La Presse rapporte, aujourd’hui, qu’un groupe de recherche sur les espaces festifs a présenté un rapport pour changer la nature du parc Olympique La raison : pour masquer « l’héritage des Jeux Olympiques de Montréal qui est considéré comme un échec dans le monde ». On suggère de « briser le béton pour le remplacer par des espaces verts, rendre la rue Pierre-de Coubertin commerciale et changer le nom du site pour refaire son image ».
Premièrement, une mise au point s’impose. J’ai voyagé assez souvent dans le monde pour savoir que ce n’est pas l’héritage qui est critiqué. Le monde s’en fout que ces Jeux soient bons ou non pour l’héritage des montréalais. Non, c’est le dépassement des coûts des installations olympiques qui a frappé l’imagination mondiale et qui continue à être donné comme un mauvais exemple à éviter par les nouveaux pays qui aspirent à obtenir la tenue des jeux du CIO. À voir ce qui se passe à Londres pours les installations sportives des prochains JO, où les coûts sont incommensurablement plus hauts que prévus, je crois que l’exemple de Montréal va être enfin oublié.
Ce ne fut pas une erreur de construire un stade couvert. C’était une demande sine qua non du baseball majeur pour garder la concession des Expos à Montréal. Lorsque le maire Drapeau avait obtenu la venue de l’équipe à Montréal pour la faire jouer temporairement au parc Jarry, il avait convenu avec les autorités de la ligue qu’un stade couvert serait construit éventuellement.
Fut-ce une erreur de confier à l’architecte Taillebert la réalisation du parc Olympique qui contenait le stade d’athlétisme, le vélodrome et les bassins de natation sans compter les milliers de places de parking en sous-sol ? Peut-être, parce qu’il a proposé un design complexe par rapport au peu de temps disponible pour le réaliser. Mais le résultat est un chef d’œuvre architectural unique dans le monde et qui est vanté partout. Ce complexe a coûté trop cher ? Oui. Mais il aurait coûté beaucoup moins si les syndicats d’ouvriers de la construction avaient collaboré au lieu de garder un revolver sur la tempe du COJO en créant toutes sortes de délais et en le menaçant s’il n’obtempérait pas à leurs demandes qui devenaient de plus en plus exagérées.
Quant au mat et la toile qui couvre le stade, ils ont été réalisés quelques années après les JO et là le problème est simple : le design n’était pas assez bon. Nous avons dépensé des millions de $ pour un système qui ne marche pas. C’est la faute à qui ? Taillibert ? Non, car le design a été fait par des ingénieurs canadiens. On a cherché à justifier le piètre résultat par toutes sortes d’excuses en prétextant même que c’était un projet irréalisable. Quelle sottise ! Le premier projet et le deuxième des Américains se sont avérés défectueux. Ce sont de mauvais designs qui furent à la base de tout ce qui est arrivé avec la couverture du stade. Heureusement que ce ne sont pas ces ingénieurs qui ont envoyé un homme sur la lune car il ne serait jamais revenu…
Puis, il y a l’utilisation du stade. Pendant les premières années tout était beau. Les Expos, le club de football Alouettes et le club de soccer Manic de Montréal, remplissaient le stade et on ne parlait pas de mauvais héritage… au contraire. J’avais mes billets de saison pour les Expos et il était fort intéressant de se retrouver au stade pour une partie. Les billets étaient en grande demande.
Puis la débandade a commncé. Soudainement le Manic, malgré ses nombreux supporteurs enthousiastes, a disparu. Les Alouettes ont perdu peu à peu leurs supporteurs et finalement leur franchise. La propriété des Expos a changé de mains et non pour le mieux. Les nouveaux propriétaires n’avaient pas suffisamment d’argent pour supporter une telle équipe professionnelle dans les périodes creuses. Face à des difficultés, Ils blâmèrent le stade et affirmaient que le jeu était trop éloigné des spectateurs (pourtant, il ne l’était pas lorsque le stade était rempli à craquer). Le RIO réaménagea le terrain, coupa dans les estrades et rapprocha ainsi les amateurs. Rien ne fit. Puis, comble du ridicule, on insinua que le stade était trop loin du centre-ville, pourtant on s’y rend en 20 minutes, et on proposa la construction d’un nouveau stade pour garder les Expos à Montréal. Finalement, ces derniers quittèrent notre ville et Montréal perdit du coup toute la publicité que notre participation à cette grande ligue de baseball professionnelle américaine apportait à notre ville.
Ce n’est pas à cause du stade que l’on a perdu ces équipes, c’est le résultat de promoteurs inadéquats et insuffisamment riches.
Plus tard, la concession des Alouettes revint à Montréal et au lieu de réintégrer le stade, le nouveau propriétaire qui avait peu de sous, logea l’équipe au vieux stade Molson sur les flancs du Mont-Royal, près du centre-ville. Dès la première saison, j’avais mes billets de saison. Le stade était inconfortable, sans parkings, sans services sanitaires suffisants et adéquats, avec une restauration minimale, etc… rien à comparé au stade olympique qui était toujours à vingt minutes de là, vide. Les nouveaux propriétaires demandèrent l’aide des gouvernements pour améliorer leur stade. Ces derniers et la ville de Montréal acquiescèrent, au lieu de dire non et de forcer le propriétaire à réintégrer le stade olympique. Depuis, les octrois continuent à débouler et le stade Molson s’est agrandi au détriment du parc du Mont Royal. Combien de blogs ai-je écrit pour décrier cette folie ! Le comble du ridicule, c’est que les Alouettes utilisent le stade olympique lorsque le stade Molson ne peut loger tous les spectateurs quand la demande est trop forte.
Quant au soccer, le groupe Saputo s’est mis en tête de le relancer à Montréal. Avec tous les nouveaux immigrés qui viennent de pays où le « foot » est le sport national, la nouvelle équipe « les Impacts » fait fureur. Au lieu d’utiliser le stade olympique, Saputo a construit, tout à côté du stade Olympique sur le même terrain, un stade de soccer à prix économique et minable architecturalement, qui utilise les parkings de ce dernier. Cette nouvelle structure défigure l’ensemble architectural du parc Olympique. Pour ajouter à l’injure, Saputo veut agrandir son stade et demande aux gouvernements des octrois importants. Pourtant, lorsque la foule est trop nombreuse, il transfert son équipe dans le stade olympique au grand plaisir des adeptes. Ridicule…
Autre situation choquante, le déménagement de l’imposante, importante et magnifique fontaine dessinée par le grand artiste peintre du Québec, Jean-Paul Riopelle, construite sous sa supervision et installée au milieu des promenades du parc olympique. Peu de publicité était faite pour inviter le public à aller voir cette œuvre. Elle fut déménagée, il y a à peine quelques années, pour être réinstallée dans le centre-ville. Ridicule…
Il semble que nos dirigeants politiques et les investisseurs font tout pour saboter le parc Olympique. Le problème de ces derniers, ils n’ont pas les poches assez profondes pour vraiment supporter des équipes professionnelles. Ils se retournent vers les solutions faciles et les gouvernements pour trouver les argents dont ils disent avoir besoin. Le malheur est que nous n’avons pas assez de familles du calibre des Bronfman ou Molson à Montréal pour vraiment faire vivre de façon permanente de grandes équipes professionnelles dans notre ville. Le baseball est parti, le basketball n’est qu’à Toronto, le soccer n’est pas de taille mondiale.
Les immenses espaces vides du stade, particulièrement dans la tour, auraient pu être disponibles pour les activités sportives des étudiants montréalais. McGill, par exemple, au lieu d’empiéter sur le Mont-Royal pour construire un centre de sports, aurait pu faire une entente avec la RIO pour utiliser une partie du stade. Déjà les bassins de natation, les pistes d’athlétisme, etc. étaient disponibles. Par métro, les étudiants auraient pu facilement voyager entre le centre sportif installé au stade et leur université. De même pour les étudiants des universités de Concordia et d'UQAM ainsi que ceux de différents collèges. Le stade olympique aurait pu devenir un grand centre sportif pour notre jeunesse. Au lieu de suivre une telle route, que j’ai défendue devant les représentants de McGill et du conseil de ville de Montréal, les gouvernements ont accepté de dépenser des argents ici et là pour satisfaire les demandes de tous et chacun. On est dont heureux, chacun dans sa cour! Pendant ce temps, notre exceptionnel parc olympique dépérit.
Ce n’est pas en démolissant le parc Olympique que nous trouverons une solution. Les promoteurs de cette idée prennent comme exemple le nouveau Quartier des Spectacles qui vient d’être réalisé au centre-ville. Ils oublient que ces dépenses importantes sont justifiées par une demande importante des Montréalais et Montréalaises qui participent depuis plusieurs décennies à des activités de festivals au cœur de la ville et qu’il fallait réaménager l’ensemble pour tenir compte de ce fait. Plusieurs parties extérieures du parc peuvent devenir des espaces verts et être plus accueillantes, mais ce n’est pas en « brisant du béton » que nous protégerons l’héritage qu’est pour nous le stade Olympique. Et, changer le nom n’est qu’une chimère.
Claude Dupras.
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