ce titre pour contester des décision de Doré. J’ai même demandé, finalement, devant la mal-administration qui était évidente, la démission du secrétaire-général (nouveau poste créée par Doré) et un mois plus tard il était parti.
Accès Montréal a été une bonne chose mais au début il voulait décentraliser des pouvoirs vers des genres de mini-hôtels de ville dans les « arrondissements,( nom qu’il a introduit à Montréal copiant Paris alors qu’avant on utilisait quartier) que je n’ai cessé de le contester sur ce point. Montréal avait eu l’expo 67 et les JO de 1976 avec la structure relativement simple qu’elle avait, pourquoi la changer ? Aujourd’hui, il a dénoncé, avec raison, à Dutrisac la structure actuelle de la ville. Quand même !
Claude
Erreur. Jean Doré a fait élire deux conseillers de Équipe Montréal, soit Sammy Forcillo et Helen Fotopoulos.
Merci pour les éclaircissements.
Ma mémoire m’a trompé. C’est contre toi qu’il a gagné, je m’excuse
de tourner le fer dans la plaie.
Je ne crois pas qu’il y ait présentement à l’Hôtel de ville une personne capable de prendre la relève.
Ça doit venir de l’extérieur...mais Coderre pose, à mon avis, des interrogations. Ce qu’il faut c’est un président du comité exécutif
du genre d’Yvon Lamarre...lui il menait efficacement la ville et le maire faisait de la politique.
Gérard
ps Un maire qu’on ne manque pas c’est Sarto Fournier, le plus tarlet de tous les maires de Montréal
Oui un Lamarre, un Saulnier ou un
Desmarfais, pas une Cousineau qui lors de la fameuse inondation du 14 juillet a laissé tomber les Montréalais et Montréalaises. Mais le maire aussi est important dans l'administration de la ville. Il est celui élu par le suffrage universel. Leprésuident est nommé. C'est en fait un duo dont on a besoin. Rappelle-toi on disait toujours l'administration Drapeau-Desmarais ou Drapeau-Saulnier ou encore un Drapeau-Lamarre. Doré comme Tremblay ont laisse faire le president du comite exécutif. On voit ce que cela a donné.
Ne t'en fais pas je ne suis pas si sensible. J'ai pris toute la responsabilité de ma défaite. Ce qui m'a surtout rendu triste c'est que j'ai, malgré moi, entrainé dans la défaite un bon nombre d'excellents conseillers.
À Anonyme
Merci de la précision en rapport avec l'élection de 2 conseillers. J,apporte la correction immédiatement.
Hier soir je n'avais encore lu que la présentation de ton blogue malheureusement car j'aurais aimé te dire le plaisir que j'ai eu à le lire,d'abord pour la très bonne description de la Similitude de leurs parcours et peut-être , en fait sûrement , pour le blâme que méritait certainement cette proclamation,narquoise,du manque de qualification de Denis Coderre.
Maurice.
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