lundi 29 décembre 2014

Économie 2015 : la relance vers un nouveau boom


Le moindre que l’on puisse dire de l’économie américaine en 2014 est qu’elle a été dynamique. Au point que plusieurs économistes de ce pays prévoient qu’elle connaîtra une expansion encore plus grande en 2015 pouvant résulter dans un boom économique. Leurs arguments sont probants.

La croissance annualisée de 5% pour les trois mois se terminant à la fin de septembre dernier, suite à celle de 4,6% au début du semestre, laisse croire à certains analystes que le boom de la fin des années ’90 pourrait revivre.

Ce qui génère cette fois l’espoir grandissant des investisseurs est la volonté de dépenser des consommateurs, le bas niveau de leurs dettes personnelles suite à la crise financière, la baisse fulgurante des prix du pétrole, la hausse vertigineuse des marchés et un gouvernement qui favorise davantage la croissance.

Les USA sont différents des autres, économiquement, et le contraste est frappant. Les pays d’Europe dont la Grèce, l’Italie, l’Espagne, le Portugal, la France… vivent sur le seuil de la récession. Certains en sortent, d’autres y entrent.

Les entreprises américaines vont bien et cela se reflète par les bons chiffres des marchés qui savent les reconnaître dont le Dow Jones qui atteint des niveaux-records (18 000) et le Standard and Poor’s qui se situe aussi à des marques records.

D’autres statistiques sont aussi révélatrices dont le niveau de chômage à 5,8% et la tendance dans la croissance de l’emploi devenue la plus forte depuis 25 ans.

Les salaires commencent à remonter après de longues années de stagnation, les dettes des ménages ont diminué depuis la crise financière et la baisse du coût de pétrole équivaut à une diminution de taxes qui fait économiser des milliers de $ aux entreprises et des centaines aux automobilistes. Et les pronostics sont que cette situation puisse continuer jusqu’au milieu de l’été prochain.

Le côté incertain est l’immobilisme du marché des habitations et des salaires qui tardent à confirmer la solidité de leur croissance. Il y a aussi les compagnies qui sont relativement riches mais qui hésitent à investir dans certains domaines, comme en équipement et en machinerie, même si les taux d’intérêts sont bas.

Nonobstant cela, les signaux macroéconomiques sont encourageants. Durant quatre des cinq derniers trimestres, la croissance a dépassé 3,5 %. Et pour le trimestre qui n’a pas produit, on attribue le résultat aux mauvaises conditions climatiques qui ont affligé le pays. Les économistes séniors américains interprètent cette situation comme étant la démonstration que le pays a résolu les problèmes négatifs qui ralentissaient la reprise. Ils croient que le nouveau momentum permettra aux USA de résister au ralentissement économique du Japon et au peu de croissance des pays européens. Les prévisions actuelles pour la croissance de 2014 sont de 2,3 % et de 3,3% en 2015.

Les périodes d’austérité instituées par les États et les villes américaines contribuent maintenant à la croissance. Le gouvernement fédéral de Washington a aussi augmenté ses dépenses de 9,9% au troisième quart, ce qui est un apport positif pour l’avenir. Cette situation affectera l’Europe qui verra son économie croître suite aux nouvelles commandes de machinerie et de matériel venant des USA.  

Au Canada, la croissance pour 2015 est prévue à 2,5% selon la Chambre de Commerce du Canada, une augmentation de 0.2% par rapport à l’année précédente, nonobstant le fait qu’elle ait été affectée par la baisse de la croissance mondiale qui a fait fléchir les exportations de notre production manufacturière.

Grâce au nouvel accord de libre-échange Canada-Europe, les croissances américaine et européenne auront un effet important sur les exportations du Canada en donnant à celui-ci une vigueur économique additionnelle qui s’ajoutera à celles des gouvernements des provinces et des ménages. L’augmentation de la demande sera graduelle, progressive et influencée aussi par la baisse du huard. Nos entreprises investiront davantage dans le développement de leurs entreprises et voudront être plus efficaces. L’occasion étant là, elles voudront aussi accroître leur compétitivité et trouver de nouveaux marchés en renforçant leur participation aux chaînes d’approvisionnement mondiales pour en tirer parti, comme en Chine, au Brésil, en Allemagne, au Royaume-Uni, au Mexique… et cela avec l’aide des gouvernements.  

Malgré qu’il soit prévu que le consommateur demeurera un acheteur prudent (son taux d’épargne demeurera élevé) et modérément actif, le taux de chômage diminuera de 6,7% à 6,5% pour 2015. Et s’il décide de dépenser, étant donné ce qu’il ressentira des USA, tout devient possible.

La construction demeurera très forte au Canada et des régions comme celle de Montréal verront des projets évalués globalement à des dizaines de milliards de $ d’investissements privés et publics pour la construction de plusieurs tours à logements et à bureaux, de 30 à 40 étages, dans le centre-ville et sur le territoire de la métropole, du nouveau pont Champlain, du nouvel échangeur Turcot, etc.. Sans compter le nouveau programme d’investissements dans les infrastructures que mettra en marche le gouvernement du Québec et qui viendra s’ajouter à celui annoncé en 2014 par le gouvernement conservateur d’Ottawa. Il y aura aussi les centaines de millions de $ en remboursements d’impôts fédéraux qui seront versés par chèques aux familles et aux individus durant 2015.

Les 50 000 nouveaux immigrants au Québec, en 2015, viendront ajouter à la demande d’habitations, de voitures, de meubles, de vêtements, de nourriture, de matériaux de construction, etc..

Par contre, les coupures budgétaires pour les dépenses gouvernementales du Canada et du Québec feront en sorte qu’elles contribueront peu à la croissance. Mais ce que les gouvernemens font augure bien pour le futur comme on peut le constater à Ottawa qui annonce maintenant non seulement un budget équilibré mais aussi des coupures d’impôts. Il nous faut être patients de ce côté-là, comprendre le pourquoi des actions draconiennes qui sont prises et savoir que demain sera un meilleur jour.

L’inflation est bien contrôlée et il est prévu qu’elle évoluera à « l’intérieur de la fourchette de maîtrise de l’inflation de 1 à 3 % ». Le taux de financement des banques sera aussi maintenu bas puisque la Banque du Canada a indiqué qu’elle n’est pas pressée de le hausser.

On prévoit aussi que le dollar se maintiendra à la baisse d’ici la fin de 2015, ce qui aidera les exportations.

Je sais que depuis quelques jours, plusieurs économistes nous conseillent d’être prudents en rapport avec les prévisions du développement économique 2015 au Québec. Certains sont mêmes négatifs. Certes, il y a des risques que les perspectives changent. Et comme je ne suis pas un économiste, je ne peux affirmer qu’ils ont tort. Mais je suis porté à ne pas être en accord avec leur position pour les raisons que je viens de décrire. On verra bien à la fin de 2015.

Pour moi, tout est là pour réussir. Il nous reste à faire ce qui doit être fait. Investir, innover et travailler… davantage.

Claude Dupras

mardi 9 décembre 2014

Le nouveau pont Champlain : pas trop tard pour bien ou mieux faire


Aujourd’hui, le trafic des ponts et du tunnel qui relient Montréal au territoire de la Rive-Sud est intense aux heures-de pointe, au point qu’il déborde partout et est souventes fois arrêté par des bouchons. Les périodes d’attente par les automobilistes sont longues et nombreuses. Pourtant du côté nord, on sort relativement facilement de l’île de Montréal. L’explication est simple. Sur le côté sud, il y a 13 voies de circulation de véhicules pour traverser le fleuve, dans chaque direction, alors qu’il y en a 22 sur le côté nord pour une population presque équivalente. Il n’y a eu aucune nouvelle voie de circulation pour traverser le fleuve Saint–Laurent depuis 1967.
 

Depuis de nombreuses années, les montréalais et les citoyens de la Rive-sud exaspérés, les industriels et les commerçants demandent un pont additionnel sur le Saint-Laurent pour desservir l’île de Montréal. Pont additionnel veut dire voies additionnelles. Malheureusement, le nouveau pont Champlain ne répondra pas à ce besoin car il ne comporte que trois voies dans chaque direction, tout comme l’actuel. Le même nombre et la même largeur de voies sauf pour un accotement additionnel et un train léger.
 
Il y aura donc encore des bouchons sur le nouveau Pont Champlain, et sur les rives de chaque côté, même si le nouveau train léger remplacera les dizaines d’autobus qui aujourd’hui font la navette. « Mais ce ne sera pas suffisant car le déficit en termes de capacité routière est trop grand » m’a confirmé un ingénieur spécialisé en circulation de véhicules. De plus, les camions qui viennent des USA auront toujours la même difficulté pour livrer leurs marchandises. Avec un accès rapide, les coûts seraient diminués.
  
Dès l’ouverture du pont, nous en serons presque au même point. Il ne me semble pas y avoir eu de collaboration entre Québec et Ottawa (conflit Harper-Marois) pour le design du nouveau pont en rapport avec les besoins de circulation des véhicules entre Montréal et la rive-sud. Où en serons-nous dans 10 ans, avec un nombre d’automobiles qui croît au rythme de 1,9% par année au Québec dont environ 50,000 par an dans la grande région de Montréal. L’autoroute des Laurentides nous démontre clairement les effets du boom automobile.
 
Une voie additionnelle dans les deux directions du nouveau pont serait un ajout, nécessaire, essentiel et minimum. Deux voies équivaudraient à un pont additionnel. D’ailleurs, cela est conforme aux conclusions de la très sérieuse Commission Nicolet, dirigée par le réputé ingénieur québécois Roger Nicolet, en janvier 2003 et qui a fait une étude intensive pour améliorer la mobilité entre les deux rives du fleuve Saint-Laurent. Elle a suggéré l’addition d’un tunnel à deux voies et deux niveaux dans chaque direction, parallèle au pont Champlain (alors en bonne condition). Il est inconcevable qu’aujourd’hui personne ne relève cette situation.
 
Une voie de plus, c’est 2 000 véhicules par heure additionnelles aux heures de pointes, dans chaque sens, soit une augmentation de 33% de véhicules.
 
Il nous faut demander, je dirais même exiger, l’ajout d’une voie additionnelle dans chaque direction? Ces voies ne coûteraient relativement pas cher. 
 
De plus, pour la construction du nouveau pont Champlain, le gouvernement fédéral n’a pas fait de concours international invitant les designers de ponts à présenter leurs propositions. Il a unilatéralement décidé d’engager le compétent danois Poule Ove Jensen. À ce moment-là, il a mis de côté la possibilité d’obtenir les concepts d’autres grands designers, tel sir Norman Foster qui a fait le superbe viaduc de Millau. 
 
L’architecte français Roger Taillibert est un de ceux qui auraient aimé présenter leur projet de pont mais n’en ont pas eu l’opportunité. Devant l’évolution du dossier, il a décidé de faire connaître, en catastrophe, son projet aux Montréalais. C’est un beau et spectaculaire projet, tout d’acier, qui, il me semble, leur plait plus que celui de Jensen. Taillibert assure qu’il est moins cher et peut être réalisé plus rapidement. Or, sa proposition arrive en pleine période de préparation des soumissions pour la réalisation du nouveau pont par les trois groupes de constructeurs choisis par le fédéral. Ils doivent présenter leurs propositions techniques dans un peu plus de 2 mois, le 4 février 2015, et leurs propositions financières le 1er avril 2015.
 
Les groupes choisis sont très compétents et regroupent chacun des ingénieurs et constructeurs de grande réputation au Québec, au Canada et à travers le monde pour la réalisation de grands ouvrages d'art semblables. Ils doivent respecter le design et le concept de Jensen, mais à la demande du gouvernement fédéral, ils pourraient soumettre un prix pour un pont à quatre voies dans chaque sens au lieu de trois et en faire les plans et devis. Un retard de quelques mois seulement pour la remise de propositions dans ce sens serait requis mais le résultat en vaut la chandelle.
 
Le projet actuel du nouveau pont Champlain doit être repensé. Il ne s’agit pas de changer les équipes de constructeurs choisis pour la compétition, mais plutôt de réfléchir davantage à sa capacité-véhicules et à son allure. Jensen devrait modifier son projet pour ajouter de nouvelles voies.
 
Malheureusement, cela n’assure pas que notre pont sera le meilleur possible à tous les points de vue car si d’autres designers, jamais sollicités, sont en mesure de proposer des solutions différentes, pratiques, moins coûteuses, plus spectaculaires, pourquoi ne pas les considérer ? Sur la proposition de Taillibert, le ministre Lebel a affirmé spontanément « il est trop tard ! » sans même demander à ses ingénieurs d’examiner le concept proposé par Taillibert avant de le rejeter du revers de la main.

Trop tard ? Pourtant, si un projet représente une solution permettant d’avancer la livraison du pont, il ne peut être question de retard. Et s’il était moins coûteux, cela diminuerait le coût du péage, non ? On n’a pas les moyens de refuser de meilleures idées ou de meilleurs concepts. Si le concept de Taillibert est acceptable au point de vue technique, pourquoi ne pas le soumettre aux soumissionnaires comme possibilité d’une proposition alternative.
 
Notre nouveau pont sera là longtemps et ces quelques mois supplémentaires peuvent changer beaucoup de choses. 
 
Les Montréalais ont débattu sur le nom du nouveau pont, mais ils n’ont pas eu la possibilité de discuter de son concept et design, ce qui est beaucoup plus important. Le temps est venu qu’ils s’impliquent.
 
Nous voulons le plus beau pont. Nous voulons qu’il réponde aux pressants problèmes quotidiens de mobilité pour les personnes et les marchandises. Nous voulons éliminer la pollution que génère la congestion qui nous confronte, de plus en plus chaque jour. Nous voulons que les économies montréalaise et québécoise cessent d’être pénalisées par les problèmes de circulation des véhicules. C'était le constat de la Commission Nicolet.

 
Claude Dupras